Publié le
12 avr. 2025 à 12h11
Alors que l’Assemblée nationale a entériné la révision de la loi Paris Lyon Marseille (dit Loi PLM) entraînant une réforme du mode de scrutin lors des Municipales 2026 dans ces trois villes, des voix s’élèvent aussi pour réclamer la création d’arrondissements à Toulouse, qui, avec ses 511 684 habitants, devrait officiellement être 3e ville de France à la fin de l’année… mais l’est déjà officieusement (les chiffres de l’Insee étant publiés avec deux ans de décalage). D’autres, en revanche, n’y voit qu’une source de « complications ». Ce qu’il faut savoir sur ce dossier.
« Répondre à une demande croissante de proximité »
En première ligne ? Les socialistes. S’ils regrettent que l’on « modifie les règles du jeu » à Paris, Lyon et Marseille « à un an des élections municipales », François Briançon et Vincent Gibert, les conseillers municipaux (PS) de la Ville rose, estiment que ce débat « appelle des réflexions sur la situation de Toulouse », en train de doubler Lyon en population, alors que la capitale des Gaules est découpée en neuf arrondissements.
« Toulouse, aujourd’hui 3e ville de France, ne dispose pas d’arrondissements alors que notre ville gagnerait à s’interroger sur leur mise en place pour répondre à une demande croissante de proximité et à une plus grande efficacité des politiques municipales dans tous les quartiers », estiment les deux élus socialistes.
La création d’arrondissements n’est pas nécessairement synonyme d’une élection du maire au suffrage indirect. Nous sommes et restons favorables à l’élection directe du maire par les électrices et les électeurs toulousains. Mais contrairement à ce qu’affirme le maire sortant, le débat sur une autre organisation territoriale n’est ni superficiel, ni inexistant.
François Briançon et Vincent Gibert
Conseillers municipaux (PS) de Toulouse
Les arrondissements ? « Une opportunité à saisir » pour le PS
« Dans une ville qui grandit, qui se transforme », pour les socialistes, « la question des arrondissements toulousains n’est pas un détail institutionnel ».
C’est une opportunité à saisir pour donner davantage de pouvoir aux quartiers et aux citoyens.
François Briançon et Vincent Gibert
« Comment peut-on encore penser que 69 élus puissent être à la disposition de plus de 500 000 habitants ? » s’étonne François Briançon, par ailleurs chef de file du PS pour les Municipales 2026 à Toulouse.
Une idée souhaitée… par le RN aussi
Les socialistes ne sont en réalité pas les premiers à mettre ce sujet sur le tapis dans cette campagne des Municipales. Au moment d’évoquer sa potentielle candidature au Capitole, l’eurodéputé Julien Leonardelli, délégué départemental du Rassemblement national, l’avait aussi évoquée : « Quand Toulouse va dépasser Lyon et devenir 3e ville de France va se reposer la question la création ou pas d’arrondissements pour Toulouse », soulevait-il le 14 mars dernier.
Pour moi, c’est un sujet, car les arrondissements, cela peut favoriser la vie de quartier. Les électeurs aspirent à la proximité. À Toulouse, la municipalité a créé des mairies de quartier, mais elles n’ont aucun poids.
Julien Leonardelli
Député européen, délégué départemental du RN
« Tout vient au Capitole », regrettait ainsi Julien Leonardelli, « et gérer 500 000 habitants depuis le Capitole, c’est très compliqué ».
« L’anomalie à corriger n’était pas à Toulouse », estime Jean-Luc Moudenc
En 2023, Jean-Luc Moudenc s’était déjà étendu sur la question lors d’un échange avec Actu Toulouse. « J’ai toujours été contre » les maires d’arrondissement, balayait le maire (DVD) de Toulouse, qui lâchait « C’est du pipeau ! » Il estimait alors que ce système électoral qui prévaut à Lyon, Marseille ou Paris, n’était pas souhaitable pour la Ville rose, car « cela prive une grande majorité de citoyens d’élire directement leur maire ». Bien que le mode de scrutin ait été revu, son opinion n’a pas changé d’un iota depuis.
« Il ne faut pas raconter des histoires aux Toulousains, même s’ils ne savent pas comment ça marche dans ces trois autres villes », met en garde Jean-Luc Moudenc, deux ans plus tard : « Les maires d’arrondissement n’ont pratiquement aucun pouvoir. L’anomalie n’était pas à corriger à Toulouse, mais dans les trois autres grandes villes ».
