On nous rabâche qu’il faut marcher 10 000 pas par jour pour rester en bonne santé. Mais selon Christian Daulouède, ancien médecin du sport à Bordeaux, ce chiffre ne repose sur aucune base scientifique sérieuse. Plus que la quantité, c’est l’intensité de la marche qui compte. Voici ce qu’il faut vraiment savoir.
Depuis plusieurs années, les applications de santé sur smartphones et les montres connectées ont popularisé une règle soi-disant universelle : marcher 10 000 pas par jour serait la clé d’une bonne santé. Un objectif simple, rassurant, qui donne l’impression d’agir pour son bien-être. Et pourtant, cette règle est largement remise en question par certains professionnels de santé. Le docteur Christian Daulouède, ancien médecin du sport à Bordeaux, affirme même que cette obsession pour le nombre de pas est un leurre. Selon lui, ce chiffre n’a rien de médicalement fondé et provient d’une étude marketing des années 60, destinée à vendre des podomètres au Japon.
« Au fil des années, et plus encore ces cinq dernières années, on a repris cette pseudo-règle des 10 000 pas, pour vendre des applications sur nos téléphones et des podomètres sur des montres connectées : on appelle ça, en santé, un effet “‘gold” », s’agace-t-il. L’Organisation mondiale de la santé a, depuis, repris ce chiffre sans en interroger les fondements. Or, marcher 10 000 pas, soit environ 7 kilomètres ou 1 h 30 de marche, peut sembler bénéfique, mais ne l’est réellement que dans certaines conditions. « Ce n’est pas tant le nombre de pas qui compte que la façon dont on les fait », insiste le médecin.
10 000 pas par jour : une norme sans fondement scientifique
Une balade tranquille avec son chien n’aura pas les mêmes effets sur la santé cardiovasculaire qu’une marche rapide avec variations d’intensité. Cette nuance échappe à beaucoup, et alimente une fausse impression d’activité physique suffisante. Christian Daulouède ne mâche pas ses mots : « 10 000 pas par jour ? Autant dire cueillir des marguerites… » clame-t-il. Et il n’est pas le seul à le penser. En 2021, une étude américaine relayée par Consumer Reports estimait que les effets positifs sur la santé (réduction du cholestérol, de la tension artérielle, de la glycémie) ne deviennent significatifs qu’à partir de 15 000 pas par jour. Et encore, à condition que ces pas soient effectués à un rythme soutenu.
Le docteur ironise : « 10 000 pas sans canne en marche rapide pour monter la Rhune au Pays basque, ça n’a rien à voir avec 10 000 pas, même sans canne, pour promener Mirza… » Car tout l’enjeu est là : activer son rythme cardiaque, transpirer, engager ses muscles. Marcher sans effort revient à une activité de maintien, bénéfique pour l’esprit, mais insuffisante pour le corps. Nietzsche, Kierkegaard ou Aristote ont tous vanté les vertus philosophiques de la marche, mais la santé physique exige davantage de stimulation. D’où l’importance de revoir ses objectifs et, surtout, ses pratiques.
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La marche rapide, un remède scientifiquement validé
Plutôt que de viser un chiffre arbitraire, mieux vaut se concentrer sur la qualité de la marche. « Si on veut améliorer notre santé et notre condition physique, perdre du poids, mieux vaut abandonner le rythme du promeneur du dimanche pour lui préférer le pas du chasseur », conseille le médecin, c’est-à-dire de façon dynamique, en variant les terrains, les vitesses, les dénivelés. Ce type de marche favorise la combustion des graisses, améliore le fonctionnement du cœur et stimule les articulations. « Le rythme cardiaque doit évoluer, et là, oui, on sait que le taux de cholestérol va baisser, que le cœur sera stimulé, les articulations, les muscles. Celui qui marche vite en randonnée, d’un pas soutenu, améliore sa santé » explique-t-il. Et la bonne nouvelle, c’est que ce type d’exercice peut se pratiquer sans équipement spécifique ni abonnement en salle.
Outre les effets cardio-respiratoires, la marche rapide a des vertus démontrées contre certaines pathologies. Par exemple, elle ralentit la progression de la maladie d’Alzheimer et soulage l’arthrose. Le cartilage, précise le médecin, se nourrit du liquide synovial qui est activé par le mouvement. Autrement dit, pour garder ses articulations en bon état, il ne faut pas s’économiser, mais continuer à bouger. En revanche, la marche nordique, très populaire chez les seniors, ne trouve pas grâce à ses yeux. « Elle n’a pas d’intérêt supplémentaire », tranche-t-il.