Un accident mortel de la circulation impliquant une seule voiture s’est produit ce vendredi 11 avril vers 19 h 40, sur la D712 (vieille route entre Landivisiau et Landerneau), à hauteur du lieu-dit Kerfaven, à Saint-Servais (29). Malgré l’intervention d’un infirmier libéral arrivé sur place peu de temps après l’accident (il a tenté un massage cardiaque), puis celle des pompiers de Landivisiau et du SAMU de Morlaix, le conducteur, seul à bord, est décédé. Il s’agit d’Alain Roué, P.-D.G du groupe Océlorn, spécialiste breton du transport de voyageurs basé à Landivisiau. Il avait 60 ans. Son corps va être autopsié et son véhicule expertisé pour comprendre les circonstances de l’accident. Selon les premiers éléments de l’enquête, il aurait fait un tout droit dans un virage.
Dans les cars depuis ses 21 ans
Capitaine d’industrie talentueux, Alain Roué avait pris les rênes de l’affaire familiale en 1985, à seulement 21 ans. La société Les Cars de L’Élorn avait été créée 17 ans plus tôt par ses parents Albert et Odette, qui tenaient la station essence de l’Élorn, sous l’enseigne BP, en bas de l’avenue Foch, à Landivisiau. À l’époque, son père, pour arrondir les fins de mois, était chauffeur de car. Il faisait la ligne Landivisiau Saint-Pol-de-Léon pour les transports de voyageurs Becam, qu’il a fini par racheter. « Mes parents avaient 30 ans. Ils ont dû trouver 50 000 F, c’était beaucoup d’argent. Et BP leur a imposé de choisir entre les cars et la station », racontait Alain dans nos colonnes, il y a près d’un an.
Héritier de ces deux tempéraments forts, Alain Roué a toujours voulu marcher dans les pas de son père. Il avait commencé comme mécanicien dans l’entreprise, en attendant de passer son permis. Sa licence de transport en poche, le mordu de sport de haut niveau qu’il était (notamment de football et du Stade Brestois) avait vite compris qu’il devait développer sa croissance externe, rachetant d’autres entreprises à tour de bras, réunies au sein du groupe Océlorn, dont il était devenu P.-D.G. en 1996. « Si je n’avais pas eu la capacité de répondre aux appels d’offres, c’en était fini des Cars de l’Élorn. Et puis, je rêvais d’acquérir de jolis cars », expliquait-il l’an passé.
On le sait moins mais Alain Roué était aussi un passionné de peinture. Il pose ici dans son bureau, devant une de ses acryliques qu’il signait Alan Roye, parce que c’est ainsi que son nom était prononcé quand il se déplaçait à l’international. (CLAUDIE POIRIER)Un homme très respecté
Très respecté dans le milieu, Alain Roué avait fait d’Océlorn la première entreprise régionale de transport de voyageurs, figurant dans le Top 10 national avec ses 650 collaborateurs et son parc de 620 véhicules : minibus, autocars et autobus répartis dans le Finistère, les Côtes-d’Armor et le Morbihan. En près de vingt ans, le chiffre d’affaires d’Océlorn avait été multiplié par huit : de 5 M€ en 2004, à 18 M€ en 2014, pour atteindre 40 M€ en 2023.
Nommé au prix national des dirigeants audacieux, il avait reçu le Prix des meilleurs opérateurs de l’année en 2018. « Grâce à une équipe dont certains me suivent depuis le début. C’est mon héritage du football, on ne gagne jamais seul », rappelait sans cesse l’ancien président de la fédération nationale des transporteurs de voyageurs.
Pluie d’hommages
L’annonce de son décès a suscité une vague d’émotion dans son fief de Landivisiau. Et au-delà. Maël de Calan, président du conseil départemental, la députée Graziella Melchior ou encore la maire de la cité du cheval, Laurence Claisse, lui ont rendu hommage ce samedi. De même que ses amis Jean-Paul Chapalain, président de la délégation morlaisienne de la CCI du Finistère, et Denis Le Saint, président du Stade Brestois. Ils sont unanimes : Alain Roué était un « mec bien », un « entrepreneur engagé » qui « vivait sa région ». « Son décès est une grosse perte pour le territoire ».