Ils n’ont pas vraiment envie d’exposer leur université d’origine, hésitent à être photographiés, pensent à leurs amis scientifiques restés aux États-Unis. « J’ai de la chance, mais des collègues n’ont plus de travail pour avoir exprimé leur liberté de parole », souffle Molly Dondero. Avec Gisela Winckler et Eliott Hazen, cette professeure de sociologie à Washington offre le visage d’une rescapée. L’administration Trump ne lui a laissé ni le choix, ni le temps de souffler. « Ma subvention de recherche a été supprimée. Mon travail d’analyse statistique a été bloqué, les données retirées d’internet », souffle la trentenaire qui a le « malheur » de s’intéresser aux inégalités dans les politiques de santé outre-Atlantique, notamment chez les immigrants. « Cela faisait un an que j’étais à Marseille pour croiser mes recherches en Europe, dans une liberté académique totale. Mais les attaques très graves contre les scientifiques aux USA, dans de nombreux domaines, ont eu raison de mes travaux sur les inégalités. »
« Il fallait préserver le coeur de ma science »
Ses camarades d’infortune se savaient eux aussi dans le viseur de la doctrine « Maga » et de son cortège complotiste. Chercheuse en climatologie et océanographie à l’université de New York, Gisela Winckler surveillait l’impact du dérèglement climatique sur les sédiments et les coraux.