L’UE prolonge jusqu’en 2027 la protection accordée aux réfugiés ukrainiensPlus de liste des armes livrées
Jusqu’à tout récemment, l’Allemagne publiait une liste du matériel militaire livré à Kiev. Fin mai, le chancelier allemand Friedrich Merz a toutefois annoncé que cette liste ne serait plus diffusée afin d’éviter de livrer trop d’informations à Moscou. Une démarche légitime, mais qui complique le travail des chercheurs. « Ça nous donnait une très bonne idée de ce qui était globalement livré, poursuit Léo Péria-Peigné. Aujourd’hui, l’Europe fournit des munitions d’artillerie en assez grande quantité ». En 2025, l’Union européenne tablait sur la production d’1,5 million d’obus de 155 mm, soit davantage que les 1,2 million produits aux États-Unis.
En matière de défense antiaérienne, critique pour tenir face aux innombrables assauts russes, sept systèmes Patriot américains ont déjà été fournis par l’Allemagne, la Roumanie et les États-Unis, de même que deux systèmes SAMP/T européens par Rome. C’est peu, même si « l’Allemagne continue d’envoyer des systèmes de moyenne portée Iris-T » détaille le chercheur.
« Sur le plan de l’artillerie, Berlin contribue avec des chars anti aériens Gepard et des chars de combat Leopard 1, rénovés et fortement appréciés sur le champ de bataille par les Ukrainiens, auxquels on peut ajouter les canons d’artillerie Dana tchèques, les canons M109 américains livrés par l’Italie, et les véhicules de transport M113. Mais il faut savoir qu’en parallèle, de plus en plus de systèmes sont directement achetés par des pays européens (le Danemark et les Pays-Bas notamment) à l’industrie ukrainienne, comme les canons automoteurs de 155 mm Bodhana ».
La promesse belge de livrer des F-16 à l’Ukraine a stimulé la désinformation russe : « Le but était que la population se sente menacée »Et les F16 belges ?
Qu’en est-il des fameux F16 promis à Kiev ? « Ça se termine doucement, répond le chercheur de l’IFRI. À ma connaissance, tous les F16 néerlandais ont été livrés. Il doit encore manquer des F16 danois… et les F16 belges arriveront bien un jour ». Selon les dernières déclarations du ministère de la Défense, Les premiers des 30 F16 belges devraient arriver avant la fin de l’année, la totalité d’ici 2028.
Belges, Néerlandais et Allemands ont également développé une certaine compétence dans le développement de drones navals, mais en matière de drones aériens, Kiev – qui consomme 250 000 drones par mois – produit l’essentiel de ses besoins à domicile.
Tous types d’armement confondus, « l’Ukraine estime être autonome à 40 % », poursuit le spécialiste de l’armement. « Mais cela reste très difficile à quantifier précisément. L’ampleur du soutien européen est même impossible à définir. En termes de volumes, je pense qu’on ne reverra jamais les volumes des deux dernières années parce que tout était de stock et que ces stocks ne sont pas infinis alors que les Ukrainiens consomment à flux tendus. Il y a bien quelques transferts de systèmes neufs, mais cela reste très limité. Les initiatives européennes existent, ce qui est déjà un énorme progrès puisque ce n’était pas le cas il y a trois ans, mais elles en sont à leurs balbutiements ».
L’Allemagne, par exemple, est en train de construire la première usine de munitions pour système de missiles sol-air Patriot hors des États-Unis, mais la production ne devrait pas commencer avant 2027.
Trump dit être « déçu » par la Russie comme par l’Ukraine: « Je pense qu’un accord aurait pu être trouvé »Chiffres douteux
L’une des questions essentielles consiste désormais à savoir si l’Europe et l’Ukraine peuvent tenir la distance en cas de désintérêt américain. Outre notre dépendance aux systèmes Patriot, nos ressources sont limitées en matière de logistique, de télécommunications et de renseignement. « Il y aurait de trous, c’est une certitude, estime Léo Péria-Peigné. Les Ukrainiens sont capables de faire certaines choses tout seuls, ils ont développé leurs propres satellites de communication, ce qui leur a – a priori – permis de mener seuls leur récente opération contre l’aviation stratégique russe. Mais si les Américains venaient à couper Starlink, le résultat serait catastrophique. En sachant qu’une partie de l’infrastructure des systèmes de combat ukrainiens est hébergée au Pentagone, la perte du renseignement serait problématique également. Les pays européens ne sont pas capables non plus de livrer certaines choses, comme les missiles sol-air ATACMS tirés par les Himars ».
De manière générale, que ce soit en termes de production d’armement ou de capacité à mener une guerre d’usure sur le front, les Russes ont l’avantage de la quantité et du temps, même si les chiffres communiqués par Moscou doivent être pris avec prudence. « S’ils déclarent produire 6 millions d’obus par an tout en consommant 6 millions d’obus nord-coréens, il y a un problème, parce qu’ils ne crachent pas 12 millions d’obus par an sur l’Ukraine, commente le chercheur français. Et ils restent très loin des volumes qu’ils pouvaient déployer en 2022-2023″.