Je suis un Couteau Suisse! Voilà comment Séverine Belcio décrit sa fonction de secrétaire générale de mairie à Séranon, village de 550 âmes du haut pays grassois.

« Assurer l’accueil téléphonique et physique, gérer naissances, décès, mariages, achats, arrêts maladie du personnel, demandes de permis de construire, d’infos sur des parcelles cadastrées, préparer les conseils municipaux, s’occuper de la paperasse pour les marchés publics, les demandes de subventions. »

C’est l’inventaire à la Prévert – non exhaustif! – que dresse la quinquagénaire pour détailler ses missions, assurées à mi-temps avec un poste à la ville de Grasse.

Presque un sacerdoce… En tout cas, un métier « pas dénué de complexité », euphémise celle qui se souvient encore « des heures passées » sur un dossier, épais comme une thèse, à ficeler pour décrocher des fonds européens, pour un projet de via ferrata… Pour s’aguerrir face aux difficultés, parfois kafkaïennes, de l’administration, l’Azuréenne à l’emploi du temps déjà bien rempli est retournée sur les bancs de l’université.

Comme 14 de ses homologues (de Cantaron, Bendejun, Beuil, Toudon ou encore Roquesteron), elle fait partie de la première promotion de la Certification des secrétaires généraux de mairie, lancée en octobre 2024 au sein de l’IUT de l’Université Côte d’Azur (UCA). Ce jeudi, l’heure était à la remise de diplôme, sous les applaudissements.

Financé par le Conseil départemental (37.000 euros pour la 1er promo) et créé avec le concours de partenaires locaux (1), ce module, revendiqué comme pionnier en France, veut endiguer deux constats: le besoin de renforcer les compétences de ces employés polyvalents… et celui de créer d’urgence des vocations.

« En 2023, près de 2000 postes de secrétaires de mairie étaient vacants en France. Dans le département, 15 partiront à la retraite d’ici 2 ans, 25 d’ici 2030. Or, le binôme qu’ils forment avec les maires est vital! », souligne Alexandra Borchio Fontimp, sénatrice et élue départementale à l’origine de cette formation.

Des notions et de la confiance

Finances, droit, règlement général de protection des données (RGPD), ressources humaines… Pendant 6 mois, les étudiants ont consacré 7h30/semaine à bachoter. « Un engagement pour le service public », dixit Jeanick Brisswalter, président de l’UCA. Qui plus est en ruralité, abonde Charles Ange Ginésy, président du Conseil départemental, ancré dans les vallées.

« Il y a dans ces territoires un constat cruel: un exode rural, concomitant à la perte de ces postes de secrétaires si précieux. Et des lois qui ont, au fil du temps, enlevé des compétences à ces maires et complexifié les démarches. À cela s’ajoute la révolution du numérique… Résultat: des élus souvent bien seuls que nous voulons aider », abonde-t-il.

D’ici juillet 2025, 14 autres secrétaires seront diplômés, avant une 3e promo en septembre pour laquelle l’appel à candidature est ouvert (2). À 20 ans, Anaïs Rossini, certif en poche, se sent plus armée pour sa mission à la mairie de Sigale, dans l’Estéron.

Poste qu’elle occupe depuis l’obtention de son Bac.

« Je suis d’Aiglun et très attachée à mon coin. C’était une belle opportunité », dit-elle. Désormais en lien avec ses camarades de promo via un groupe WhatsApp, elle goûte « la force du collectif », en plus des notions apprises en cours.

« Des collègues m’ont aidé sur des questions d’état civil ou de marchés publics. C’est super cette entraide! », lance celle à qui le diplôme a « donné confiance ». L’étape d’après? « Revaloriser notre statut… », soumet la jeune fille, qui gagne 1.200 euros par mois pour 30 heures de travail, intense.

1. Association des maires du 06, Agence 06, Direction départementale des finances publiques et SICTIAM.

2. Infos sur Univ-cotedazur.fr, onglet « Formations courtes ».