De passage jeudi à Toulon, à l’occasion de la 7e édition d’i-Naval, l’ingénieur général hors classe de l’armement François-Xavier Dufer, le tout nouveau patron de la Direction de l’ingénierie et de l’expertise (DIE) de la DGA, a annoncé la création d’une capacité d’expérimentation de drones navals.

Vous réalisiez déjà des essais sur les drones navals. Alors dites-nous ce qui a motivé la création de cette nouvelle capacité ?

Effectivement, on travaille sur les systèmes de drones depuis très longtemps déjà. Mais, par les espaces énormes qu’ils sont capables de couvrir, les drones marins et sous-marins offrent une très forte potentialité. Que ce soit dans l’offshore, la recherche océanographique, ou encore les câbles sous-marins, le marché civil est en train d’exploser.

Dans le même temps, la conflictualité militaire augmente. Aussi, dans ce contexte, il nous a semblé, avec la Marine nationale, qu’il était utile de disposer d’une capacité plus large, plus agile, prête à l’emploi plus rapidement, qui nous permette d’évaluer ces drones et systèmes de drones.

Par rapport à ce que vous faisiez jusqu’à présent, que va vous apporter de plus cette nouvelle capacité d’expérimentation ?

Sur les 10 000 personnes que compte la Direction générale de l’armement, 7 500 travaillent dans les dix centres d’expertise et d’essais. On a donc déjà toutes les compétences, toutes les briques techniques. L’idée avec cette nouvelle capacité d’essai et d’expérimentation de drones navals est de structurer davantage les choses, en tirant parti notamment des implantations à Saint-Mandrier (le site du Canier et le site d’expérimentation des systèmes de défense aérienne) que nous avons en commun avec la Marine nationale. De façon à pouvoir réaliser plus rapidement des essais sur des systèmes de drones. Et ce dans les trois dimensions : à la surface, sous la surface et au-dessus de la surface.

Mon ambition pour la Direction de l’ingénierie et de l’expertise est qu’elle préserve dans la durée sa capacité d’éclaireur technologique à même de juger l’utilité et la maturité d’une technologie.

Des capacités comparables existent-elles déjà, ou vont-elles être créées pour les drones terrestres et aériens ?

Pas exactement. Chaque métier a ses particularités. DGA Techniques terrestres dispose de ce qu’on appelle des « arènes ».

À Bourges par exemple pour tester les mini-drones, ou à Bruz, centre spécialisé dans la maîtrise de l’information, pour tester les capteurs et les liaisons de données. Dès lors qu’on veut réaliser des essais à l’échelle ou travailler avec des capacités armées, des espaces beaucoup plus vastes sont nécessaires et on bascule sur les sites de DGA Essais de missiles à Biscarrosse et au Levant.

Quels seront les premiers essais que cette nouvelle capacité d’expérimentation de drones navals va mener ?

Mais ils ont commencé ! C’est d’ailleurs la preuve de la réactivité de cette nouvelle structure. Portée il y a tout juste un an par le major général de la Marine et ma prédécesseur à la tête de la DIE Cécile Sellier, la capacité d’expérimentation de drones navals est déjà opérationnelle. Ces essais, qui sont réalisés à Toulon, portent par exemple sur la capacité d’un glider sous-marin à détecter un drone de surface (en l’occurrence le DriX H-8 d’Exail). On va aussi tester la mise en œuvre d’une boucle de commandement et de contrôle avec le glider. Cette coopération, cette alchimie entre les ingénieurs de la DGA et les opérationnels de la Marine nationale doit nous permettre d’aller plus loin et plus vite dans les essais de systèmes de systèmes de drones.

Pensez-vous que, à l’image des drones aériens, les drones navals vont devenir des game-changers ?

Oui, par la profondeur de la zone qu’ils arrivent à traiter. On peut imaginer par exemple qu’à l’horizon 2030-2040, des systèmes combinant des drones de surface, sous-marins et aériens assureront une plus grande bulle de protection autour du groupe aéronaval. Ce qui ne veut pas dire que les drones vont remplacer les sous-marins ou les Rafale. Ce sera davantage une question de point d’équilibre entre systèmes de drones et armements plus classiques.