Après avoir renforcé début mai les contrôles à ses frontières, le nouveau gouvernement allemand poursuit sa politique de lutte contre l’immigration illégale. Mercredi 25 juin, le ministre des affaires étrangères, Johann Wadephul, a confirmé la fin des financements fédéraux pour dix associations venant au secours des migrants en Méditerranée, comme Sea-Eye, SOS Méditerranée ou la communauté de Sant’Egidio.

Depuis 2022, sous l’impulsion de la précédente ministre écologiste des affaires étrangères, Annalena Baerbock, Berlin leur versait une enveloppe globale de 2 millions d’euros par an. Depuis mai et l’arrivée au pouvoir du gouvernement mené par la droite chrétienne-démocrate et les sociaux-démocrates, ces versements sont suspendus. Seulement 900 000 € leur ont été versés en début d’année.

Les ONG craignent une augmentation du nombre de morts

Les chrétiens-démocrates et l’extrême droite sont tous deux très opposés à cette aide, estimant que les secours apportés par les ONG encouragent l’immigration illégale et facilitent le travail des passeurs. « Je ne pense pas que ce soit la tâche du ministère des affaires étrangères d’utiliser des fonds pour cette forme de sauvetage en mer », a jugé Johann Wadephul. Il dit vouloir travailler plutôt « sur l’origine » de l’immigration illégale, et la limiter « par des moyens diplomatiques ».

Pour les associations en question, cette décision, même si elle était prévisible, est une « erreur fatale ». « Depuis dix ans, nous comblons le vide laissé en Méditerranée par les États européens », commente Gorden Isler, président de Sea-Eye. « Le soutien financier de l’État a permis à Sea-Eye de mener des missions supplémentaires et de sauver des vies humaines. Mais désormais il est à craindre que nous devions rester au port malgré des situations de détresse. » Pour ces ONG, la suppression de cette aide ne « réduira pas le nombre de migrants » mais fera « augmenter celui des morts ».

Du côté des Églises, catholique et protestantes, qui ont apporté un soutien financier à ces ONG via certains de leurs diocèses, on attend de voir si les députés valideront cette mesure lors du vote des budgets 2025 et 2026. « Cette décision du gouvernement fédéral contraint la société civile à assumer seule le sauvetage de vies humaines », regrette Katherine Braun, chargée de mission pour la migration et les droits de l’homme auprès de l’Église protestante du Nord. En dix ans, les 21 ONG actives en Méditerranée auraient permis de sauver 175 000 personnes.

Restrictions sur le regroupement familial

Autre mesure adoptée ce vendredi par le Bundestag, la suspension pour deux ans du regroupement familial pour les réfugiés bénéficiant d’un statut dit « de protection subsidiaire », qui donne un droit de séjour mais qui est moins protecteur que le statut de réfugié. Depuis 2018, l’Allemagne limitait déjà à 12 000 le nombre de visas pour regroupement familial délivré à des proches de personnes ayant la protection subsidiaire en Allemagne.

Devant le Bundestag, le ministre chrétien-social de l’intérieur, Alexander Dobrindt, a justifié cela en expliquant que les migrants concernés ne peuvent bénéficier des mêmes droits que les réfugiés. « Et pourtant ils prennent la route de l’Allemagne. Cela a un effet d’entraînement et cela doit cesser », a-t-il lancé, en disant agir pour le « retour de l’ordre ».

Le texte est soutenu par l’extrême droite mais critiqué par les écologistes, la gauche radicale et les organisations chrétiennes comme Caritas. « La famille est essentielle pour l’intégration », a rappelé vendredi l’élu Vert Marcel Emmerich.