Depuis son arrivée en Gironde à l’été 2023, Yannick Bru, le manager de l’UBB, évoque fréquemment la construction patiente de son équipe et les étapes qu’elle nécessite. La première année avait été récompensée d’une première finale de Top 14, avec le scénario cruel que l’on sait (déroute contre Toulouse 59-3), et la seconde, achevée samedi, sur une nouvelle désillusion (défaite 39-33 a.p.) contre le même Toulouse, aura confirmé la marche en avant de Bordeaux-Bègles.
La douleur était encore présente dans les entrailles du Stade de France, Maxime Lucu évoquait les larmes versées parce que c’était « dur de se dire que le Brennus était de l’autre côté pour six petits points », mais son entraîneur, lui, trouvait la force de s’extirper du moment présent. « Le cheminement qu’on a emprunté est intéressant, insistait Bru. Dans la vie, quand on prend des gamelles, se relever, discuter, comprendre pourquoi, et arriver à resprinter, c’est bien. L’année qu’on a vécue est assez incroyable. L’équipe a grandi dans plein de secteurs, on n’a pas perdu notre temps. »
« Pour battre Toulouse en finale du Championnat, il faut un petit peu plus »
Yannick Bru, manager de Bordeaux-Bègles
Le point d’orgue aura été la Coupe des champions, remportée en mai à Cardiff contre Northampton (28-20), premier titre post-fusion pour l’UBB, dans une campagne « européenne » marquée par un succès qui compte sur Toulouse, en demi-finales (35-18). Bordeaux a soulevé un premier trophée, et prouvé que le club avait su digérer la claque de la finale de Top 14 2023-2024. De jeunes leaders se sont révélés, le staff a ciblé son recrutement pour mieux gérer le temps de jeu de ses joueurs tout au long de la saison, et la récompense n’a pas tardé.
« Mais pour battre Toulouse en finale du Championnat, il faut un petit peu plus ! constatait Bru. Ça sera encore un apprentissage pour la saison prochaine. » La marge qui le sépare du triple tenant du titre, l’UBB l’a d’abord sentie sur la pelouse, samedi, dans l’art de préparer une finale. « On a été asphyxiés en début de match, admettait l’arrière Romain Buros. Ils ont préparé leur match différemment par rapport à nos autres matches contre eux cette saison. Il faut qu’on progresse là-dessus. »
Son coach, lui, regrettait un déficit de puissance comparé à Toulouse, qui a fait que son pack a souffert, sans rompre. Bordeaux-Bègles le sait depuis un moment, ses atouts-muscles sont encore trop concentrés sur certaines individualités (Tameifuna, Tatafu, Van Rensburg) et quand l’un d’entre eux manque (Coleman, blessé pour la finale), la profondeur de banc pour compenser reste insuffisante.
« Je ne sais pas si l’année prochaine on se retrouvera encore au même endroit »
Yannick Bru, manager de Toulouse
C’est pour cela que l’UBB a cherché à renforcer son cinq de devant pour la saison prochaine. Un dossier a coincé, celui du pilier droit bayonnais Tatafu, mais le pack va recevoir cinq renforts de poids : deux Racingmen, Boris Palu (29 ans, 1,93 m, 113 kg) et Cameron Woki (26 ans, 1,96 m, 110 kg), le Castrais Gaëtan Barlot (28 ans, 1,84 m, 107 kg), le pilier dacquois Louis Mary (25 ans, 1,85 m, 125 kg) et le solide et polyvalent Jean-Luc du Preez (29 ans, 1,94 m, 114 kg), qui vient de retrouver les Springboks. Derrière, le jeune ailier basque Xan Mousquès (19 ans), le Néo-zélandais Salesi Rayasi, qui s’est bien adapté au Top 14 à Vannes, et le demi de mêlée international italien Martin Page-Relo, renforceront une ligne de trois-quarts qui a carburé cette saison.
« Il y aura un temps pour analyser cette finale, reprenait Bru. On va se remettre au travail pour aller enfin chercher ce trophée, mais on n’a aucune garantie, il faut du travail, du talent, mais aussi une part de réussite… Et je ne sais pas si l’année prochaine, en travaillant mieux, on se retrouvera encore au même endroit. C’est ça qui est râlant ! » Parce qu’on a beau imaginer des lendemains qui pourraient chanter, le coach, lui, savait que ce n’était pas une raison pour s’empêcher de profiter du moment présent.