«Le pilote a utilisé toutes ses armes de bord et a abattu sept cibles aériennes. En abattant la dernière, son appareil a été endommagé et a commencé à perdre de l’altitude», selon l’armée de l’air ukrainienne.

Loin des remous d’Orient, l’Ukraine résiste encore à l’envahisseur russe qui poursuit son agression. Dans la nuit, la Russie a tiré près de cinq cents engins volants, dont des missiles balistiques et de croisières. «Pour repousser l’attaque massive, tous les moyens disponibles des forces de défense capables d’opérer sur les moyens aériens ennemis ont été déployés», a expliqué, ce matin, l’armée ukrainienne. Un avion de combat F-16 et son pilote sont morts au combat dans la nuit. «Le pilote a utilisé toutes ses armes de bord et a abattu sept cibles aériennes. En abattant la dernière, son appareil a été endommagé et a commencé à perdre de l’altitude», selon l’armée de l’air. Il n’a pas eu le temps de s’éjecter. L’Ukraine perd, officiellement, son troisième F-16, un avion de combat multirôle américain, demandé de longue date. Il est le plus utilisé à travers le monde, avec 3200 exemplaires en service.

L’aviation, dès les premiers mois de l’invasion à grande échelle lancée par le Kremlin le 24 février 2022, n’a pas eu de grand rôle. Des bombardements sont intervenus, mais ils sont rares, tant les défenses aériennes sont présentes de part et d’autre. En sus, la Russie possède suffisamment de drones et de missiles à longue portée pour économiser le coût que représenterait la perte d’un appareil. L’Ukraine, elle, ne possédait qu’une faible flotte aérienne. Elle s’est tournée vers ses alliés occidentaux pour obtenir des avions, soit d’origines soviétiques, soit plus modernes. Quatre-vingts F-16 lui ont été promis par ses alliés, dont la Belgique, le Danemark, la Norvège et les Pays-Bas. Leur livraison a débuté en 2024, mais a nécessité au préalable une formation des pilotes ukrainiens sur ces appareils. En effet, la plupart d’entre eux est habituée aux avions soviétiques.

Premier Su-35 abattu par un F-16

Ces avions ont pu créer de véritables surprises tactiques. Le 7 juin dernier, comme rapporté par le journal allemand Bild, un F-16 ukrainien a abattu un chasseur russe de type Su-35, au-dessus de l’oblast de Koursk en Russie. Un évènement qualifié «d’historique» par les autorités ukrainiennes. En effet, le F-16 a été conçu pendant la Guerre Froide afin de faire face au soviétique Su-27, mais non pour combattre son successeur Su-35, plus moderne. L’avion russe, selon le récit de Bild, a été détecté à près de 200 kilomètres par un avion de reconnaissance 340AEW Erieye, du suédois Saab. Il a ensuite été «traité» par le F-16 qui a tiré un missile AIM-120, d’une portée d’environ 50 kilomètres. Le pilote a pu s’éjecter, selon les autorités russes, avant que son avion ne s’écrase à proximité de Korenewo, à seize kilomètres de la frontière ukrainienne. «Ce serait la première fois qu’un Viper ukrainien (F-16) abat un avion en combat aérien. Mais, plus remarquable encore : il aurait été abattu par une version F-16AM néerlandaise déclassée – un modèle que beaucoup considéraient déjà comme obsolète», a commandé le compte Air Power, connu pour son expertise aéronautique, sur X.

En août dernier, l’Ukraine avait annoncé la perte de son premier F-16. Il avait été touché alors qu’il repoussait une attaque de missiles russes, comme celui abattu cette nuit. Son pilote, formé aux Etats-Unis, avait perdu la vie. En avril, la Russie avait revendiqué avoir détruit un second F-16, sans que l’Ukraine ne confirme la véracité de l’information. Elle a, toutefois, annoncé la mort d’un pilote de F-16 quelques semaines plus tard, semblant indiqué qu’un autre F-16 avait bel et bien été abattu.

La livraison d’avions de combat par l’Occident avait créé d’énormes débats au sein des chancelleries occidentales. Certaines redoutant une «escalade» ou même d’être considérés comme «co-belligérants» par la Russie et donc, de facto, comme partie au conflit. Les États-Unis, malgré leur très grande réticence, avaient finalement ouvert la voie le 19 mai 2023. Quelques mois plus tard, Joe Biden avait autorisé l’envoi de missiles à longue portée ATACM-S à l’Ukraine, franchissant la dernière étape de gradation dans la qualité du matériel militaire livré. Depuis les premiers jours de l’invasion à grande échelle, les Occidentaux n’ont cessé d’osciller entre livraison de matériel toujours plus sophistiqué et crainte de voir la Russie s’en offusquer et créer des représailles. Finalement, après avoir donné «du matériel défensif», puis des missiles de courte portée, des munitions, des blindés, des chars, des avions, l’Occident a livré des missiles à longue portée.

L’Ukraine, malgré tous ces matériels de pointe, livrés certes en quantité limitée, n’a de cesse de reculer depuis l’été dernier. Elle fait face à une pénurie de soldats, refusant d’abaisser l’âge de la conscription. Des scènes d’enrôlements forcés dans la rue ont miné le moral de la population et donné du grain à moudre à la propagande russe, trop heureuse de se venger des images de sa propre «mobilisation partielle» qui avait une partie de sa jeunesse fuir vers les pays adjacents en 2023. L’armée russe prend l’avantage et poursuit une avancée modeste mais réelle, surtout dans le Donbass. Donald Trump, depuis son retour à la Maison-Blanche le 20 janvier dernier, avait assuré vouloir régler le conflit en «100 jours», sans y parvenir. Vladimir Poutine, pour sa part, a fait connaître ses conditions pour mettre fin à la guerre : reconnaissance de ses conquêtes de cinq oblasts ukrainiens, interdiction faite à l’Ukraine de rejoindre l’Otan, limitation de son armée, fin de l’aide étrangère, militaire et de renseignement, ainsi que la levée des sanctions.