Par

Anthony Soudani

Publié le

25 juin 2025 à 6h08

Jean-Luc Mélenchon, François Hollande, Marine Tondelier… À gauche, ce ne sont pas les ambitions présidentielles qui manquent. Eric Piolle, porte-parole des Écologistes, confie à actu Grenoble ses envies politiques pour la suite, ses souhaits pour les municipales 2026 et pour l’échéance présidentielle.

Le maire de Grenoble, dont c’est le dernier mandat, veut tourner la page de la politique locale pour s’orienter vers le national.

Candidat en 2022, il ne se présentera pas directement pour succéder à Emmanuel Macron mais plaide pour une union de la gauche. Il dit notamment ce qu’il pense de Jean-Luc Mélenchon et François Hollande. Interview.

Être maire écolo, « c’est toujours populaire »

Actu : Pensez-vous qu’aujourd’hui, c’est toujours populaire d’être maire écologiste ? Est-ce que la hype (tendance) de 2020 ne s’est pas un peu éteinte ?

Eric Piolle : Je pense que oui, c’est toujours populaire. Nous sommes dans un débat national qui s’est radicalisé beaucoup plus que les gens. Les chaînes d’actualité en continu et le noyautage de certains médias par des milliardaires d’extrême droite, qui ont un agenda politique, ont radicalisé l’offre politique nationale. Mais à l’échelle locale, il y a cette envie de continuer de vivre en communauté.

Vous êtes accusé d’avoir demandé à un de vos conseillers de rétrocéder ses revenus à une élue, Elisa Martin. Cela représenterait 16 800 euros en liquide, non déclarés au fisc. Cette affaire a-t-elle terni votre image ? Avez-vous des nouvelles de la justice ?

E.P. : Je n’ai pas de nouvelles depuis bientôt 7-8 mois. La justice fait son travail. J’ai toujours dit que j’étais un justiciable comme les autres. Et ça n’a pas terni mon image. Elisa Martin a été la députée la mieux réélue de toute l’Isère. Dans la population, personne ne m’en parle.

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Vous allez laisser votre place à une candidate écologiste qui reste à déterminer. Si la France insoumise part avec un candidat de son côté et prend la tête de la mairie de Grenoble. Pour vous, est-ce que ce serait une bonne chose ?

E.P. : Je suis écologiste. Je pense que ce munipalisme écologiste fonctionne dans la façon de faire de la politique. Quand on est arrivé, il y avait 20 voitures de fonction pour les adjoints, deux voitures pour le maire… On a baissé les indemnités, le train de vie des élus. Cette pratique politique reste originale.

Eric Piolle maire de Grenoble
Eric Piolle, maire de Grenoble, souhaite que son parti continue à faire alliance avec LFI en 2026. (©Anthony Soudani / actu Grenoble)Municipales à Grenoble : « Pour la France insoumise, c’est Jean-Luc Mélenchon qui décidera à la fin »

Pensez-vous que les Écologistes vont faire mieux ou moins bien aux municipales 2026 ?

E.P. : J’espère que le mouvement de 2020 va s’étendre. On pense aux préfectures. On a tous Lille en tête avec la succession de Martine Aubry. Il y a des villes de droite qui peuvent être conquises par la gauche et les écologistes s’ils savent s’unir.

Appelez-vous la France insoumise à rejoindre les écologistes pour faire une liste ensemble aux municipales 2026 à Grenoble ?

E.P. : Il y a une aspiration à continuer ensemble. Pourquoi ne pas élargir au périmètre du Nouveau front populaire (NFP). Rien n’est figé du côté du Parti socialiste, qui était dans l’opposition la dernière fois. Tout le monde sait que pour la France insoumise, c’est Jean-Luc Mélenchon qui décidera à la fin.

Eric Piolle veut continuer avec LFI à Grenoble

Sentez-vous une volonté de mettre un candidat insoumis à Grenoble face aux écologistes dès le premier tour ?

E.P. : À Grenoble, ils sont attachés à ce que nous avons construit ensemble. S’il y a une décision de Jean-Luc Mélenchon sur les municipales, ce sera une décision nationale.

Discutez-vous avec Jean-Luc Mélenchon ? Vous envoie-t-il les mêmes messages qu’à Marine Tondelier ? (N.D.L.R. « On va te renvoyer la dose que tu mérites. », lui avait-il envoyé avant les législatives de Grenoble.)

