Une jeune femme victime d'une crise d'asthme la nuit au travail.À l’heure où 10 % des asthmes seraient liés au travail, les horaires nocturnes auraient une incidence décuplées chez les femmes. © MSGrowth / Freepik

Après le sommeil, le métabolisme ou encore l’humeur, une nouvelle incidence du travail de nuit commence à susciter des questions. D’autant que ces effets concernent en priorité les femmes.

Alors que ces dernières sont déjà plus susceptibles de souffrir d’asthme sévère, de nouvelles recherches, menées dans le cadre du UK Biobank, révèlent que le travail de nuit accroît significativement leur risque respiratoire. Comment expliquer cette vulnérabilité spécifique ? Quels facteurs physiologiques ou socioprofessionnels entrent en jeu ? Et surtout, quelles mesures de prévention envisager ?

Asthme féminin et travail de nuit : une étude solide à grande échelle

L’étude, publiée dans ERJ Open Research, s’est appuyée sur les données du UK Biobank : 274 541 individus, dont 5,3 % asthmatiques (1,9 % modéré à sévère). Elle a comparé des travailleurs de jour, de nuit ou en rotation permanente.

Résultat : les femmes effectuant exclusivement des nuits avaient un risque 50 % plus élevé d’asthme modéré à sévère que les femmes travaillant de jour. Ce sur-risque n’est pas observé chez les hommes, quel que soit leur horaire de travail.

Chez les femmes post-ménopausées sans traitement hormonal de substitution (THS), le risque est presque doublé, augmentant de 89 % parmi les travailleuses de nuit. Le THS semble avoir un effet protecteur, ouvrant un champ d’investigation prometteur.

Les hormones et l’horloge biologique en mécanismes sous-jacents

Le travail nocturne dérègle l’horloge interne, influençant le système immunitaire et inflammatoire. Les femmes seraient particulièrement sensibles à ces déséquilibres hormonaux et immunitaires.

Le lien entre asthme et hormones est bien établi : la testostérone paraît protectrice, tandis que la diminution des œstrogènes comme en post-ménopause accroît les risques. Le THS pourrait donc compenser cette vulnérabilité, mais seule une étude ciblée le confirmera.

Une inégalité hommes-femmes persistante

L’asthme d’origine professionnelle touche entre 5 % et 10 % des asthmes chez l’adulte. En France, des secteurs comme la santé, le nettoyage ou l’industrie présentent une prévalence plus élevée. Le travail de nuit accentue cet environnement à risque.

Selon Santé Publique France, la proportion de femmes asthmatiques liées à l’activité professionnelle atteint près de 9 %. L’étude anglaise vient renforcer cette réalité française en y ajoutant la variable du travail de nuit.

Quelles pistes pour prévenir le risque d’asthme ?

D’abord, une évaluation médicale régulière, intégrant un suivi de la fonction respiratoire, s’impose chez les femmes exposées à des horaires nocturnes, en particulier celles ayant des antécédents familiaux ou personnels d’asthme. Les employeurs, quant à eux, devraient envisager des aménagements d’horaires pour éviter l’exposition prolongée au travail de nuit, notamment chez les salariées les plus vulnérables.

Une attention particulière doit également être portée aux femmes en période post-ménopausique, pour lesquelles l’instauration éventuelle d’un traitement hormonal de substitution (THS) pourrait faire l’objet d’une réflexion personnalisée avec un professionnel de santé.

Enfin, les acteurs de la prévention – médecins du travail, services de santé au travail, syndicats – ont un rôle clé à jouer dans la sensibilisation et l’anticipation des risques. Car il ne s’agit pas simplement de soigner des symptômes, mais bien d’adapter l’organisation du travail pour préserver durablement la santé respiratoire des femmes.

À SAVOIR

L’asthme est une maladie inflammatoire chronique des bronches qui provoque un rétrécissement temporaire et réversible des voies respiratoires. Ce mécanisme résulte d’une hypersensibilité des bronches à divers stimuli – allergènes, pollution, effort physique ou stress – entraînant une inflammation, une production excessive de mucus et une contraction des muscles bronchiques. Cette triple réaction provoque des symptômes typiques : toux, essoufflement, oppression thoracique et sifflements respiratoires.

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