Publié le 22 juin 2025 à 20:49. / Modifié le 22 juin 2025 à 20:55.

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Au cœur des pays baltes, sur le front est de l’Europe

Ils sont aux avant-postes, victimes de la guerre hybride de Moscou. Depuis l’invasion de l’Ukraine, la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie, trois ex-républiques soviétiques devenues membres de l’UE et de l’OTAN, augmentent leurs dépenses militaires, renforcent leurs frontières et se retirent des conventions qui bannissent les mines antipersonnel et les bombes à sous-munitions. Le Temps a arpenté le front est de l’Europe, là où la menace se fait le plus ressentir.

Premier épisode: En Lituanie, une prison secrète de la CIA dans un coin perdu, symbole des relations complexes avec les Etats-Unis

Deuxième épisode: «Nous sommes des citoyens de seconde zone»: en Lettonie, la vie tourmentée des russophones

Metsavaim est âgé, il a la barbe négligée, recouverte de mousse. Dans la mythologie estonienne, il est l’esprit des bois. Celui qui veille sur la forêt, fierté nationale qui s’étend sur plus de la moitié du territoire de cet Etat balte grand par la taille mais dont la population ne dépasse pas 1,3 million d’habitants. Ici, la forêt est sacrée, protectrice, un refuge. Mais ce jeudi matin de mai, alors que quelques flocons de neige tombent mollement sur les cimes des pins et des bouleaux qui s’alignent à perte de vue, une activité inhabituelle l’agite.

Des silhouettes camouflées de vert s’affairent à retourner la terre orange. Elles creusent des tranchées de combat et des foxholes permettant de protéger un soldat en position de tir. Deux hommes s’approchent: le caporal Erik Joonas Juhandi, spécialiste des systèmes de soutien des transmissions, et le commandant de peloton Karl Tõntsu. Lourdement équipés, le visage barbouillé de peinture de camouflage oscillant du kaki au brun, un couvre casque fait de lambeaux de tissus imitant des feuilles. On dirait presque des buissons sur pattes.