Parfaites incarnations de leurs clubs respectifs, les deux ouvreurs vont une fois encore s’affronter dans un match de phase de finale, avant de passer sur la table d’opération pour soigner des genoux récalcitrants.
Le sujet était aussi évident qu’inéluctable : de par leur poste, les rôles prépondérants qu’ils vont jouer dans cette finale et l’incarnation de leurs clubs respectifs, il fallait traiter (et opposer) le Toulousain Romain Ntamack et le Girondin Matthieu Jalibert. Comment ne pas le faire ? Après tout, Fabien Galthié a bien essayé de les associer. C’était en novembre 2021, lors d’une tournée d’automne. La formule « Jalimack » (Jalibert en 10, Ntamack en 12) avait été testée face à l’Argentine (29-20), puis reconduite contre la Géorgie (41-15) la semaine suivante et malgré deux victoires, l’association avait été abandonnée pour l’ultime test contre les All Blacks, « NTK » reprenant les commandes avec Jonathan Danty à ses côtés pour broyer du Kiwi (victoire 40-25).
Même les Néo-Zélandais n’ont pas un débat aussi vif autour de Beauden Barrett et Damian McKenzie. Pour la simple et bonne raison que Scott Robertson peut les aligner de concert sur le terrain grâce à leur polyvalence 10-15. Entre Ntamack et Jalibert, c’est impossible. Il faut choisir. Car Jalibert abhorre le poste d’arrière, et que ces deux joueurs sont calibrés pour être au centre du jeu. Mais pour une fois, on peut dire qu’ils ont un point commun : tous deux vont disputer une finale avant de passer sur la table d’opération pour soigner un genou. De l’extérieur, il semble évident que le cas du Toulousain est légèrement plus grave que celui du Girondin, qui marche littéralement sur l’eau en cette fin de saison quand Ntamack, lui, s’accroche depuis des mois : « Oui, je m’accroche. Il est vrai que, depuis le début de saison, c’est quand même un point qui m’a handicapé… Depuis septembre, j’ai essayé de m’accrocher. J’ai fait infiltration sur infiltration pour justement ne pas me faire opérer et être opérationnel. Et sur cette fin de saison, je me sens plutôt bien. L’infiltration fait plutôt effet, donc ça ne m’embête pas trop. Il reste un dernier match, je vais encore serrer les dents et je me ferai opérer après. »
Comment les rôles ont été inversés
Un an après la dernière finale de Top 14 qui avait viré à l’humiliation pour les Girondins (59-3), il est drôle de constater que les rôles se sont donc inversés : alors gêné par une blessure à la cuisse, Jalibert avait traversé la finale 2024 comme un fantôme tandis que Ntamack était en pleine possession de ses moyens. Qui ne se souvient pas de cette merveille de passe au pied tapée à l’aveugle pour son coéquipier Thomas Ramos qui marqua ? Bien sûr, cette confrontation était trop déséquilibrée pour être parlante. Mais si l’on retrace l’histoire de leurs dernières oppositions, cela devient plus intéressant. La dernière fois que les deux ouvreurs s’étaient affrontés lors d’un match de phase finale, c’était en demi-finale de Champions Cup que l’UBB avait remporté avec autorité sur le score sans appel de 35 à 18. Ce jour-là, Matthieu Jalibert était en feu. Mais Romain Ntamack, malgré certaines critiques, avait tout de même signé une prestation solide.
Six mois avant, le 29 septembre 2024, Jalibert avait également remporté son duel face au Toulousain et avait guidé les siens vers une courte mais précieuse victoire à Ernest-Wallon (12-16). Si l’on remonte plus loin, on tombe sur l’année 2021 où les NTK et Jalibert s’étaient affrontés sur deux demi-finales, Champions Cup et Top 14, toutes deux remportées par les Haut-Garonnais et accessoirement dominées par Ntamack. On se souvient notamment que le Toulousain, en l’absence de Thomas Ramos, avait même assuré l’intérim dans les tirs au but pour inscrire 11 points (victoire 21-9) en demi-finale de Coupe d’Europe. Quelques mois plus tard, il avait intercepté une passe girondine dès la 5e minute ce qui lança parfaitement les Toulousains dans une rencontre finalement très disputée (24-21). Bref, ces deux-là n’ont pas fini de se challenger, et nous n’avons pas fini de les opposer. Samedi soir, au Stade de France, ils écriront une nouvelle page de leur saine rivalité.