Ce deuxième jour des défilés masculins à Paris, dédiés au printemps-été 2026, s’est révélé enrichissant avec des propositions variées mêlant allègrement les styles. Nombreux sont les jeunes créateurs qui créent des pièces inventives. Elles sont parfois excessives, parfois très portables, mais toujours avec un point de vue affirmé. Comme c’était le cas notamment chez Jeanne Friot, Hed Mayner, 3.Paradis et Egonlab.
Voir le défiléJeanne Friot, printemps-été 2026 – ©Launchmetrics/spotlight
Jeanne Friot affiche plus que jamais son engagement pour une mode responsable et inclusive avec un défilé manifeste, dont le titre est tout simplement « Résistance ». Par les temps qui courent, tout un programme! Que ce soit dans le public, qui endosse les accessoires et les modèles les plus emblématiques de la créatrice lesbienne, ou sur le podium, c’est la même communauté queer qui s’est rassemblée pour ce moment de communion combattive avec un casting « 100% trans et non binaire ».
« Ce sont des activistes et ami-e-s, qui ont amené à leur tour leurs ami-e-s », glisse la styliste, finaliste prix de l’Andam cette année, qui explique avoir voulu « offrir un moment de joie à cette communauté meurtrie avec ce qui se passe aux États-Unis et globalement dans le monde. J’ai voulu leur donner un moment d’unisson ».
Les cils pailletés, les ongles longs peints, se dressant fièrement dans leurs imposantes bottes de cavalière montant jusqu’au genou et au-delà, réalisées à partir de multiples ceintures -signature de Jeanne Friot-, les mannequins défilent avec orgueil et émotion. Lorsque le dernier modèle enserré dans une robe bustier composée de ceintures noires vernies, telle une armure, lève le poing au ciel, les applaudissements redoublent et quelques larmes glissent sur les joues.
En faisant toujours appel à des tissus dormants, Jeanne Friot retravaille ses classiques dans des total looks blancs, rose pâle et bleu pâle, les couleurs du drapeau de la Fierté transgenre. Les costumes et larges bermudas refermés par des attaches à boucle, sont légers et fluides, des petits blousons doudounes aux imprimés écossais se portent avec des mini shorts. Les kilts tartans en soie sont construits de manière asymétrique. Un micro tailleur est taillé dans un tweed bleu électrique. Ne manquent pas, bien sûr, les pièces plus « strong » en coton noir, ajourées par des œillets métalliques.
Voir le défiléHed Mayner, printemps-été 2026 – ©Launchmetrics/spotlight
Hed Mayner se déleste des grands volumes, des structures monumentales et protectrices, qu’il affectionnait jusqu’ici pour évoluer vers une silhouette plus légère et délicate avec des mises fluides, mais aussi plus près du corps, ainsi qu’avec des détails plus maniérés, presque baroques, comme ces blouses et petits manteaux tapisserie à grosses fleurs, ces ensembles pyjama à imprimés, ces foulards colorés portés en fichu, ces jupes mouchoir taillée dans des nappes ou foulards, ces ensembles en organza smocké.
Les costumes pantalons ou bermudas lâches, privés de leurs épaules carrurées, sont toujours aussi désirables, impeccablement coupés dans des laines fraîches délicates et autres tissus à fines rayures, dans lesquels le designer israélien taille volontiers aussi des étoles à jeter sur les épaules. Tout glisse et fluctue sur le corps avec naturel et élégance. Parfois les vestes sont privées de manches pour un plus grand confort.
Hed Mayner privilégie les total looks et les tenues simples avec deux trois pièces essentielles, comme une veste marine presque cintrée associée à un jean déchiré, la veste-gilet sur le cardigan, le pull marine sur la chemise blanche avec un imper et un denim. Le tout est toujours parfaitement proportionné et adouci dans les formes grâce à un travail précis sur les arrondis et les drapés. Les vêtements sont vidés de leur structure, ils ondulent le long du corps avec, à chaque fois, le juste tombé.
