Il fait chaud partout en France. Normal, me direz-vous, c’est l’été. Même en Bretagne ? Oui, il fait chaud, même en Bretagne. Peu habituée aux chaleurs torrides, la région voit, sous l’effet du réchauffement climatique, son mercure grimper de plus en plus haut et de plus en plus souvent. Pour autant, les quelque trois millions d’habitants de la région ne semblent pas prendre conscience du danger auxquels ils s’exposent.
Les données des autorités de santé sont pourtant formelles : la Bretagne est la région de France qui enregistre le plus grand nombre de cas de cancers de la peau chaque année. En 2014, 1.305 cas de mélanomes avaient été recensés dans la région, soit un chiffre trois fois supérieur à la moyenne nationale. Depuis dix ans, la tendance n’a pas vraiment évolué. « En Bretagne, se couvrir ne compte pas pour du beurre », martèle la Ligue contre le cancer dans une nouvelle campagne de promotion. On fait le point.
Pourquoi la Bretagne est-elle si touchée ?
« Les médecins sont assez d’accord pour dire que les Bretons n’ont pas conscience de leur exposition ». Patrick Bourguet est le président de la Ligue contre le cancer d’Ille-et-Vilaine. Ce professeur de médecine nucléaire a longtemps dirigé le centre de lutte contre le cancer Eugène Marquis de Rennes. Pendant des années, il a pu constater les ravages du soleil sur la peau des habitants de sa région. « Dans le Sud, les gens sont habitués, ils se protègent, ne s’exposent pas aux heures les plus chaudes. Mais en Bretagne, le taux d’ensoleillement est moindre et la chaleur est moins pesante. Les gens font moins attention, ne se rendent pas compte qu’il faut se protéger même quand il y a des nuages », poursuit l’ancien médecin. La problématique est d’ailleurs sensiblement la même en Normandie.
Y a-t-il des publics particulièrement à risque ?
Les personnes ayant une peau claire ou les personnes rousses ont clairement plus de risque de « brûler » leur peau, plus fragile. Les origines celtes des Bretons peuvent-elles expliquer cette problématique ? « Le patrimoine génétique peut jouer car les peaux n’ont pas toutes la même sensibilité. Mais la Bretagne est aujourd’hui tellement mélangée que ça me paraît difficile d’en faire une vérité », assure Patrick Bourguet.
A entendre le professeur, ce sont surtout les enfants et adolescents qu’il faut protéger des rayons. « Il n’y a pas d’âge pour développer un mélanome. Il y a des gamins qui peuvent développer une lésion cutanée à 12 ou 13 ans. Ce qu’il faut savoir, c’est que chacun d’entre nous a un capital soleil qu’il doit gérer tout au long de sa vie ».
Certaines professions particulièrement représentées en Bretagne sont notamment exposées. Les agriculteurs, les pêcheurs ou encore les personnes travaillant dans les espaces verts ou la construction voient leur peau malmenée par les rayons.
D’après les médecins, il reste une forme de « masculinisme » face au soleil. « Il arrive souvent de voir la maman se crémer, crémer ses enfants. Mais monsieur, il n’en met pas ». Un conseil ? « Dans ce cas-là, couvrez-vous. On n’est pas moins sensible quand on est bronzé. C’est juste qu’on brûle moins ».
Que faire pour bien se protéger ?
« Le mieux, c’est de se protéger avec un vêtement. Il est important aussi de se couvrir d’un chapeau ou d’une casquette et de lunettes de soleil. Nos yeux aussi souffrent des rayons du soleil, il convient de les protéger », assure Patrick Bourguet. Il est conseillé de se mettre à l’ombre et d’éviter de s’exposer entre midi et 16 heures. La crème solaire est importante mais elle ne remplacera jamais un textile. Elle doit être appliquée régulièrement et présenter un indice élevé (50, c’est bien). Selon l’Organisation mondiale de la santé, quatre cancers de la peau sur cinq seraient évitables si les bons gestes étaient appliqués.
En cas de doute sur une tache sur la peau, un grain de beauté qui noircit, grossit ou évolue, il est préférable de demander un avis à son médecin. « La première étape, c’est de s’observer, de regarder son corps ».