Plusieurs charges sont retenues contre eux. «Complicité de faux en écriture publique par une personne dépositaire de l’autorité publique», «violation du secret d’une enquête portant sur la criminalité organisée» et «complicité d’atteinte à l’intimité par captation d’images et de paroles». La cheffe de l’office antistupéfiants (Ofast) de Marseille et son adjoint ont été mis en examen, a fait savoir ce jeudi 26 juin le parquet de Paris.
L’affaire date de 2023. Elle commence par un tuyau reçu par l’Ofast concernant l’arrivée prochaine au port de Marseille d’une cargaison de cocaïne en provenance de Colombie, cachée au milieu de bananes importées. Les policiers montent alors une livraison surveillée, baptisée «opération Trident». Le but : laisser entrer la drogue plutôt que de la saisir afin de pouvoir démanteler le réseau qui la réceptionne. En l’occurrence, Mohamed Djeha, alias «Mimo», chef présumé du réseau de drogues de la Castellane. Sauf qu’une fois les conteneurs arrivés à destination, le fiasco commence. Les près de 400 kilos de cocaïne de la cargaison s’envolent, sans qu’aucun réseau ne soit identifié derrière.
Depuis, la justice remonte la hiérarchie des responsabilités. En avril, deux policiers de l’Ofast de Marseille avaient déjà été mis en examen, puis placés en détention provisoire, eux pour trafic de stupéfiants en bande organisée, blanchiment ou encore association de malfaiteurs. Puis en juin, un autre avait aussi été mis en examen. L’enquête dirigée par la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) a révélé, selon le ministère public, de possibles «échanges entre des policiers et d’autres personnes, portant sur la cession d’au moins 360 kg de cocaïne, en dehors de tout contrôle hiérarchique, et sur la dissimulation des quantités réelles arrivées sur le territoire».
Ce jeudi, les juges d’instruction de la Junalco ont donc mis en examen deux commissaires. «Ils ont été placés sous contrôle judiciaire avec interdiction d’exercer des fonctions et missions de police judiciaire, de se rendre dans tous les locaux de police des Bouches-du-Rhône, interdiction d’entrer en relation avec d’autres personnes apparaissant dans le dossier», précise le ministère public.
Louis Cailliez, avocat de la cheffe de l’Ofast, souligne que sa cliente «n’est ni mise en examen pour corruption, ni […] pour trafic de cocaïne, ni […] pour importation de stupéfiants en bande organisée». Selon lui, «elle conteste vigoureusement toute infraction pénale de sa part et défendra son honneur et sa probité en dépit des tentatives d’instrumentalisation de ce dossier».
Pour Me Cailliez, la garde à vue cette semaine de la cheffe de l’Ofast «a permis de lever les doutes sur l’absence de connaissance (et donc de validation) hiérarchique du déroulement réel du dossier Trident», nom de l’opération de livraison de cocaïne surveillée dans le viseur de la justice. «Tel est également le cas de certaines pratiques de ses effectifs, combattues et dénoncées par elle, et pour lesquelles elle a pourtant été mise en examen», a-t-il insisté.
De même, Maître Vanessa Bousardo, avocate de l’adjoint, se réjouit «de la légitime mise hors de cause du commissaire X du cœur de ce dossier concernant des faits de trafic de stupéfiants». Elle souligne que son client «est l’auteur du signalement à l’origine de cette procédure» et assure vouloir contester la procédure. «Une requête en nullité sera déposée prochainement à l’encontre de sa mise en examen et des irrégularités relevées», précise-t-elle. «Une telle mise en cause adresse d’ailleurs un très mauvais signal aux lanceurs d’alerte», a-t-elle aussi estimé.