E.P. : Il ne m’envoie pas les mêmes messages qu’à Marine Tondelier. On sait comment fonctionne LFI. La décision, on sait où elle se prend. Y a-t-il une prise de risque pour eux ? C’est potentiellement montrer une sorte de plafond de verre, comme à Villeneuve-Saint-Georges. Mais surtout, il faut regarder le fond politique. À l’échelle nationale, les écologistes n’ont pas la même façon de s’adresser à la société que Jean-Luc Mélenchon. Mais à l’échelle locale, nous avons travaillé en bonne harmonie sur les préoccupations des habitants. L’envie, c’est de continuer dans un périmètre élargi du NFP.

Eric Piolle veut « porter la candidature d’une femme » à la présidentielle 2027

Vous êtes une des grandes figures des Écologistes. Avez-vous des ambitions présidentielles en 2027 ?

E.P. : Mon ambition, c’est d’avoir une candidature commune qui soit en capacité de jouer la victoire au deuxième tour face à l’extrême droite. Pour la première fois, on peut se dire qu’elle sera en tête du premier tour des élections. En tout cas, si elle ne l’était pas, ce serait une surprise majeure. C’est une inversion par rapport aux campagnes précédentes.

La question c’est : quelle sera la candidature pour battre l’extrême droite ? Nous travaillons à une candidature commune. Nous ne sommes pas dans une logique de primaire écolo. Moi, j’ai été candidat la dernière fois parce que je pensais que j’étais le seul à réunir de la France insoumise au Parti socialiste. Là, je suis plutôt au service du collectif.

Marine Tondelier a pris la parole devant les salariés en grève.
Marine Tondelier pourrait-elle porter une candidature commune en 2027 ? Eric Piolle botte en touche. (©Paul LESIGNE)

Vous ne vous voyez pas personnellement candidat donc…

E.P. : Je ne suis pas dans la même logique que 2022. Ce qui m’importe c’est le collectif avec cette envie de faire émerger une candidature commune et si possible une candidature de femme. Comme à Grenoble, je suis fier que ce soit une femme qui prenne la tête de la liste après moi.

Plutôt Marine Tondelier ou Lucie Castets ?

E.P. : Je le garde pour moi. 2022, c’étaient des candidatures individuelles, y compris la mienne. 2027 sera une aventure collective.

« Si Jean-Luc Mélenchon décide d’être candidat en 2027, ok c’est sa vie… »

Mais avec la France insoumise, c’est presque mission impossible…

E.P. : C’est ouvert. Je ne pense pas qu’ils seront là le 2 juillet (à la réunion entre partis de gauche et la société civile). Mais quel que soit le périmètre, ce sera un collectif. Il n’y aura aucune candidature naturelle. Si Jean-Luc Mélenchon décide d’être candidat, ok c’est sa vie…

Vous seriez prêts à vous ranger derrière Jean-Luc Mélenchon dès le premier tour pour faire une union de la gauche derrière la France insoumise ?

E.P. : Même si ça a raté deux fois, il en était très proche. Je pense que Jean-Luc Mélenchon a montré qu’il était le plus talentueux pour écarter l’extrême droite du deuxième tour.

La question qui est nouvelle en 2027, c’est qui peut battre l’extrême droite au deuxième tour ? La personne que nous cherchons est une personne qui peut rassembler une large partie des Français dans ce front républicain sur un projet de transformation profonde. Je souris un peu quand je vois la candidature de François Hollande, parce qu’il ne peut rien se faire dans une stratégie d’accompagnement du système sur cinq ans comme ça a été fait entre 2012 et 2017.

François Hollande dans la course : « Ça me fait sourire »

Elle vous fait rire la potentielle candidature de François Hollande…

E.P. : Elle me fait sourire. Ça fait 15 ans qu’il a été élu… ça a un côté Giscard qui rôdait dans les parages pour voir s’il pouvait revenir. Les succès qu’il peut rencontrer dans les dédicaces de son livre ne sont peut-être pas forcément les prémices d’un succès d’une nouvelle candidature.

François Hollande sera ce jeudi 1er mai 2025 à Marmande pour l'inauguration de la Foire.
François Hollande ne cache pas son intérêt pour 2027. (©actu.fr)

Après mars 2026, allez-vous garder un pied dans la vie politique grenobloise ou vraiment, c’est fini pour vous ?

E.P. : Je n’ai pas envie d’être encombrant pour la suite. Il faut laisser de la place, ça ne sert à rien de rôder comme un vieux. Je ne vais pas faire le François Hollande grenoblois : rôder pour voir si les gens me regrettent. Je n’ai pas du tout ce besoin-là. Je continuerai de vivre ici et aussi à Paris. Je continuerai le travail national en étant basé à Grenoble sans être dans la vie politique locale.

Propos recueillis par Lisa Rodrigues et Anthony Soudani

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