Voir le défilé3.Paradis, printemps-été 2026 – ©Launchmetrics/spotlight
Après la neige de l’hiver dernier, Emeric Tchatchoua couvre son podium de sable fin avec, cerise sur le gâteau, de grands spots réchauffant braqués sur la piste et les spectateurs. Pour l’été 2026, le créateur de la marque 3.Paradis imagine un voyage allégorique dans le désert, où l’on croise toutes sortes de personnages, du rappeur French Montana, élégant et relax dans une veste de smoking blanche déstructurée à Jean-Charles Castelbajac vêtu d’un immense trench beige en cuir.
Sans oublier, bien sûr, le Petit Prince, cité en jacquard dans un chandail, dessiné au bas d’une chemise bleu nuit à la recherche de son étoile ou à travers les dessins d’Antoine de Saint-Exupéry repris dans des t-shirts. Parmi les rencontres inattendues dans cet océan de sable, cet homme en manteau de laine sombre couverts de montres vintage, motif que l’on trouve brodé aussi sur divers pantalons. Un vendeur à la sauvette ou le symbole du temps qui fuit (ou se dilate dans le désert)?
Les mannequins traversent ce désert comme ployant sous la chaleur, au ralenti, en zigzagant. Une série de tenues aux teintes chaudes ou couleurs de sable ouvre le défilé. Des costumes croisés décontractés, des pantalons amples à multi tailles comme si quatre exemplaires étaient enfilés l’un sur l’autre, des cardigans boutonnés en diagonale. Le dessin du vent dans les dunes est repris dans des plis et ondulations qui façonnent certaines manches et pantalons, tandis que le sable s’empare en poudre argenté d’un tulle apposé comme une voile latérale dans une chemise privée d’une manche.
Au fur et à mesure, la collection s’anime de couleurs fortes et vibrantes avec des tenues plus urbaines et décontractées. A l’instar de ces ensembles camouflages parsemés de brillants ou de ces costumes noirs qui s’illuminent sur le devant de jaune et d’oranger à coup de gros coups de pinceaux. On retrouve la colombe symbole de la marque sur des shorts couleur ciel, portés torse nu, avec juste une chemise à rayures fines transformée en sac de plage à porter en bandoulière. La palette explose via des chemisettes orange fluo et des pantalons et blousons rose shocking.
Voir le défiléEgonlab, printemps-été 2026 – ©Launchmetrics/spotlight
Egonlab vise le haut de gamme, délaissant son côté punk urbain (malgré de belles bottes de cow-boy) pour se concentrer toujours plus sur la partie tailleur, dont les mille variations et possibilités semblent donner davantage de plaisir aux stylistes Florentin Glémarec et Kévin Nompeix. Les proportions des costumes sont revues avec des vestes qui s’allongent jusqu’au bas des fesses se drapant dans le dos, munies d’ouvertures sous les aisselles, qui permettent de les enfiler sans manches. Les pantalons à pinces peuvent se resserrer à la cheville grâce à une bandelette boutonnée.
Cette saison, le duo joue plus que jamais avec les détails. Les manchettes des vestes sont exagérément grandes avec un tissu en contraste (blanc sur un costume noir ou beige), tout comme les revers des pantalons, qui sont relevés bien haut retenus par un bouton, dévoilant la doublure à carreaux d’un jean couleur rouille, ou la toile blanche à l’intérieur d’un denim bleu, et encore celle coton blanc à fines rayures bleues dans un pantalon camel. Summum du chic, les revers des manches courtes de certaines chemises sont refermées par des boutons de manchette. A noter aussi les pattes d’épaules à rallonge des trenchs et des chemises militaires.
Le reste de la collection se distingue par des effets de style pas forcément utiles comme ces grands cols (heureusement amovibles) de Pierrot lunaire en forme de gondoles. Florentin Glémarec et Kévin Nompeix s’amusent aussi à dédoubler les vêtements (les petits cardigans près du corps se portent par deux), voire à les tripler (les chaussettes s’enfilent par trois). Le défilé se clôt enfin par une chemise en dentelle blanche rigide, comme fixée et congelée dans son mouvement ondulant autour du corps, qui semble une armure bien encombrante à porter.
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