Quel est votre sentiment global au moment de tourner la page de cet US Open ?
« Je garde un goût amer de la semaine car je l’ai mal terminée. J’ai achevé dimanche avec trois bogeys sur les quatre derniers trous. J’aurais pu rendre la même carte de 73 en finissant avec trois birdies. Mon sentiment aurait été tout autre. Dans l’ensemble, ma semaine a été positive. Si on m’avait dit que je ferais un top 25 ici, j’aurais signé. En plus, je restais sur deux Majeurs (Masters et PGA Championship) décevants où je n’avais pas franchi le cut. »
Quel regard portez-vous sur votre jeu ?
« Mon drive a été nettement plus positif. Mon long jeu était là. Le putting, c’est une autre histoire. Le parcours était diabolique. »
guillement
Si nous devions jouer chaque semaine sur ce type de parcours, nous serions fracassés.
L’US Open a choisi le parcours le plus dur au monde. Affronter un tel monstre a-t-il tendance à vous effrayer ou à vous exciter ?
« Les responsables veulent que le gagnant soit au-dessus du par. Ils rendent le parcours très compliqué pour nous pousser à l’erreur. Par exemple, les greens ne sont pas arrosés. Ils sont très durs. La balle file. La longueur est extrême. Si nous devions jouer chaque semaine sur ce type de parcours, nous serions fracassés. J’avoue que j’aime ce type de défi de temps en temps. J’ai hâte de revenir la saison prochaine même si le challenge est brutal. »
La météo a complété ce décor apocalyptique…
« Le temps a été correct en réalité. Il n’y avait quasi-pas de vent de la semaine. Il avait plu en début de semaine pour ramollir les greens. La météo a été bonne. Hier, j’étais sur le 18 quand nous avons vu la pluie arriver. Quand le jeu doit s’arrêter, une sirène retentit. Avec Brooks Koepka, nous avons couru sur le fairway 18 pour boucler juste avant la pluie. »
J. J. Spaun a dû patienter ce qui l’a aidé à remporter son premier Majeur. Connaissez-vous bien l’Américain ?
« Je ne le connais pas personnellement. Il a deux filles comme moi. Je le vois chaque semaine. L’an passé, il avait dit en conférence de presse qu’il avait vécu une très mauvaise saison. En 2025, son parcours est incroyable. Son jeu est très bon. »
Revenons à vous. Cette 23e place efface-t-elle les deux déceptions d’Augusta et de Quail Hollow ?
« Non, il ne faut pas réfléchir ainsi. On oublie le passé pour mieux avancer. J’ai longtemps vécu avec l’obsession de remporter un tournoi sur le PGA. J’ai rempli ce rêve d’une carrière en février à Phoenix. Puis, j’ai ressenti un vide. Je me suis demandé ce que je devais faire. J’avais juste envie de retourner chez moi. »
Avez-vous traversé ce que les sportifs de haut niveau appellent le petit deuil ?
« Je n’irais pas jusque-là. Mais, après Phoenix, je n’avais plus d’objectif. Bien sûr, j’aimerais remporter un jour un Majeur. Je veux gagner d’autres tournois et améliorer mon classement. Mais, après Phoenix, je me retrouvais dans le top 20 mondial. J’avais accompli mon rêve. Alors, pourquoi devais-je continuer à jouer au golf ? Je n’avais plus envie. J’avais besoin d’un break. Le PGA ne laisse pas de place pour une pause. Je n’ai pas eu le sentiment de pouvoir profiter de cette victoire. »
Aujourd’hui, comment gérez-vous ce tsunami d’émotions ?
« Si vous me l’aviez demandé il y a deux mois, je vous aurais dit que je voulais juste rester à la maison et ne plus rien faire. Là, je me sens d’attaque pour entamer une quatrième semaine de compétition de suite. J’ai retrouvé mon panache. Je vis une saison positive. Je suis top 25 à la Fedex Cup. Je suis top 30 mondial. Je ne veux pas non plus dramatiser à cause de quelques semaines délicates et d’un finish à l’US Open décevant. »
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Comment emmenez-vous avec vous les leçons positives de l’US Open ?
« Je regarde beaucoup les stats en fin de tournoi. Ces dernières semaines, mon driving me mettait dans le dur. Ici, il vaut un top 10. C’est très positif. Mon putting était moins bon, mais il est facile à corriger. Je dois bosser ma vitesse et ma visualisation. Je sais ce que je dois faire. Je ne suis pas perdu. Je dirais même que cette 23e place est le pire résultat que je pouvais obtenir vu mon jeu. J’aurais pu finir dans le top 10 ou 15. »
guillement
J’aurais préféré finir dans le top 10 pour augmenter mes chances d’être le troisième belge repris en Ryder Cup.
Gardez-vous en tête que la sélection pour la Ryder Cup se joue souvent en juin et en juillet ?
« Je n’y pense pas tout le temps. Je sais qu’il est important de se montrer auprès de Luke Donald maintenant. Il ne sert à rien de gagner trois tournois en début de saison si tu disparais ensuite. J’aurais préféré finir dans le top 10 pour augmenter mes chances d’être le troisième Belge repris en Ryder Cup. Si je continue à bien jouer, j’aurai de bonnes chances. »
Avez-vous des échanges avec le capitaine Luke Donald ?
« Il est présent à certains tournois. Il partage quelques dîners avec des candidats. Il sera certainement là en Écosse pour le British Open dans un mois. Il regarde tout. »
Avez-vous le sentiment d’arriver à maturité à 32 ans ?
« J’ai encore des progrès à réaliser. Si on regarde mon plan de carrière, mon évolution est constante. Il y a quatre ou cinq ans, je suis entré dans le top 100. Puis, j’ai grimpé 80, puis 75, puis 50. Aujourd’hui, je suis monté dans le top 30. Ma progression n’a jamais été explosive. J’avance de manière linéaire. La fin de mon parcours est encore très loin. Je n’y songe pas du tout. »
Quel est votre programme pour l’été ?
« Là, je termine avec le Travelers Championship. Ce ‘signature event’ est mon dernier tournoi sur le sol américain avant le mois d’août. Ensuite, je profiterai de deux semaines de break pour la première fois depuis février. Je jouerai le Genesis Scottish Open (10-13 juillet) et le British Open (17-20 juillet). Après une semaine de pause, je retournerai aux États-Unis. »
Qu’est-ce qui vous rend heureux ?
« Je voyage avec ma famille. Mon métier est particulier. Avec ma femme et mes deux filles, nous sommes sur la route depuis octobre. Je suis heureux de les avoir à mes côtés. Un de ces quatre, mes enfants devront se rendre à l’école (un an et trois ans). Le PGA organise chaque semaine des crèches. Mes filles y retrouvent les mêmes enfants. Elles s’amusent bien. »