Par

Anaelle Montagne

Publié le

21 juin 2025 à 6h56

Elle est partie avec son sac à dos et sa banane, laissant derrière elle ses papiers d’identité et toutes ses affaires personnelles. Odile Chantrelle-Vincent, une mère de famille de Bruges (dans la métropole de Bordeaux), a disparu le 10 avril 2025. Deux mois ont passé mais son compagnon Éric et sa fille Clara restent sans la moindre nouvelle. « C’est incompréhensible. Comment aurait-elle pu laisser Clara ? Elle était toute sa vie », lâche Éric, le teint blafard. Comptable de profession, Odile partage sa vie depuis 16 ans. « On ne s’engueulait pas, on n’avait pas de gros problèmes », assure-t-il.

Certes, son quotidien pouvait être stressant : elle est la tutrice légale de son frère handicapé et s’occupait régulièrement de sa mère malade. Mais selon Éric, « il n’y avait rien d’alarmant ». Le couple avait d’ailleurs pris une semaine de congés, qui devait débuter prochainement. Et puis tout a basculé.

Les clefs dans la boîte aux lettres

Rongé par l’inquiétude, Éric ne cesse de se refaire le film des derniers instants où elle a été vue vivante. La veille de la disparition, il rentre d’un dîner à 22h30. La lumière de la chambre d’Odile est éteinte – le couple fait chambre à part – alors il se dit qu’elle doit dormir. Il ne la croise pas le lendemain matin non plus mais ne s’en inquiète pas.

En déplacement toute la journée du 10 avril, Éric rentre en fin d’après-midi et vérifie la boîte aux lettres, machinalement. Les clefs de sa compagne sont posées à l’intérieur.

Surpris, il lui téléphone. Pas de réponse. Il monte à l’appartement, elle n’y est pas. Nouveau coup de fil… Il entend la sonnerie et finit par trouver le portable dans la chambre. À côté se trouve le portefeuille d’Odile, avec tous ses papiers et sa carte bleue. « Là, j’ai compris qu’il y avait un problème. »

« La panique totale »

Paniqué, le Girondin contacte les collègues de sa compagne, mais personne n’a eu de nouvelles d’elle. Contactée, la police envoie rapidement une brigade au domicile du couple. L’appartement est fouillé, des chiens tentent de pister l’odeur d’Odile… Rien. Elle n’est pas non plus chez sa mère, malade, chez qui elle dort au moins une fois par semaine.

C’est la panique totale. On ne comprend pas, toutes les théories nous traversent l’esprit.

Éric
Mari d’Odile

Trois jours passent, rien n’avance. Un appel à témoins est lancé, mais aucun signe d’Odile. Et puis Éric rencontre une enquêtrice et réalise le travail de fond qui vient d’être mené. « Ils ont tout fouillé : téléphone, ordinateur, messageries, emploi du temps… » Sans oublier le bornage de la carte TBM d’Odile et les images de vidéosurveillance de la résidence. Ces efforts permettent de tracer son itinéraire les 9 et 10 avril.

Itinéraire d’une disparition

La veille de la disparition, Odile finit de travailler tard pour boucler un dossier qu’elle ne doit pourtant rendre que la semaine suivante. Les caméras de surveillance la filment quitter la résidence à 22h15, soit un quart d’heure avant qu’Éric ne rentre de son dîner. Elle ne dormira pas à l’appartement, contrairement à ce qu’il croyait.

Le 10 avril au matin, la mère de famille prend le tram à l’arrêt Courbet, non loin de chez sa mère. Cette dernière n’est pas en capacité de confirmer si elle a dormi chez elle. 

À 8h40, Odile entre dans l’appartement, puis repart à 10h50. « La seule chose qu’on sait, c’est qu’elle a utilisé son pass TBM à Porte de Bourgogne, un endroit où on ne va jamais », explique son conjoint. Ensuite, elle retourne à son domicile, vérifie la boîte aux lettres en passant et monte à l’appartement. « Là, je pense qu’elle voit arriver le facteur depuis le balcon, et elle redescend immédiatement. »

Dès que le postier part, elle se précipite à la boîte aux lettres et y récupère quelque chose. Qu’y avait-il à l’intérieur ? Cette question continue de hanter Éric. Car vers 14 heures, après être remontée une dernière fois, sa compagne quitte le domicile avec son sac à dos Little Marcel et sa banane. Son pass TBM bornera à 22h30 à l’Hippodrome. Ce sont les derniers signes de vie d’Odile.

1 200 euros en liquide

« Tous ces éléments indiquent qu’elle est partie de son plein gré, confirme Éric. Mais il y a trop d’incohérences. »

Il bloque notamment sur un élément : Odile a laissé 1 200 euros en liquide, dans son portefeuille resté à l’appartement. Elle faisait régulièrement la comptabilité d’un proche à elle, qui la payait en liquide, ce qui peut expliquer qu’elle possède une telle somme.

Ce qu’Éric ne comprend pas, c’est qu’elle n’ait pas emporté cet argent avec elle. « Ça lui aurait permis de s’en sortir sans carte bleue, sans ses papiers », insiste-t-il. Depuis le 10 avril, il n’y a eu aucun mouvement sur ses comptes, qui n’ont pas été vidés au préalable. 

« Si tu as envie de rentrer, tu es attendue »

Il craint que sa conjointe ne soit dans la rue, en danger. « On pense à tout. À une secte, un départ pour une retraite quelque part… et même au suicide. Mais pourquoi serait-elle partie avec son sac et sa banane dans ce cas ? », souffle Éric. Il lui paraît impossible qu’elle choisisse d’abandonner sa fille : « Je le répète, c’était toute sa vie. »

Aujourd’hui, Éric et Clara espèrent que leur message parviendra aux oreilles d’Odile. « On veut lui dire : si tu as envie de rentrer, tu es attendue. Si tu as des soucis, on les règlera ensemble. Et si tu ne veux pas rentrer, on peut le comprendre, mais dis-nous que tu vas bien. Ça nous rend malades de ne pas savoir. » 

Le 20 mai, un mois après la disparition, Clara a fêté ses 20 ans. « On espérait un signe, un message, mais il n’y a rien eu », déplore Éric. 

L’enquête continue pour tenter de retrouver Odile. Si vous pensez l’avoir vue, contactez le service enquêteur au 05.57.85.70.03 ou 06.79.69.82.21.

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