N’inversons pas les choses ! Le problème n’était pas à Toulouse, mais à Lyon, Paris et Marseille, où les citoyens ne pouvaient pas tous élire directement leur maire… Dans deux de ces trois villes, il est arrivé que celui qui se retrouvait maire à la fin était minoritaire en voix…
Jean-Luc Moudenc
Maire (DVD) de Toulouse
À Lyon : « Bon courage à tous pour s’y retrouver »
Le résultat prévu par le législateur après ce premier passage à l’Assemblée nationale laisse le maire de Toulouse sans voix : « Lors des Municipales 2026, il y aura deux scrutins à Paris ou Marseille, et même trois à Lyon (pour élire les conseillers municipaux, les conseillers d’arrondissement et les conseillers métropolitains, NDLR) ».
Bonjour les complications ! Je souhaite bon courage à tous pour s’y retrouver et pour expliquer aux électeurs comment ça marche.
Jean-Luc Moudenc
Maire de Toulouse
Comment ça se passe à Paris, Lyon et Marseille ?
Lyon, Marseille et Paris comptent respectivement 9, 16 et 20 arrondissements municipaux. Dans ces trois villes, le conseil municipal fonctionnait jusqu’ici un peu comme à Toulouse Métropole, avec un système au suffrage indirect qui rappelle quelque part celui des grands électeurs à l’américaine…
La nouvelle loi récemment votée à l’Assemblée (mais pas encore passée par le Sénat) instaure deux scrutins distincts pour les trois métropoles : l’un pour élire les conseillers d’arrondissement ou de secteur, l’autre pour élire ceux du conseil municipal (sur une circonscription unique). À Lyon se tiendront aussi les élections métropolitaines.
« À Toulouse, c’est lisible et facile pour les citoyens »
« Aujourd’hui, nous avons un système simple, pourquoi le compliquer ? » s’étonne Jean-Luc Moudenc. « À Toulouse, comme dans toutes les villes de France, nous aurons un seul scrutin, ce qui est lisible et facile pour les citoyens ». Comme il l’avait déjà indiqué, avec le système électoral en vigueur, le maire de la Ville rose est aussi, à ses yeux, plus légitime : « Toulouse est la plus grande circonscription électorale de France, la plus importante ville du pays où le maire se présente lui-même devant chacun des électeurs, et où il est élu par tous les Toulousains… ».
Les maires de quartier « manquent de légitimité » pour le PS
Mais pour les socialistes, « l’organisation actuelle » à Toulouse, « autour de ‘maires’ de quartiers imposés par le fait du prince aux habitants, est dépassée ».
Ces élus manquent de légitimité, car ils ne sont pas directement choisis par les citoyens.
François Briançon et Vincent Gibert
« Faute d’un mandat clairement défini », poursuit le binôme socialiste, « les projets portés dans chaque quartier sont soumis à la bonne volonté de quelques-uns ».
« Je préfère conserver à Toulouse notre système de maires de quartier »
Dans la Ville rose, 20 « maires » de proximité sont en effet désignés par le maire (le vrai) et se voient confier une délégation par le conseil municipal. Et pour Jean-Luc Moudenc, ils assument parfaitement leur mission. Leur rôle ? Représenter la municipalité au plus près des habitants, et faire remonter les préoccupations du terrain au locataire du Capitole.
S’ils étaient tous sur la liste « Aimer Toulouse » en 2020, ces maires de quartier n’ont pas été directement choisis par les habitants à cet effet, contrairement aux maires d’arrondissements… Mais pour Jean-Luc Moudenc, « nous avons des maires de quartier qui sont élus par tous les Toulousains, ce qui leur offre une légitimité supérieure à tous les maires d’arrondissements ».
« Pas un seul Toulousain ne m’en parle » dit le maire
Le maire de Toulouse gage enfin que personne ne réclame une telle réforme sur le terrain : « C’est une situation qui n’intéresse que quelques élus et quelques journalistes ».
Je n’ai pas rencontré un seul Toulousain sur les 525 000 qui me parle des arrondissements ! Pas un seul qui me dise qu’il faudrait remplacer les maires de quartier par des maires d’arrondissement… Le système des maires de quartier, c’est souple, connu des Toulousains, qui s’y sont familiarisés.
Jean-Luc Moudenc
« Au moment même où les collectivités sont soumises à des contraintes budgétaires très importantes », le premier magistrat met enfin en garde face à « une complication et une couche administrative supplémentaire qui engendrerait inéluctablement des coûts dont on peut se passer ».
Une motion au prochain conseil municipal
Mais pour François Briançon, le mode de scrutin qui prévaut à Toulouse « est dépassé et il faut imaginer une nouvelle étape ». Les élus socialistes indiquent qu’ils vont proposer au conseil municipal une motion « pour interpeller le législateur sur ces enjeux, afin d’aller vers une autre forme de gouvernance municipale ».
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