Déjà aux prises avec la menace jihadiste et la guérilla menée par le mouvement communiste NPA [New People’s Army], Manille voit sa souveraineté être contestée par Pékin sur ses possessions en mer de Chine méridionale, ce qui donne lieu à des tensions récurrentes. Et cela même si, en 2016, la Cour permanente d’arbitrage [CPA] de La Haye a estimé que les revendications chinoises n’avaient « aucun fondement juridique ».

Aussi, au-delà des coopérations militaires scellées avec d’autres puissances de la région Indopacifique, comme l’Australie, le Japon, la Corée du Sud et même la France, et du traité de défense mutuelle signé en 1951 avec les États-Unis, les Philippines s’attachent à renforcer leurs capacités militaires.

À cette fin, Manille a décidé de porter son budget de la Défense à 4,65 milliards de dollars cette année [soit une hausse de 12,3 % par rapport à l’exercice précédent]. Ce qui permettra d’acquérir 12 avions de combat légers F/A-50 Golden Eagle supplémentaires auprès du sud-coréen KAI.

Cependant, les Philippines envisagent d’autres programmes d’armement encore plus ambitieux. Ainsi, il est question, depuis maintenant plusieurs années, d’acquérir deux sous-marins à propulsion diesel-électrique [le français Naval Group est en lice] ainsi qu’une douzaine d’avions de combat dits de quatrième génération. Jusqu’à présent, deux modèles ont été privilégiés, à savoir le JAS-39 Gripen du suédois Saab et le F-16 Viper de l’américain Lockheed-Martin.

En 2021, la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], chargée des exportations d’équipements militaires américains, autorisa la vente potentielle de douze F-16 « Viper » aux Philippines pour un montant estimé à 2,43 milliards de dollars. Dans un second avis, elle avait aussi donné son feu vert au transfert de douze missiles antinavires AGM-84M-L-1 Harpoon Block II pour 120 millions de dollars.

Seulement, à l’époque, le ministère philippin de la Défense n’avait pas les moyens financiers pour se procurer l’avion de combat américain, l’enveloppe prévue pour un tel investissement n’étant alors que de 1 milliard de dollars. Aussi, il ne donna pas de suite… et le JAS-39 Gripen semblait dès lors le mieux placé pour équiper la force aérienne des Philippines. Et cela d’autant plus que la partie suédoise proposait à Manille de louer ces appareils.

Aussi séduisante soit-elle, cette offre pourrait ne pas aboutir. En effet, alors que le chef du Pentagone, Pete Hegseth, a récemment rappelé l’engagement des États-Unis à fournir l’assistance nécessaire pour aider les Philippines à lutter contre « toutes les menaces », notamment celles représentée par « l’agression chinoise », la DSCA vient de publier un nouvel avis pour recommander au Congrès d’autoriser la vente de vingt F-16C/D « Viper » aux forces armées philippines, pour un montant estimé à 5,58 milliards de dollars.

Outre les chasseurs-bombardiers, cette somme comprend la livraison de 152 missiles air-air [112 AIM-120C-8 AMRAAM et 40 AIM-9X Sidewinder] et de différents types de bombes, dont 36 GBU-39/B.

« Cette vente proposée soutiendra la politique étrangère et la sécurité nationale des États-Unis en contribuant à améliorer la sécurité d’un partenaire stratégique qui continue d’être une force importante pour la stabilité politique, la paix et le progrès économique en Asie du Sud-Est », a fait valoir la DSCA.

Cela étant, rien ne dit que Manille acceptera cette offre, même si celle-ci doit encore faire l’objet de négociations contractuelles. En attendant, la réaction de Pékin à l’avis de la DSCA n’aura pas tardé.

« La coopération en matière de défense et de sécurité entre les Philippines et d’autres pays ne doit cibler aucune tierce partie et ne doit pas nuire aux intérêts d’une tierce partie », a en effet mis en garde Guo Jiakun, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. « Elle ne doit pas non plus menacer la paix et la sécurité régionale, ou exacerber les tensions régionales », a-t-il ajouté.