« J’ai vraiment adoré cet apprentissage, j’ai appris à faire vivre les livres et à les partager avec mes enfants. Nous avons vécu ensemble des moments très intenses. » Lilia Fezzeu, 32 ans, Thannoise, mère de trois enfants de 6 ans, 2 ans et 6 mois, n’a pas de mots assez forts pour décrire l’aventure qu’elle a vécue depuis février dernier aux côtés de douze autres mamans qui ont participé au dispositif national « Des livres à soi ». Ce dernier a été mis en œuvre par les médiathèques de Thann-Cernay pour la première fois en 2025 et se poursuivra en 2026, en partenariat avec les centres socioculturels Agora de Cernay et du Pays de Thann, ainsi que le pôle petite enfance de la Communauté de communes de Thann-Cernay (CCTC). Créé en 2014, ce dispositif est un programme de médiation littéraire développé par le Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis, soutenu par le ministère de la Culture et le Centre national du livre.
Ses objectifs visent la démocratisation de la lecture, le soutien à la parentalité et à l’inclusion sociale.
Des outils pour « entrer » en lecture avec ses enfants
L’une de ses originalités est qu’il s’adresse aux parents afin de les réhabiliter dans leur rôle d’accompagnement de leurs enfants vers l’écrit. « Il ne s’agit pas d’ateliers parents-enfants », insiste Aïcha Bouafia, chargée de l’action culturelle des médiathèques de Thann-Cernay. « L’idée est de donner aux parents les outils pour « entrer » en lecture avec leurs enfants. »
Lilia Fezzeu a ainsi découvert les livres pop-up qu’elle ne connaissait pas, ces ouvrages également désignés sous le terme d’« animés », dont les illustrations sont mobiles. « Ma fille et moi sommes tombés amoureuses de l’album La Maison hantée de Jan Pienkowski, c’est vraiment notre gros coup de cœur ! [un grand classique paru en 1979 qui a marqué plusieurs générations de lecteurs, NDLR] »
Jouer avec les livres
La jeune maman souhaitait transmettre son amour de la lecture à ses enfants, sans trop savoir comment s’y prendre. « À travers les ateliers auxquels j’ai participé, j’ai appris à m’approprier les albums, à les manipuler, à les choisir et à jouer avec. » Chaque atelier abordait une typologie différente d’ouvrages (pop-up, imagiers et abécédaires, histoires tout en images, livres-jeux, comptines et berceuses…), dressant un panorama quasi exhaustif de toutes les façons d’aborder la lecture.
« Les mamans ont elles-mêmes utilisé le livre comme support de jeu. C’était très émouvant de voir leur émerveillement, de les observer en train de retrouver l’enfant qui est en elle, de voir émerger leurs souvenirs de la petite enfance. Elles ont fait sauter les verrous, se sont autorisées à lâcher prise », relate Aïcha Bouafia.
Les livres « CLAP » ont notamment été utilisés, qui incitent le lecteur à lire avec son corps en imitant les attitudes et les actions des personnages, un plaisir aussi physique que cérébral.
Lire « avec » plutôt que « pour »
Maman de deux garçons de 4 et 5 ans, Célia Acha, d’Aspach-le-Haut, qui est entrée pour la première fois dans une médiathèque grâce à « Des livres à soi », a aussi appréhendé la différence entre « lire pour » et « lire avec » son enfant. « Souvent, on lit « pour », de façon un peu mécanique, sans incarnation, sans intonation. Aujourd’hui, j’interprète et j’apprécie beaucoup plus ces moments d’échanges avec mes enfants qui sont devenus des moments de qualité pendant lesquels je leur accorde une attention totale. » « Quand on « lit avec », l’adulte et l’enfant sont sur le même plan, on abolit la hiérarchie, les barrières entre celui qui lit et celui qui écoute », souligne Aïcha Bouafia.