Quelle est la prochaine carte d’excellence française en imagerie satellite ? Elle s’appelle CO3D et devrait décoller au cours de l’été. Les quatre satellites d’Airbus Defence & Space vont prendre la relève des fameux Pléiades. Ces nouveaux satellites sont précieux. On vous explique pourquoi dans ce reportage Futura.
Toulouse, site du Palays d’Airbus Defence & Space. Ici, c’est un des cœurs battants de la capitale européenne de l’espace, l’autre ventriculeventricule se trouve juste à côté, c’est le centre technique du Cnes, notre agence spatiale française. Ensemble, le Cnes et Airbus DS ont créé les satellites Pléiades, dont les images très précises sont précieuses pour les agences publiques, la défense, l’économie, et aussi la gestion des catastrophes naturellescatastrophes naturelles comme dernièrement avec l’effondrementeffondrement d’un glacierglacier en Suisse.
Mis en orbite en 2011 et 2012, les satellites Pléiades ont succédé au légendaire programme Spot du Cnes. Leur succession est assurée en 2021 par deux Pléiades Neo avec une meilleure résolutionrésolution. Mais l’avenir, c’est désormais CO3D, également créé en symbiose avec le Cnes. Le décollage est prévu au cours de l’été avec le satellite du Cnes Microcarb.
Un jumeau numérique de la Terre
L’ambition de CO3D (Constellation optique en 3D) est hors normes :
- 6 700 images par jour ;
- une couverture d’une surface de 1 million de km² par jour ;
- 123 millions de km² de surface couverte au total, soit quatre fois l’Afrique ;
- 6 000 téraoctets de données (soit 1 million de DVDDVD) ;
- un point de vue multiple pour restituer la surface terrestre en 3D ;
- une résolution de 50 cm à 1 m par taille du pixelpixel, et 2 m en hauteur.
L’objectif principal des quatre satellites CO3D est de reconstituer un jumeau numérique de la surface terrestre en 3D. Cela devra être fait en moins de trois ans. Ensuite, ce jumeau numériquejumeau numérique devra être mis à jour en continu.
La résolution spatiale (un pixel de 50 cm de côté) est en dessous des performances de Pléiades Neo (30 cm) et des autres satellites d’imagerie commerciaux qu’on peut trouver dans le monde. Cette dégradation est volontaire car le but ici est avant tout d’assurer une meilleure revisite des zones survolées. Ce compromis installe donc CO3D comme un complément intelligent à Pléiades Neo. L’autre compromis est dans la couverture de la surface, qui en réalité se restreint aux latitudeslatitudes entre -60° Sud et 70° Nord, ce qui exclut les régions polaires car leur éclairement est plus dégradé au fil des saisonssaisons. Cette couverture sera riche en informations pour la défense nationale.
Satellites diaboliques
Quand on découvre les satellites en salle blanche, ils paraissent petits (250 kilos) en comparaison des dimensions des locaux qui ont hébergé à la fois l’intégration de missions spatiales légendaires comme Gaia de l’ESA, mais aussi les premiers satellites internetinternet OneWebOneWeb. Les satellites CO3D ont été redimensionnés pour pouvoir héberger le télescope qui prendra les images. Ils sont donc un peu plus grands que les OneWeb.
Les satellites CO3D sont également extrêmement agiles. Pour assurer une plus grande fauchée (largeur des zones photographiées), le satellite peut compter sur ses « actionneurs diaboliques » pour se repositionner et imager une zone voisine de celle qu’il vient de regarder : il peut changer de zone visée en seulement 200 millisecondes, une performance extraordinaire pour un satellite d’observation de la Terreobservation de la Terre. Les images seront recueillies en quelques microsecondes par une matrice de 250 millions de pixels au bout du chemin optique. À chaque fois, on obtiendra quatre images : rouge, vert, bleu, et proche-infrarouge. La reconstitution produira l’image définitive en couleurscouleurs.
La constructionconstruction des satellites a été réalisée en un temps record en bénéficiant du savoir-faire de fabrication de satellite à la chaîne avec OneWeb (la chaîne de production des plus de 700 satellites de communication, située en Floride, appartient à Airbus DS). Cela passe par diverses étapes :
- intégration des six faces du satellites (des « mursmurs » : deux pour l’avionique, deux pour le contrôle thermique et la communication, un pour la propulsion, un pour l’ouverture du télescope) ;
- un atelier par mur ;
- intégration des panneaux solaires ;
- assemblage du satellite ;
- tests acoustiques et « burning » (exposition du satellite à un soleilsoleil artificiel pour tester sa résistance thermiquerésistance thermique ;
- remplissage des réservoirs en carburant (xénonxénon) ;
- chargement des logicielslogiciels : on dit alors que le satellite est « armé ».
D’abord en mission pour le Cnes
Les satellites volent en deux paires indépendantes. L’un pourchasse l’autre pour assurer un point de vue multiple et par conséquent une reconstitution 3D. Une fois mis en orbite par la fuséefusée européenne Vega-C au cours de l’été, les satellites CO3D vivront trois phases dans leur vie. La première de six mois est celle de leur préparation, qu’on appelle le « commissioning », où on teste le bon fonctionnement des sous-systèmes et où on calibre les images.
La seconde phase est la première période de la vie opérationnelle des CO3D : créer le jumeau numérique de la surface terrestre. Cette phase est pilotée par le Cnes, qui testera aussi sa chaîne de traitement des images, avant de la fournir à Airbus DS. Après 18 mois entre les mains du Cnes, les satellites reviennent à Airbus DS, qui pourra alors traiter et vendre les images. Le tout sera piloté depuis Toulouse.
CO3D devra aussi démontrer quelques innovations techniques, comme le transfert d’images à la Terre par laserlaser (10 Gbps). On testera aussi la vision de nuit et les capacités d’usage d’une IA embarquéeIA embarquée. Ces tests sont importants pour l’avenir de l’observation de la Terre.