Par
Rédaction Paris
Publié le
29 juin 2025 à 6h26
Un désaveu pour Réseau Vivre Paris ! (ARVP) sur le front des nuisances sonores liées aux terrasses. L’association voulait en effet qu’il soit fait « injonction » à la Ville de Paris et à l’État de « créer un numéro dédié au signalement de cette pollution et ces entraves à la circulation piétonne à toute heure ».
Elle réclamait aussi la mise en place de « davantage » de « capteurs d’émergences sonores », l’organisation des « interventions en temps réel » et des « contrôles à toute heure » ou encore l’octroi de « 250 000 euros» de subventions à l’association Bruitparif, qui gère l’Observatoire du bruit en Île-de-France. Mais ce n’est pas tout.
Une « carence dans l’exercice des pouvoirs de police »
L’ARVP – qui milite pour la suppression pure et simple des « terrasses éphémères estivales » – voulait au passage « établir un bilan des subventions à l’économie de la nuit » pour qu’elles soient « équilibrées avec le financement de la protection des habitants ». Elle appelait enfin à « interdire le cumul des mandats des élus propre à générer un conflit d’intérêts » : les autorités ont commis « une carence » dans l’exercice de leurs pouvoirs de police en n’agissant pas face au « trouble généralisé » que créent ces terrasses de plus en plus nombreuses.
« Le nombre de terrasses de cafés et restaurants a considérablement augmenté ces dernières années », précisément de « 25 % », détaillait-elle dans sa requête auprès du tribunal administratif de Paris : elles sont passées de « 8 000 en 2017 » à « 12 000 en 2021 » – et cela « sans compter » les terrasses éphémères. Des « nuisances sonores » se concentrent ainsi dans « huit quartiers animés » : Les Halles, les Enfants-Rouges, la place Sainte-Catherine, le canal Saint-Martin, le Quai de la Râpée et le Quai d’Austerlitz, le Port de la Gare, la Butte aux Cailles et le bassin de la Villette.
Les autorités n’ayant pas répondu à ses courriers, un « rejet implicite » de ses demandes est juridiquement « né », a estimé Réseau Vivre Paris !. En saisissant la justice administrative, elle visait à faire annuler ces « décisions », mais aussi obtenir la condamnation de la Ville et de la préfecture à lui verser « 20 000 euros» de dédommagements.
L’association réclamait 200 000 euros
« L’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que les personnes privées concourent à une politique dont l’objectif est la mise en œuvre du droit reconnu à chacun de vivre dans un environnement sonore sain », fixe en fait le Code de l’environnement.
Cependant, « en l’absence d’obligation précisément déterminée ou chiffrée par le législateur, la demande des requérants tend en réalité à la détermination d’une politique publique en matière de nuisances sonores », reformule le tribunal dans un jugement en date du 8 avril 2025, qui vient d’être rendu public. Or, « en l’absence d’obligation suffisamment précise et contraignante » imposée au préfet de Police et à la maire de Paris, leurs premières conclusions doivent « sous ce premier angle » être rejetées, considère-t-il.
Il restait donc aux juges à établir si Laurent Nuñez et Anne Hidalgo (PS), préfet avaient fait preuve de « carence » dans l’exercice de leur « pouvoir de police administrative ».
Ces nuisances ressortent des rapports établis par l’association Bruitparif, des études du collectif Droit au sommeil et du nombre de signalements effectués par l’intermédiaire de l’application Dans ma Rue. Toutefois, la requérante ne verse pas de pièce permettant d’établir que les nuisances seraient généralisées, excessives et s’étendraient à l’ensemble de la ville.
Tribunal administratif de Paris
Le bruit routier également responsable
D’ailleurs, « dans ses écritures, la requérante fait elle-même état d’un manque de données collectées », souligne le tribunal administratif de Paris. Et les photographies versées au dossier ne sont « ni datées ni localisées », tandis que les constats d’huissier produits au dossier sont « anciens ». « Le bruit routier est également une cause importante des nuisances sonores à Paris », rappellent au demeurant les juges.
La maire a par ailleurs « élaboré un nouvel arrêté », le 11 juin 2021, relèvent-ils, pour « remédier aux nuisances » des restaurants et débits de boissons » : il interdit l’exploitation des terrasses estivales « après 22 heures », l’échelle des sanctions a été « revue » et de « nombreux contrôles et sanctions » sont intervenus.
« La croissance des verbalisations réalisées par la police municipale est notable […] entre 2016 et 2022», puisqu’elle est de « 57 % », avait d’ailleurs souligné un rapport rendu en 2024 par la Chambre régionale des comptes (CRC) d’Île-de-France. Et si ce rapport faisait état du « caractère peu dissuasif » des contraventions pénales, le relèvement des montants des amendes est « du ressort du législateur » et non pas d’Anne Hidalgo, rappellent les juges.
La Ville a par ailleurs mis en place un Plan d’amélioration de l’environnement sonore (PAES) pour la période 2022-2026, « des chartes locales » et « un Conseil de la Nuit » depuis 2004. Dans ces conditions aucune « carence » ne peut donc être reprochée à la maire, estiment les juges.
Des fermetures administratives pour des cas exceptionnels
S’agissant du préfet, dans la mesure où les nuisances ne sont pas « excessives » et étendues à la ville de Paris, la « seule existence de nuisances sonores résultant de la fréquentation de certains restaurants ou débits de boissons » n’est « pas de nature à caractériser un trouble suffisamment grave et excessif » qui devait le conduire à « prendre des mesures supplémentaires ». En tout état de cause, ses compétences ne lui permettent pas de « prendre une mesure d’ordre général à l’échelle de la Ville », rappellent les magistrats.
« Seuls des cas exceptionnels de fermetures administratives par la préfecture de Police sont établis », commentent au passage les juges parisiens. « La Direction de la police municipale et de la prévention (DPMP) [de la Ville de] a indiqué avoir parfois demandé à la préfecture de procéder à la fermeture administrative d’un établissement en raison de nuisances sonores répétées […]. Cette dernière donne rarement suite à ces demandes et le nombre de cas où cela s’est présenté n’a pas pu être précisé. »
Laurent Nuñez n’a en effet « pas répondu » à la mesure d’instruction diligentée dans le cadre de ce procès par le tribunal administratif de Paris : il lui avait demandé « des données actualisées » en matière de « verbalisations »… La Ville et le Réseau Vivre Paris ! avaient, eux, « produit des pièces » pour compléter leurs argumentaires respectifs.
L’ARPV a donc au final été condamnée à verser 1 500 euros à la Ville de Paris pour ses frais de justice. Mais l’association semble ne pas vouloir s’arrêter là : sur son site Internet, le 15 juin 2025, elle a publié un communiqué signé par « une quarantaine d’associations de riverains » pour dénoncer les « mensonges » de la mairie quant aux terrasses estivales.
/CB (PressPepper)
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