Née au Japon de parents belges expatriés, la petite Amélie ne grandit pas comme les autres enfants : durant ses premières années, pratiquement aucun son ne sort de sa bouche et la fillette semble réfugiée à l’intérieur d’elle-même, atone et peu réactive.
Désespérés, ses parents tentent de faire poser un diagnostic, mais rien n’y fait, elle reste muette et comme absente. À l’âge de 3 ans, c’est grâce à un morceau de chocolat blanc et à l’aide de sa nounou nippone qu’Amélie va s’éveiller brusquement, avant de rapidement prononcer son premier mot : « Aspirateur » !
À partir de là, tout va s’accélérer, comme si elle voulait rattraper le temps perdu : d’enfant mutique et végétative, la petite fille devient surdouée, hyperactive, débordante d’énergie et d’émotions, avide de découvertes, mais aussi dotée d’une conscience très avancée pour son âge de ce qui l’entoure, des petits bonheurs aux grandes tragédies de la vie.
Surtout, Amélie se sent Japonaise, grâce à sa nounou et à son environnement proche : elle va apprendre à écrire les idéogrammes et beaucoup d’autres choses relatives à son pays de naissance avec une facilité déconcertante, tandis qu’elle est déjà animée par un puissant désir d’écrire…
Couleurs explosives, ligne graphique sublime…
Dévoilée en mai dernier à Cannes, puis récompensée un mois plus tard du Prix du Public au Festival du film d’animation d’Annecy, cette pépite, signée des réalisateurs Maïlys Vallade et Liane-Cho Han, est adaptée, avec quelques modifications, de « Métaphysique des tubes » d’Amélie Nothomb – qui a laissé toute liberté aux cinéastes – où l’écrivaine racontait sa petite enfance au Japon.
Le long-métrage nous place en quelque sorte à l’intérieur de la tête de l’autrice en devenir, et l’on découvre que, même dans les deux premières années de sa vie, ça bouillonnait carrément dans son cerveau que ses proches imaginaient au ralenti. Après quoi, le rythme du film, calqué sur celui – pétaradant – de la fillette, tient du feu d’artifice.
Voilà pour le fond, mais c’est la forme choisie, le cinéma d’animation, qui permet de rendre compte de ce récit aussi réel qu’exceptionnel du début d’une vie. Sous la direction d’Eddine Noël, l’équipe artistique du film a réalisé une mise en images exceptionnelle, fortement inspirée par les paysages, la nature et l’art japonais : couleurs explosives, personnages épurés aux grands yeux, ligne graphique sublime, en particulier en ce qui concerne les végétaux (Amélie et sa nounou passent beaucoup de temps dans le jardin familial), décors zen…
Une charte graphique qui navigue sans cesse entre estampes et manga, avec des influences assumées du côté des deux fondateurs du Studio Ghibli, Hayao Miyazaki et Isao Takahata, tout en se laissant des libertés créatrices. Le spectateur – quel que soit son âge – conquis par le récit et ébloui par tant de raffinements visuels, en redemande…
La note de la rédaction :« Amélie et la métaphysique des tubes »,
film d’animation français de Maïlys Vallade et Liane-Cho Han, (1h17).