Publié le
28 juin 2025 à 15h32
Les Archives Départementales de Seine-Maritime proposent une exposition tous les deux ans. Cette année, le sujet est enivrant : « l’Histoire de l’alcool pour éclairer l’évolution du rapport à la boisson dans la société ». Elle se tient jusqu’au 10 octobre 2025, à la Tour des Archives de Rouen (Seine-Maritime).
L’alcool, une tradition en Normandie
Pour Sylvère Dumont, commissaire d’exposition, « raconter l’histoire de l’alcool, c’est croiser une tradition très ancienne sur notre territoire, la dimension économique et commerciale et les enjeux de santé publique qui se sont fait jour progressivement. De la fabrication monastique à la lutte contre l’alcoolisme, en passant par l’essor des distilleries et des cafés, dans les villes et villages, ce territoire normand a vu son rapport à l’alcool évoluer au fil des siècles ».
On trouve les premières mentions de boissons alcoolisées dès le Moyen-Âge dans les archives des abbayes productrices de bière, cidre, d’élixirs aux recettes complexes (Bénédictine de Fécamp XVIe) et même de vin, pas uniquement pour la célébration de la messe ! La diffusion de ces productions se fait par les moines eux-mêmes et par les ouvriers agricoles qu’ils emploient. Dès le XVe siècle en Normandie, dans les vastes vergers, on développe la production du cidre qui devient une boisson courante.
Course des garçons de café à Rouen 1930 (©Photos fournies par les Archives Départementales. )
« Le cidre normand, apprécié pour sa légèreté et son goût fruité, est un élément fondamental de l’économie agricole locale. À côté du cidre, le calvados, une eau-de-vie obtenue par distillation de pommes fermentées, s’impose comme un produit phare de la région » note Sylvère Dumont.
De l’alcool roi à l’alcool décrié
C’est au XIXe siècle que la Seine-Inférieure voit se développer les produits distillés. Les bouilleurs de cru sont de plus en plus nombreux. Ils distillent eux-mêmes. La règlementation permet à certains de distiller sans payer les taxes. Ce qui contribue à la prolifération de productions artisanales à base de pommes principalement et dont on retrouve la trace à travers les déclarations des distillateurs itinérants.
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Intervient alors la lutte contre la contrebande et la production clandestine, visant à échapper au fisc avec en arrière-plan la problématique de l’alcool frelaté souvent coupé avec des substances toxiques.
L’exposition compte 70 documents du fonds des Archives Départementales (©Photos fournies par les Archives Départementales.)
L’avènement des grandes marques d’alcool par la publicité intervient au cours de la seconde moitié du XIXe siècle (ex. Bénédictine de Fécamp, Calvados Boulard d’Yvetot…) Le « trou normand » : calvados servi entre deux plats pour faciliter la digestion, s’ancre dans les habitudes alimentaires locales, comme plus tard le pommeau et le poiré en apéritif. Le « trou normand » est un élément incontournable de la gastronomie normande, à table, aujourd’hui encore dans les foyers, les restaurants et les bars. L’alcool trouve aussi sa place dans la médecine et l’industrie comme solvant, désinfectant, carburant…
C’est au XIXe que la médecine commence à tirer la sonnette d’alarme et met en évidence les méfaits de l’alcoolisme dans tous les milieux.
L’exposition présentée à la Tour comporte 70 documents du fonds des Archives Départementales : photos, rapports, factures, affiches publicitaires des années 1910 à 1940, plans de construction de bâtiments en rapport avec l’alcool, quelques pièces de fonds privés et une exceptionnelle contribution de La Bénédictine de Fécamp. Le plus ancien document date du 13ème siècle. Pas de dégustation prévue !
Tour des Archives Départementales, entrée principale de l’Hôtel du département, Quai Jean Moulin, Rouen. Lundi, mardi et mercredi de 8h45 à 17h jusqu’au 10 octobre avant deux ans de gros travaux dans la Tour.
De notre correspondant André Morelle
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