Dans un contexte de pénurie croissante de main-d’œuvre, l’Allemagne cherche à séduire davantage de travailleurs qualifiés venus de l’étranger. Mais selon un article de Die Welt, l’accueil et l’intégration des expatriés sont bien moins fluides que ce que les discours politiques laissent entendre.
La ministre du Travail, Bärbel Bas, récemment nommée, promet une réforme ambitieuse : la création d’une Super-Agentur (“Super-Agence”) qui regrouperait toutes les étapes administratives liées à la migration de travail au sein d’une seule entité. Objectif : accélérer les procédures, réduire la paperasse et rendre l’Allemagne plus attractive. “Avec une agence numérisée pour les travailleurs qualifiés, nous garantirons plus de rapidité et moins de bureaucratie”, a-t-elle annoncé devant le Bundestag.
De un à trois ans pour aller travailler en Allemagne
Mais la tâche s’annonce colossale. Actuellement, les démarches pour un expatrié souhaitant travailler en Allemagne impliquent jusqu’à sept autorités différentes et peuvent durer de un à trois ans. Résultat : “La moitié de ceux qui souhaitent travailler en Allemagne abandonne finalement leurs projets et cherche une alternative”, rappelle le quotidien en citant une étude de l’OCDE.
L’idée d’une Super-Agence n’est pas nouvelle. Une étude de faisabilité menée lors de la précédente législature faisait déjà observer les avantages d’un tel guichet unique. “Pour les immigrants, cela est particulièrement intuitif et transparent, parce que toutes les autorités pertinentes sont regroupées sous un même toit”, soulignent ses auteurs. Mais elle avertissait aussi que créer une nouvelle structure de toutes pièces serait coûteux, risqué et mettrait des années à se concrétiser.
En parallèle, l’Allemagne attire un nombre record d’étudiants étrangers – près de 500 000 –, mais elle peine à les retenir. En effet, leur visa ne leur permet pas de rester pour travailler après leurs études, sauf à obtenir un contrat et à recommencer un lourd processus administratif. “Les politiciens se plaignent de la pénurie de travailleurs qualifiés, mais ils ont créé des obstacles qui entravent l’arrivée sur le marché du travail”, dénonce Christoph Meinel, fondateur d’une université numérique privée à Potsdam qui tente de combler ce vide structurel.
Malgré les annonces, le budget fédéral ne prévoit aucun financement pour cette nouvelle Super-Agence. Et les signaux politiques restent ambigus : la limitation récente de l’immigration en provenance des Balkans entre en contradiction avec les objectifs affichés. Pour les expatriés, la promesse d’une Allemagne ouverte, efficace et accueillante reste donc, pour l’heure, largement théorique, se désole Die Welt.