C’est la dernière mode liée à l’intelligence artificielle. Après la transformation de ses photos dans le style Ghibli avec ChatGPT, place aux « starter pack ». En résumé, des autoportraits « en style cartoon, présentés sous blister, à la manière d’un jouet de collection », grâce à l’IA.
Si les exemples fleurissent sur les réseaux sociaux, certains mettent en garde contre les conséquences de telles pratiques, comme Thomas Pesquet, le plus célèbre des astronautes français. « On m’a envoyé mon Starter Pack », commence-t-il, en partageant une photo, avant de mettre en garde. « Derrière la magie, il y a une réalité qu’on oublie souvent de regarder : le coût environnemental de ces technologies ».
« L’IA est un outil formidable… à condition de comprendre ce qu’elle mobilise en coulisses »
« Il ne s’agit pas de tout refuser en bloc, mais il est essentiel d’intégrer l’éducation à l’impact environnemental du numérique dans nos usages. L’IA est un outil formidable… à condition de comprendre ce qu’elle mobilise en coulisses », poursuit-il.
On m’a envoyé mon Starter Pack !
On a tous vu passer cette tendance marrante sur nos réseaux. Grâce à l’IA générative, on peut désormais créer en un clic une figurine à son effigie. C’est bluffant, et un peu grisant, il faut bien l’avouer.Mais derrière la magie ✨, il y a une… pic.twitter.com/ABbgvOrs83
— Thomas Pesquet (@Thom_astro) April 11, 2025
Thomas Pesquet n’est pas le seul à mettre en garde contre l’impact environnemental de l’IA, notamment pour des usages de ce style.
« Un gouffre énergétique insensé »
La secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier a par exemple annoncé qu’elle ne publiera pas de « Starter pack » ni de photos dans le style Ghibli, ne cédant pas à la mode du moment sur les réseaux sociaux.
Je ne ferai pas de starter pack.
Ni de dessins copiant Ghibli sans l’autorisation de Miyazaki.
Ces images générées par IA sont irrespectueuses pour des artistes déjà précaires.
Et c’est un gouffre énergétique insensé.
Je préfère qu’il reste de l’eau et de l’art à nos enfants.
— Marine Tondelier (@marinetondelier) April 11, 2025
« Ces images générées par IA sont irrespectueuses pour des artistes déjà précaires. Et c’est un gouffre énergétique insensé. Je préfère qu’il reste de l’eau et de l’art à nos enfants », écrit-elle sur X.
L’IA consomme de l’électricité, dont la production pollue plus ou moins
Pour générer une image, interagir avec une IA, il faut solliciter des serveurs, qui tournent 24 heures sur 24 et consomment donc de l’électricité. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime qu’un seul serveur consomme parfois autant d’énergie qu’une maison habitée par un foyer moyen.
L’émission de CO2 dépend alors de l’origine de l’énergie. Si l’électricité utilisée par les serveurs est par exemple produite à l’aide de charbon, son CO2 émis sera élevé, au contraire, s’il s’agit d’une énergie verte comme avec une éolienne, alors le CO2 émis par la requête IA sera faible.
D’importants prélèvements en eau
Mais il faut aussi de l’eau, beaucoup d’eau pour faire fonctionner ces centres de données, essentiellement pour les refroidir. Plus les requêtes sont nombreuses, plus les serveurs chauffent, d’ailleurs, OpenAI a récemment été victime d’une surchauffe.
Pour les éviter, de l’eau froide circule via des échangeurs de chaleur placés à proximité des serveurs. Selon certaines étude, une question posée à l’IA consomme un demi-litre d’eau. D’autres études estiment que la création d’une image, bien plus gourmande en puissance de calcul, nécessite entre 1,8 et 12 litres d’eau pour refroidir les systèmes informatiques.
Vers une consommation d’eau par l’IA équivalent à la moitié de celle du Royaume-Uni
Selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese), développer et entraîner ChatGPT-3 ont demandé 700 000 litres d’eau. Le géant de l’informatique Microsoft a augmenté de 34 % ses prélèvements d’eau dans le monde entre 2021 et 2022. À ce rythme, l’OCDE estime que l’IA pourrait consommer 4,2 à 6,6 milliards de mètres cubes d’eau en 2027, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 4 à 6 fois celle du Danemark ou de la moitié du Royaume-Uni.
De quoi créer des tensions dans certaines régions du globe où la sécheresse fait rage. À Talavera de la Reina, en Espagne, un centre de données de Meta devrait voir le jour dans les prochaines années.
Des tensions dans les zones touchées par la sécheresse
Pour refroidir ses systèmes informatiques, Meta prévoit de prélever 600 millions de litres d’eau chaque année, en majorité dans le Tage, et de prendre le reste dans le réseau d’eau potable de la ville. Un projet qui suscite une vive opposition dans une région souvent touchée par la sécheresse, rapporte Le Monde.
L’empreinte environnementale du numérique, englobant à la fois les « data centers » et les appareils connectés, représente entre 3 et 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et 2,5 % en France. Ces émissions pourraient augmenter de 60 % d’ici à 2040 selon une étude conjointe de l’ADEME et de l’ARCEP réalisée en 2022.
Une hausse de 67% d’ici 2035 des émissions de CO2 liées à la consommation électrique
Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande mondiale en électricité pour les centres de données, dopée par l’IA, devrait plus que doubler d’ici à 2030.
L’AIE poursuit en notant que la course aux centres de données fera grimper de 67% d’ici 2035 les émissions de CO2 liées à la consommation électrique.