Par
Joel Nandjui
Publié le
30 juin 2025 à 6h28
Dans le square Samuel-Rousseau, au pied de la basilique Sainte-Clotilde à Paris (7e), les parents surveillent, assis sur les bancs, les courses folles de leurs enfants. Juste en face de ce petit jardin, la porte du 10 rue, Saint-Dominique, restée ouverte, est le théâtre d’un va-et-vient constant de ses habitants.
L’ancienne adresse de l’état-major des armées n’accueille plus d’hommes ou de femmes en uniforme, mais des familles et des couples dans les 254 logements sociaux qui y ont été construits, puis investis il y a bientôt deux ans. Un projet de reconversion urbaine qui veut créer de la mixité sociale dans ce très chic arrondissement, qui ne compte que 4 % de logements sociaux.
« Il ne faut pas venir habiter ici si on n’a pas envie de mixité »
Sandrine fait partie des premiers locataires à avoir pris possession des appartements, dès septembre 2023. « J’ai quitté Nîmes [Gard] pour venir habiter ici », confie-t-elle. Le calme de l’endroit et la grande mixité des habitants de ce qu’on a appelé l’îlot Saint-Germain l’ont marquée. « C’est très différent de ce que j’ai connu dans le Sud. La semaine dernière, on a organisé la première fête des voisins, il y a un vrai brassage », résume la mère d’un petit garçon.
Jeannine, sac de courses à la main, s’engouffre dans l’ouverture de la porte. Elle partage le même avis que Sandrine : « Il ne faut pas venir habiter ici si on n’a pas envie de mixité. Il y a une mixité de tout », s’exclame la retraitée de 77 ans. Un constat que confirme Élisa, la gardienne de l’un des immeubles du complexe. « Il y a toutes les classes sociales et, parfois, des locataires du 115 », révèle-t-elle.
Situé à deux pas de la Seine, de l’Assemblée nationale et des Invalides, l’ensemble d’habitations offre un cadre de vie unique. Jeannine, qui a attendu dix-sept ans pour avoir un nouveau logement social, ne cache pas sa joie : « On a la chance de vivre dans le plus beau quartier de la capitale », s’enthousiasme-t-elle. L’offre de logements y est variée, avec des T1, des T2 et, parfois, des T4 à des prix impossibles à trouver dans le parc privé. « Pour un T4, la mensualité est à 1 000 euros, mais, avec les aides pour les enfants, on paie 800 euros », confie Guy, père de trois marmailles. Jean-Marc, fonctionnaire à la DGFIP, s’acquitte, lui, d’un loyer de 800 euros pour son T2 : « À ce prix-là, et avec un bail de neuf ans renouvelable, on peut se projeter dans le temps », assure-t-il.
Un panier de courses au montant exorbitant
La vie dans ce quartier peut toutefois être compliquée. « Ici, il n’y a pas de commerce de proximité et, quand il y en a, les prix sont exorbitants », s’offusque Élisa, qui préfère faire ses courses dans le 14ᵉ arrondissement ou se faire livrer. L’épicerie située à peine 100 mètres plus rien ne sert que pour les courses d’appoint.
Les travaux de construction d’un hôtel de luxe juste à côté sont, eux aussi, source de nuisances pour les résidents des appartements : « Le bruit et la poussière nous incommodent beaucoup », soupire une habitante. C’est en 2020 que le chantier de la partie centrale de l’îlot Saint-Germain a commencé, avec la RIVP (Régie immobilière de la Ville de Paris) comme maître d’ouvrage. Outre les logements, le nouvel équipement propose également une crèche, un gymnase et un jardin sur les toits. Dans la partie est de l’îlot, l’hôtel de luxe proposera 101 chambres et suites, et 23 résidences privées. L’ouverture de ce nouvel établissement est prévue pour l’année 2026. De quoi accentuer pour les nouveaux riverains le sentiment de vivre dans un lieu d’exception.
Si ce projet ravit ses occupants, les anciens habitants du 7ᵉ arrondissement y trouvent aussi leur compte. Le gymnase, qui profite à tous, est l’un des éléments de satisfaction du projet, tout comme la crèche qui peut accueillir 68 berceaux.
Retour au square Samuel-Rousseau. Sarah, qui habite le secteur depuis dix ans, raconte : « On a vu le changement, notamment à l’école, les enfants des nouveaux locataires s’y sont inscrits. Il y a plus d’enfants par classe. On n’a plus peur de voir des classes fermées. » Si la mère de famille est satisfaite de voir plus d’élèves dans les classes, Guy, fonctionnaire de police, est content pour sa part de savoir que ses trois enfants iront dans de « bonnes écoles ».
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