Mahmoud Khalil, figure emblématique des mobilisations étudiantes contre la guerre à Gaza sur le campus de l’université Columbia, a recouvré la liberté vendredi sur décision du juge fédéral Michael Farbiarz, après 104 jours de détention dans un centre pour migrants en Louisiane. Arrêté à New York le 8 mars par les services de l’immigration (ICE), ce résident permanent américain né en Syrie de parents palestiniens avait été transféré à près de 2.000 kilomètres, en vue d’une expulsion contestée.
L’affaire Khalil, devenue hautement politique, cristallise la volonté du président Donald Trump de réprimer un mouvement étudiant qu’il juge hostile à Israël et dangereux pour la sécurité nationale. Après son arrestation, le secrétaire d’Etat Marco Rubio avait affirmé que sa présence sur le territoire américain pouvait entraîner « des conséquences sérieuses pour la politique étrangère » du pays. Mais pour le juge Michael Farbiarz, ce motif ne pouvait justifier une détention prolongée.
Déplacements limités et plus de passeport
Le ministère de la Justice avait tenté de maintenir l’incarcération en évoquant une autre base légale, sans plus de succès. Vendredi, le juge a tranché : Mahmoud Khalil devait être libéré le jour même, sous certaines conditions. Le Département de la Sécurité intérieure (DHS) a immédiatement fustigé cette décision sur X, accusant « le pouvoir judiciaire de miner la sécurité nationale ».
Selon les termes de sa libération, Mahmoud Khalil devra remettre son passeport aux autorités, se voir restituer sa carte verte (visa de résident permanent), et restera confiné à quelques Etats, dont New York et le Michigan, où réside sa famille. Il ne pourra quitter le territoire américain, sauf s’il entame une procédure d’auto-expulsion.
Soulagement de ses proches
Du côté de ses proches, le soulagement est palpable. « Après plus de trois mois, nous pouvons enfin pousser un soupir de soulagement », a réagi son épouse, Mme Abdalla, après avoir donné naissance à leur fils Deen pendant l’incarcération de Mahmoud Khalil. Elle accuse l’administration Trump de chercher à « réduire au silence ceux qui dénoncent le génocide israélien à l’encontre des Palestiniens ».
Notre dossier sur les Etats-Unis
Pour Elora Mukherjee, professeure de droit à Columbia, cette affaire illustre une dérive inquiétante. « Il s’agit d’une victoire, mais il n’aurait jamais dû être arrêté en premier lieu », a-t-elle déclaré à l’AFP. Elle souligne que le fondement juridique utilisé pour incarcérer Mahmoud Khalil n’a, selon ses recherches, « jamais été appliqué à un résident permanent auparavant ».