Sa connaissance des plantes et la sensibilité de son odorat n’ont sûrement que peu d’égaux sur la planète bleue. À 40 ans, le Toulonnais Jérémy Tamen a écumé les plantations à travers le monde entier, de la Chine au Pérou en passant par le Kenya, la Réunion ou le Vietnam, à la rencontre des différentes communautés travaillant la feuille de thé.
Sa compétence est largement reconnue. Des conférences données à travers le monde ainsi que ses collaborations avec des parfumeurs et des établissements prestigieux – comme le luxueux hôtel Ritz à Paris – en attestent. Plusieurs gouvernements ont même déjà fait appel à ses services, toujours pour des questions ayant trait à son domaine d’expertise.
« Derrière l’eau, le thé reste la deuxième boisson la plus bue au monde, rappelle Jérémy. Il s’agit également de l’une des cultures les plus importantes avec le blé ou le riz. Une culture qui fait vivre énormément de communautés à l’international, même dans des pays où on ne l’imagine pas. »
« Je ne pensais pas qu’on pouvait en faire un métier »
À l’origine, c’est pourtant bien sur une terre où la mode est davantage au café que le Varois s’est pris de passion pour la boisson aromatique. Issue d’une famille « très consommatrice d’infusions », il a goûté à la potion magique dès l’école primaire. C’était du côté de la Rivière Neuve, à Toulon, dans le jardin d’une grand-mère. Et avec une camarade de classe… dénommée Fleur. Forcément!
« Le sachet jaune n’était pas extraordinaire, se remémore l’intéressé, les yeux rieurs. Plus tard, j’ai acheté ma première boîte de thé à l’âge de 17 ans, avec mon argent de poche. C’est là que je suis tombé amoureux du produit. Mais je ne pensais pas qu’on pouvait en faire un métier. » Aussi, il lui faudra passer plusieurs années dans la protection civile et dans des études en sciences de l’éducation avant de revenir à ses premières amours.
Un cursus en biologie végétale et un autre en ethnobotanique plus tard, le voilà prêt à arpenter les champs de thé pour étudier et transmettre aussi bien des techniques que des histoires. « Mon travail consiste en partie à recenser et préserver les usages traditionnels, même si les communautés veulent industrialiser leur process. Le thé, c’est plus de 5.000 ans d’histoire « , explique celui qui enseigne également à l’école supérieure du parfum, et vit aujourd’hui entre Toulon et Paris.
« Une vision à 360 degrés »
La deuxième dimension de son métier, elle, est plutôt liée à l’industrie du parfum: « Je vais chercher les matières premières qui vont permettre de composer le produit final, pour de grandes sociétés basées à Grasse et Paris. […] En gros, j’ai une vision à 360 degrés du thé. On peut parler de culture, de traditions, d’agriculture ou d’économie, avec des connexions avec plein de métiers différents. Et, à l’Unesco (1), je suis le seul à faire ça. »
Ce vendredi 20 juin, c’est ainsi dans sa qualité d’expert et ambassadeur du thé pour le compte de l’Unesco, qu’il reçoit de la part de l’organe de l’ONU, dans la capitale française, une distinction d’honneur pour la sauvegarde et la transmission du patrimoine immatériel du thé.
Preuve, s’il en fallait une de plus, qu’il a parcouru bien du chemin, ce minot au sachet jaune.
1. L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.