Hors affaire OM-VA ayant coûté une rétrogradation administrative particulière aux Marseillais en 1994, il faut remonter à l’année 1991 pour trouver trace de la chute d’un club de l’élite français malgré un maintien sportif assuré. Cette saison-là, il y avait même eu un tir groupé entre Bordeaux (10e), Nice (11e) et Brest (14e), tous sanctionnés par la jeune Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG). C’est dire à quel point la relégation en Ligue 2 annoncée mardi soir par le gendarme financier du football français à l’encontre de l’Olympique Lyonnais (6e de Ligue 1 et qualifié en Ligue Europa) est rare.
L’OL n’a eu besoin que de deux heures, sans même connaître « les motivations » de cette décision « incompréhensible » de la DNCG, pour annoncer qu’il fera appel de la sanction. Mais auprès de qui au juste, et à quelle échéance, alors que la première journée de Ligue 1 en 2025-2026 est programmée du 15 au 17 août ? L’appel va se faire auprès de la commission d’appel de la DNCG, qui ne dépend pas de la LFP mais de la FFF. L’OL aura sept jours, une fois après avoir reçu la notification de la décision de la DNCG (sans doute jeudi ou vendredi), pour officialiser son appel.
« De nouveaux éléments possibles » en appel
Entre le 4 et 11 juillet, afin de respecter la tenue du calendrier des saisons de L1 et L2, cette commission se réunira donc à Paris avec John Textor et les dirigeants lyonnais. Mais comment pourraient-ils obtenir gain de cause en maximum deux semaines alors qu’ils avaient sept mois de préparation pour lever la « rétrogradation à titre conservatoire » du 15 novembre et qu’ils ont échoué mardi ? « Le club aura le droit d’amener de nouveaux éléments afin de convaincre la commission d’appel », explique Me Jean-Christophe Breillat, avocat spécialisé en droit du sport.
Comprendre que courant juillet, la vente des parts de John Textor à Crystal Palace (pour plus de 200 millions d’euros), confirmée seulement lundi par le club londonien et en cours de validation par la Premier League, pourrait devenir bien plus concrète. Pas du luxe vu comme les comptes de l’OL ont besoin d’argent frais, depuis la demande en janvier de 175 M€ de la part de la DNCG. « De même, au lieu d’annoncer qu’il ne réinjectera que 40 M€ de ce montant dans l’OL car il cherche dans le même temps à racheter un autre club anglais, peut-être que Textor acceptera cette fois de mettre au moins 80 M€ vu ce que risque désormais Lyon », souffle un habitué des instances souhaitant rester anonyme.
John Textor, ici lors de la défaite de l’OL à Monaco (2-0), le 10 mai, qui avait ruiné les espoirs lyonnais de Ligue des champions. - C. Mahoudeau / AFPLe CNOSF avait souri à Gérard Lopez en 2022
Cette commission d’appel de la DNCG fédérale livrera sa décision le soir même ou le lendemain matin. Si celle-ci maintient la décision initiale d’une relégation en Ligue 2, l’OL pourra solliciter un autre recours auprès du Comité national olympique du sport français (CNOSF). Celui-ci pourrait prendre jusqu’à deux semaines supplémentaires.
« Là, il n’est en principe pas possible d’amener de nouveaux éléments », précise Me Breillat, en poste au Centre de droit et d’économie du sport (CDES) à Limoges. Même si c’est via une conciliation du CNOSF que l’OGC Nice (Ligue 1 en 2002), le RC Lens (Ligue 1 en 2014) ou plus récemment les Girondins de Bordeaux de Gérard Lopez (Ligue 2 en 2022) s’étaient sauvés, ce recours reste encore plus incertain que la commission d’appel de la DNCG.
Enfin, l’OL pourrait se tourner en dernier recours vers le tribunal administratif de Paris, ce qui serait encore plus mauvais signe pour un hypothétique maintien dans l’élite, d’autant plus que les championnats seraient logiquement en train de reprendre à ce moment-là. Mais, selon un spécialiste de ce type de recours dans le football français, le feuilleton estival lyonnais n’aura pas besoin d’aller jusque-là.
« Davantage une décision politique que financière »
« La DNCG a voulu se faire Textor, assure ce dernier. Elle a gardé en travers de la gorge le fait que malgré l’interdiction de recrutement l’hiver dernier contre l’OL, il avait profité de son modèle de multipropriété pour se faire prêter Thiago Almada. Entre ça et ses annonces de ventes potentielles de joueurs de Botafogo qui profiteraient à l’OL, ça ne pouvait qu’énerver la DNCG. C’est davantage une décision politique que financière et il est évident que Lyon sera maintenu en appel. »
Des banderoles visant John Textor ont envahi la région lyonnaise depuis mardi soir, en raison de la relégation en Ligue 2 prononcée contre l’OL par la DNCG. - O. Chassignole / AFP
Très remontés contre un John Textor plus que jamais fragilisé depuis mardi aux yeux du fonds d’investissement Ares, les supporteurs de l’OL devraient croiser les doigts pour pareille issue le mois prochain. Dans le cas contraire, Lyon débutera sa première saison de Ligue 2 depuis 1988-1989, à moins d’une chute encore plus désastreuse que tant de suiveurs redoutent.
La Ligue Europa également en danger
Seizième de Ligue 1 et relégué en barrages, le Stade de Reims de Jean-Pierre Caillot pourrait en profiter pour réintégrer l’élite, si son déficit estimé à 15 millions d’euros ne le bloque pas devant la DNCG. Sinon, c’est… l’ASSE (17e de L1) qui pourrait prendre la place de son rival historique. Ce comble de la lose pour les supporteurs lyonnais pourrait s’accompagner d’une annulation de sa participation à la Ligue Europa.
L’Equipe indique ainsi qu’au vu de son alarmante situation financière, l’OL doit signer avec l’UEFA un « accord négocié » prévoyant des sanctions pour valider sa place en C3. Une possibilité qui s’éloignerait sans doute en cas de rétrogradation administrative en Ligue 2. Cette fois, un tel scénario bénéficierait à Strasbourg (d’un barrage de C4 aux poules de C3) et… au RC Lens de Pierre Sage (8e de Ligue 1 et dans ce cas qualifié en Ligue Conférence). Le karma, Johnny…