© Julien Drach
Entre le vide et la mémoire
Ce que Victor Cadene compose, ce ne sont pas des scènes, mais des absences. Des objets morcelés, parfois antiques, parfois rêvés, des fragments qui évoquent ce qui n’est plus là. Il joue avec les manques, les vides, les silences. « Lors de la création, il n’imagine pas le reste du fragment. J’aime bien donner l’illusion qu’il y a eu un reste. Mais on voit que c’est quand même composé pour la pierre, pour sa forme. » Il ne s’agit pas ici de restaurer, ni de figurer. Il s’agit de suggérer, d’inviter à imaginer. Son imaginaire visuel puise dans l’Antiquité, bien sûr, mais aussi dans la Renaissance, le XIXe siècle, et le cinéma. Il cite notamment La Chimère (2023) d’Alice Rohrwacher parmi ses films favoris récents. On y retrouve cette atmosphère étrusque, ce même goût pour les objets trouvés, les récits fragmentaires, les formes perdues à réinventer.
© Julien Drach
Du dessin au mur, du livre à la galerie
La rigueur de Victor Cadene est celle d’un artisan : chaque forme est dessinée, colorisée, découpée au scalpel, assemblée avec patience. Rien n’est laissé au hasard, mais tout semble naturel. Ses couleurs, souvent sourdes, évoquent des pigments anciens. Ses formes flottent entre abstraction et archéologie fictive. Certaines pièces, créées in situ – pour une cheminée à Arles, un pan de château – prolongent cette logique d’intégration sensible dans l’espace. La pierre volcanique qu’il utilise, résistante à la chaleur, se prête aux usages les plus variés : table, baignoire, façade. En janvier dernier, un livre publié aux éditions In Fine est venu donner un nouvel écrin à ses œuvres. Illustré de poèmes d’Arthur Teboul (chanteur du groupe Feu! Chatterton) et introduit par Olivier Gabet (directeur du département des objets d’art du Louvre), l’ouvrage trace un portrait kaléidoscopique de son univers.