Un homme a été surpris en train de filmer deux jeunes filles à leur insu à la piscine de Hautepierre le 9 juin. Une première audience a révélé que de nombreuses captations ont été trouvées dans son matériel informatique. L’homme sera finalement jugé en juillet, après une expertise psychiatrique.

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Thibault Vetter

Publié le 17 juin 2025  ·  

Imprimé le 18 juin 2025 à 03h02  ·  

Modifié le 17 juin 2025  ·  

4 minutes

Lundi 9 juin, 17h. Brice est à la piscine de Hautepierre avec sa fille et une amie à elle. Les deux enfants, âgées de 4 et 5 ans, se changent dans une cabine. Le père de famille a une mauvaise intuition lorsqu’il remarque qu’un homme, Philippe C., entre dans la cabine située juste à côté, « alors que d’autres étaient disponibles ». Il se baisse pour vérifier s’il ne constate rien de suspect mais des affaires sont entreposées sous la palissade.

Inquiet, Brice décide finalement d’entrer dans la cabine des fillettes et remarque une caméra miniature placée dans une chaussure en position de filmer les deux mineures, alors nues, en contre plongée :

« J’ai pris la caméra. J’ai vu la main de cette personne qui essayait de me retenir. Je suis tout de suite sorti pour le bloquer. C’était très intense. Au bout de quelques secondes, la sécurité de la piscine est intervenue, puis la police est arrivée assez rapidement. »

Nombreux clichés retrouvés

Les policiers trouvent ensuite, dans les affaires de Philippe C., un taser, un scalpel, des liens de serrage et un préservatif. « C’est lié à un délire survivaliste, assure Me Laura Javaux, avocate du prévenu. Sur les sites de survivalisme, ils disent que le préservatif est le contenant le plus compact qui existe, c’est préconisé parce que c’est extensible et on peut y mettre une quantité d’eau importante. » Quant au scalpel, « c’est l’un des objets les plus tranchants ». Or Philippe C. se prépare en permanence à la fin du monde selon son avocate.

Dans la foulée de son interpellation, ce quinquagénaire est placé en garde à vue pendant 48 heures. Présenté devant le tribunal correctionnel de Strasbourg jeudi 12 juin en comparution immédiate, il n’a pas nié les faits. « Il lui est reproché des faits de voyeurisme sur mineurs et atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation, enregistrement ou transmission d’une personne présentant un caractère sexuel », précise la procureure de la République de Strasbourg, Clarisse Taron.

« Il a présenté ses regrets sincères, il est très mal et veut assumer les conséquences de ses actes, affirme Me Laura Javaux. D’autres vidéos ont été trouvées dans son matériel, il ne le conteste pas. Mais je ne peux pas dire combien de mineurs sont concernés. » Le juge a évoqué lors de l’audience « au moins 60 clichés, photos ou vidéos » de mineurs dans des piscines de Strasbourg, captés entre janvier 2023 et juin 2025, selon Brice.

Traumatisme pour la famille

L’affaire a été renvoyée à une audience ultérieure. En attendant, le tribunal a ordonné une expertise psychiatrique de Philippe C. et son maintien sous-contrôle judiciaire. Il doit pointer une fois par semaine au commissariat de Strasbourg et a l’interdiction de se rendre dans des piscines ainsi qu’aux abords des plans d’eau. Marié, père de deux enfants et salarié, il est dans l’obligation de suivre des soins psychiatriques et ne doit exercer aucune activité en lien avec des mineurs.

Brice se dit profondément choqué par cette situation. « Je suis constamment suspicieux maintenant quand je vois des hommes qui lui ressemblent. L’univers de ma fille, c’est les tétines et les licornes. Elle est en maternelle. Quelque chose d’immonde et de sordide est entré dans nos vies », confie t-il :

« Ça a été très difficile de lui expliquer. Elle a compris que quelqu’un avait essayé de la filmer. On lui a dit que son intimité devait être préservée. Pour elle, cet homme est un gros méchant qui va aller en prison. »

La sécurité des piscines en question

Le jeune père a sollicité l’Eurométropole de Strasbourg pour soulever la question de la sécurité dans les piscines de l’agglomération :

« Il y a une faille monumentale. Les cabines pour se changer dans les piscines de l’Eurométropole présentent une ouverture de 10 à 15 cm au sol. Combien d’autres enfants ou adolescents seront exposés à ce type d’individus tant que les cabines resteront ouvertes par dessous ? Je demande que les cabines ne soient plus mixtes, que les palissades soient entières du sol au plafond et qu’un audit soit réalisé sur la sécurité dans les piscines de l’Eurométropole. »

« Il faut voir la faisabilité technique et sanitaire, mais des choses doivent être faites pour améliorer la sécurité si elles sont possibles », déclare Vincent Debes, vice-président de l’Eurométropole et maire de Hoenheim :

« C’est un acte inadmissible, intolérable. Nous avons activé un plan d’exclusion de ce personnage. Dans les prochains jours, nous allons réunir le comité de prévention des piscines, composé d’usagers, d’agents et d’élus, pour voir ce qu’on peut améliorer. [Brice], avec qui j’ai déjà échangé, pourra y participer. »