« Deux hommes morts, une femme grièvement blessée ». Ces quelques mots en entame de l’article publié au matin du lundi 24 juin 1985 résument le drame qui s’est noué, la veille, au pied d’un immeuble de La Talaudière. Une folie meurtrière qui a coûté la vie à deux frères originaires de Génilac.

L’affaire débute le samedi soir, dans une pizzeria de Saint-Étienne. Les deux victimes, Bernard et Gilbert V., ont décidé de s’offrir une sortie. Leur table cohabite avec celle de deux jeunes filles, deux amies et voisines qui habitent, quant à elle, à La Talaudière. La discussion s’engage entre les deux tablées. L’ambiance est conviviale et les quatre convives décident de prolonger la soirée ensemble en se rendant dans un club de la rue Honoré-de-Balzac.

C’est là que la soirée prend un tournant, par un incident totalement anodin en apparence. Dans l’établissement de nuit, les deux amies rencontrent un autre de leur voisin : Jean-Luc V., 27 ans, préposé au PTT. Aviné, il vient quémander une danse et se fait rabrouer. L’histoire en reste là et le danseur éconduit décide de quitter le bar.

Six coups de feu, deux morts

La suite s’écrit à 4h40, au pied de l’immeuble des deux amies, rue Florent-Evrard à La Talaudière. Elles ont été raccompagnées chez elles par les deux frères et tous les quatre discutent au pied de l’immeuble. « Soudain, ils virent en face d’eux Jean-Luc V. Celui-ci tenait une arme à la main : un fusil de chasse à canons superposés de calibre 16. Il ne dit pas un mot. Il mit seulement en joue les quatre personnes et tira à six reprises », détaille notre journaliste Christine Navarro dans La Tribune – Le Progrès du lundi 24 juin 1995.

Pour une danse refusée, Jean-Luc V. vient de devenir un meurtrier. Ses tirs ont atteint mortellement les deux frères, âgés de 25 et 28 ans. Une des deux voisines, âgée de 34 ans, est également atteinte d’un projectile en plein visage et est grièvement blessée.

La nuit de fête vient de se transformer en bain de sang. A Génilac et à Chateauneuf où ils étaient tous les deux licenciés du club de foot, l’annonce du décès des frères V. jette un vent de consternation.

« J’ai fait une grosse bêtise, j’ai tué des gens »

Lorsque les secours arrivent sur place, le tireur s’est déjà enfui. On retrouve sa trace quelques instants plus tard à l’hôpital de Bellevue où son épouse est hospitalisée après un grave accident de la route. Après avoir forcé l’entrée et mis en joue une aide-soignante, le tireur se confie à sa femme : « J’ai fait une grosse bêtise. J’ai tué des gens. La police est après moi. Ou bien je me flingue, ou bien je me rends ».

Le tireur parvient à s’enfuir à nouveau avant que l’hôpital ne soit cerné. Le signalement de sa Renault R18 vert olive est diffusé dans tous les commissariats et dans toutes les gendarmeries de la Loire. Des surveillances sont aussi mises en place sur le plateau ardéchois d’où est originaire la famille du tireur, lequel est susceptible de disposer encore d’une dizaine de cartouches dans son fusil.

Pour une fâcherie

Finalement, la chasse à l’homme prend fin le dimanche 23 juin 1985 vers 12h30 : le fugitif se rend aux policiers qui surveillent encore l’entrée de l’hôpital. Autorisé à échanger à nouveau avec son épouse, il est ensuite placé en garde à vue puis écroué. « Au cours de son audition, il a expliqué qu’il avait beaucoup bu ce soir là, et qu’il avait le vin mauvais. Il n’a pas supporté d’être éconduit ».

Deux morts, un blessé grave… pour une fâcherie.