CHIP SOMODEVILLA / Getty Images via AFP
Donald Trump, le 24 juin à Washington avant de s’envoler pour le sommet de l’Otan aux Pays-Bas.
INTERNATIONAL – Et si, par la force des choses, la vedette du sommet de l’Otan s’appelait Donald Trump ? Le président américain, qui pourtant n’a pas été tendre avec l’alliance et ses pays membres, est arrivé ce mardi 24 juin aux Pays-Bas. Il y rejoint les 32 participants d’un sommet qui, sur la forme comme sur le fond, a tout pour le mettre à l’honneur.
Le milliardaire américain n’est pas le plus grand admirateur de l’Otan. Lors de son premier mandat, il l’avait ainsi jugé « obsolète » avant de revenir sur ses propos. Puis, il s’en était pris aux pays membres accusés de ne pas contribuer assez – par rapport aux États-Unis et aux termes de l’accord – au budget défense de l’alliance.
De retour, son discours n’a guère changé. En décembre 2024, juste avant de revenir à la Maison Blanche, le président républicain a ainsi laissé planer l’hypothèse d’un désengagement américain. Il n’est depuis pas revenu sur cette menace. Mais dans ce contexte, sa venue au premier sommet depuis sa réélection était particulièrement attendue. Et la situation internationale – guerre en Ukraine, conflit israélo-palestinien, sans oublier la guerre Iran-Israël – est susceptible de jouer en sa faveur.
Tout est fait pour que « Trump ne s’ennuie pas »
Le format du sommet de La Haye se veut bref : une unique session de 3 heures avec tous les dirigeants, hors rencontres bilatérales de chacun. « Court, compact et pertinent », décrit l’Élysée qui dit « ne pas avoir connaissance » de planification particulière selon les desiderata des uns et des autres. Pourtant, impossible de ne pas s’interroger : la réunion a-t-elle été calibrée par rapport au chef d’État américain, connu pour ne pas apprécier les échanges en longueur et qui n’hésite pas à partir quand bon lui semble ? De même, une invitation à une partie de golf – son sport fétiche – a un temps été évoquée, avant que le programme ne se limite finalement à un dîner de gala à l’invitation du roi des Pays-Bas mardi soir. Tout est fait pour que Donald « Trump ne s’ennuie pas dans des réunions interminables où il doit rester des heures après avoir prononcé son propre discours », explique Jamie Shea, un ancien responsable de l’Otan à l’AFP.
Et s’il n’y avait que la forme… Alors que dans sa déclaration finale en 2024, les pays membres avaient choisi de mettre l’accent sur la guerre en Ukraine, cette fois-ci, le sommet portera quasiment autour d’un seul sujet : l’augmentation des dépenses de défense de chaque pays à 5 % du PIB. Soit le principal point de crispation du président américain sur l’alliance.
Certes, Français et Allemands ont bien tenté de minimiser son poids, Emmanuel Macron et Friedrich Mertz affirmant à la veille du sommet que cet objectif doit être atteint « non pas parce que quelqu’un nous le demande, mais parce que nous sommes clairvoyants ». Il n’empêche, dans les faits, l’influence de Donald Trump est presque matériellement palpable : selon des sources diplomatiques citées par l’AFP, la déclaration finale du sommet de La Haye ne devrait comprendre que cinq paragraphes, dont le plus important concerne les 5 %. À titre de comparaison, celle de Washington l’année précédente (avec Joe Biden) en comptait une quarantaine, et les questions budgétaires n’étaient abordées qu’à partir du paragraphe 5, principalement pour « se réjouir que plus des deux tiers des Alliés » respectent le critère des 2 % et évoquer brièvement la nécessité d’augmenter ce chiffre… sans d’objectif défini ni de calendrier.
Le chef de l’Otan encense Trump par SMS
Ce n’est pas la seule victoire dont Donald Trump pourrait se vanter. Dans la nuit du 23 juin, le président américain a annoncé un cessez-le-feu entre Iran et Israël après 11 jours de frappes. Après quelques heures de confusion, il a fini par entrer en vigueur. Le locataire de la Maison Blanche a d’ailleurs reçu les félicitations des dirigeants de l’UE, d’Ursula von der Leyen à Emmanuel Macron. Et sur sa plateforme Truth social, alors qu’il était en route pour les Pays-Bas, il n’a pas hésité à rendre public les louanges adressées par le chef de l’Otan Mark Rutte et dont l’authenticité a été confirmée.
« Félicitations et merci pour votre action décisive en Iran. C’était vraiment extraordinaire et quelque chose que personne d’autre n’avait osé faire », commence Mark Rutte à propos des bombardements américains sur des sites nucléaires iraniens. « Vous vous envolez vers un nouveau grand succès » à La Haye, poursuit le Néerlandais en référence à l’accord financier sur la défense. Et d’ajouter, en reprenant la typographie en majuscules qu’affectionne Donald Trump sur les réseaux sociaux : « L’Europe va payer un prix ENORME » pour financer sa défense « comme elle le devait » et « ce sera votre victoire ».
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Même fragile, le cessez-le-feu offre à l’Américain une longueur d’avance sur les Européens, inaudibles dans la région. L’Otan ne l’est pas davantage. D’une part, parce que la région du Moyen-Orient n’entre pas dans les prérogatives de l’organisation transatlantique. D’autre part parce que parmi les 32 pays qui la composent, seuls les États-Unis ont des liens profonds avec un des deux belligérants, en l’occurrence Israël. Cela n’empêchera pas le sujet d’être abordé à La Haye. Reste que les chances de le voir figurer dans la déclaration finale sont maigres. Surtout quand un autre front préoccupe les Européens : la guerre entre Russie et Ukraine.
Zelensky un peu à part
Au début de son mandat, Donald Trump s’était fait fort de régler ce conflit rapidement. Mais incapable d’obtenir des avancées concrètes – notamment de la part de la Russie – il avait durci le ton, avant de laisser peu à peu cette région de côté pour s’impliquer davantage au Moyen-Orient. Un désintérêt – feint ou réel – qui fait craindre aux Européens que ce conflit ne passe au second plan, une inquiétude renforcée par la réticence de Washington à sanctionner Moscou.
Finalement, à la dernière minute depuis son Air Force One, l’Américain a indiqué qu’il rencontrerait « probablement » son homologue ukrainien en marge du sommet mercredi « en début d’après-midi ». « Je lui dirai “comment ça va ?”. Il est dans une situation difficile, il n’aurait jamais dû se trouver là », a déclaré Donald Trump. Cette rencontre sera seulement la troisième entre les deux hommes, après le clash dans le Bureau Ovale, un bref échange en marge des funérailles du Pape et une annulation de dernière minute au Canada lors du G7. Bien que présent à La Haye, Volodymyr Zelensky ne participera pas formellement au sommet et aux discussions, une première depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022. Là encore, pour ne pas froisser Donald Trump ?