INFO LE FIGARO – Michaël, le chef divisionnaire de Bordeaux Mérignac, est le premier Bordelais à mener l’administration des douanes lors du défilé militaire du 14 juillet.
«C’est un honneur certain. Une récompense, je ne sais pas ; car c’est du travail en plus», confie d’emblée Michaël, chef divisionnaire à la douane de Bordeaux-Mérignac. Le quadragénaire, qui affectionne d’ordinaire la discrétion, a été proposé et choisi par sa hiérarchie pour diriger le bataillon des douanes lors du prochain défilé militaire du 14 juillet. Il est le premier Bordelais à recevoir cet honneur. L’officier ne s’enorgueillit pas pour autant de ce privilège. Dans son regard luit simplement la flamme du devoir. «Il faut que ce soit parfait, que les bras se lèvent à la même hauteur et que le bataillon fasse corps avec harmonie. Moi, je ne suis personne. Mais je représenterai l’administration donc je me dois de faire la prestation la plus remarquable possible», indique ainsi celui qui a intégré l’institution en bas de l’échelle, en tant qu’agent de constatation en surveillance.
Malgré son humilité, Michaël s’apprête à inscrire son nom et les couleurs bordelaises dans l’histoire du défilé du 14 juillet, à la tête du 11e bataillon des douanes. Après un bref passage sur les Champs Élysées en 1919 à l’occasion des célébrations de la victoire, les douanes en ont été très longtemps les grandes oubliées. «La douane avait été mise à l’honneur car elle est postée à la frontière, ce qui impliquait une grande mobilisation et des fortes pertes durant la Première Guerre mondiale. Puis, elle n’a plus été invitée à défiler jusqu’en 2016. Ce sont les attentats de 2015 que nous avons tous vécus dans notre chair, qui ont conduit les hommes politiques à réaliser l’importance de notre administration pour la sécurité», explique Michaël. Et pour cause : dans une France où le libre-échange des marchandises et des personnes dominent en raison de l’espace Schengen, «le besoin de contrôle est encore plus fort», souligne l’officier.
Douaniers contre trafiquants
Méconnue, l’administration des douanes est pourtant toujours en première ligne pour protéger le territoire national. «Elle est au cœur des problématiques internationales à la différence des forces de sécurité intérieure qui agissent dans le quotidien des concitoyens», décrit Michaël. Ainsi, un douanier peut permettre de débusquer des réseaux de narcotrafiquants, de stopper des marchandises contaminées en cas de crise sanitaire ou encore de faire respecter des embargos décidés par les hommes politiques.
S’il refuse de partager les secrets qui ont rendu le flair du douanier légendaire, Michaël s’épanche volontiers sur la saisie spectaculaire des douaniers d’Arcachon, en décembre 2022. Plus d’une demi-tonne de cocaïne pure, soit 578 kilos de drogue qui aurait pu être recoupée au moins trois fois, a été confisquée à la faveur d’un contrôle de surveillance. Sans aucun autre renseignement que l’analyse des flux par les agents postés sur la voirie. «C’était impressionnant car au départ nous n’avions trouvé que 10 kilos de cocaïne grâce au travail du chien. Puis en dépouillant le camion, nous en sortions des bacs de 20 kilos. Nous avions le sentiment d’être utiles», se remémore le quadragénaire avec une euphorie contenue. L’autre souvenir marquant de sa carrière est plus nuancé. Il date de 2007, où un contrôle de 5 valises avec un double fond à l’aéroport de Roissy CDG lui avait permis de découvrir 20 kilos de cocaïne. Les bagages appartenaient à une famille avec deux enfants en bas âge. «Les parents ont été placés en garde à vue. J’ai été particulièrement marqué par la remise aux services sociaux des enfants, qui ne parlaient pas un mot de français», évoque Michaël. Avant d’observer : «Il y a la criminalité avec des gens durs, mais il y a aussi des passeurs qui agissent dans un contexte qui est difficile pour eux et pas toujours en raison de “vrais choix”.»
Humanité
Un regard empli d’humanité qui l’a conduit à être sélectionné pour mener ce 11e bataillon des douanes le 14 juillet. «Michaël est un douanier loyal et efficace, qui sait prendre des décisions difficiles et envisager les meilleures solutions. Il n’hésite jamais à aller au plus près de ses collaborateurs de terrain. Il sait leur dire les choses et les écouter. Il inspire le respect», nous indique ainsi son supérieur Stéphane Mage, directeur régional des douanes de Bordeaux. Et l’administrateur supérieur des douanes d’ajouter : «Diriger le bataillon douanier pour le défilé est un honneur et Michaël est un modèle. Il est promis à un bel avenir au sein de l’administration, même s’il va rougir de ces compliments.»
Sans superbe, Michaël se prépare à faire de son mieux avec une grande exigence car il sera seul pour donner la cadence aux 50 douaniers de France et Navarre qui lui emboîteront le pas. «En tant que chef, je me dois d’essayer de diriger le bataillon qui me suit par l’exemple», indique-t-il simplement. Son épouse, douanière également, est l’une des rares de son entourage à mesurer la reconnaissance qui lui est accordée. Leurs enfants, 7 et 9 ans, se réjouissent surtout de «voir papa à la télé». Reste au chef du 11e bataillon des douanes un mois de préparation avant d’incarner la devise originelle de son administration : «Honneur et dévouement».