Il y a autour de la table, installée au siège de l’université d’Aix-Marseille (AMU), au Pharo, des Américains et des Palestiniens, une Ukrainienne, un Syrien, un Afghan. Tous sont en guerre, mais dans le même camp. Et leur combat est celui de la pensée libre. « Nos situations, à nous Américains, ne sont pas les mêmes que nos confrères qui ont énormément souffert », nuance Molly Dondero.

Cette professeure de sociologie de Washington a vu soudainement ses crédits coupés, ses recherches sur les inégalités des politiques de santé effacées. « Mon travail d’analyse statistique a été bloqué, les données retirées d’internet », précise-t-elle. Mais tout près d’elle, Abdalatif Abuashem, arrivé au mois d’avril de Gaza, ne fait pas de différence. « Je suis un modeste messager des nombreux scientifiques, dit-il. Pour moi comme pour les autres, ce sont des rêves, des cultures, des énergies que l’on détruit. »

Plus de 500 candidatures en trois mois

Depuis 2017, l’université Aix-Marseille a accueilli 22 scientifiques syriens, afghans ou palestiniens dans le cadre du programme national « Pause » destiné aux chercheurs en exil. En mars 2025, elle s’est tournée en parallèle vers les États-Unis, où l’administration Trump balaie de nombreuses unités de recherche. Les sciences sociales et la recherche sur le dérèglement climatique sont particulièrement visées. « Jusqu’à peu, les scientifiques fuyaient les pays en guerre. Maintenant, on considère qu’ils dérangent certains récits nationaux, y compris dans les démocraties, résume Éric Berton, président d’AMU.