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Rédaction Nantes
Publié le
1 juil. 2025 à 17h26
La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes a refusé ce vendredi 27 juin 2025 de remettre en liberté un détenu de la maison d’arrêt de Nantes (Loire-Atlantique) placé à l’isolement depuis près de cinq mois sur la base d’un rapport « non signé » de l’administration pénitentiaire faisant état d’un projet d’évasion, un « faux en écriture publique » pour ses avocats qui ont porté plainte contre X pour ce motif.
« Je ressemble à un homme des cavernes, j’ai pris 12 kg et je prends des médicaments pour dormir », s’était pourtant plaint la veille Erba T. auprès des juges de la chambre de l’instruction à qui il avait demandé – en vain – de le remettre en liberté.
« Des conditions affreuses »
Depuis près de cinq mois, ce père de famille fait en effet l’objet d’un isolement décidé par l’administration pénitentiaire dans « des conditions affreuses ». Il l’est sur la base d’un « rapport d’incident non signé » par un surveillant qui l’aurait entendu dire à d’autres détenus en promenade « Ce n’est pas hypersécurisé, ça devrait le faire » en regardant vers le ciel.
Depuis lors, sur la base de ce rapport donc « non signé », ce Nantais de 32 ans est donc maintenu sous ce régime carcéral particulièrement restrictif car il est soupçonné de projeter une « évasion ». Mais lui soutient pour sa part n’avoir « jamais prononcé ces mots », réaffirme l’un de ses trois avocats, Me Raphaël Chiche.
Ce rapport est même « un faux en écriture publique », s’était emporté Me Ashley Keller, un autre de ses avocats, jeudi lors de l’audience publique. Les juges avaient alors trouvé sa déclaration « infamante », « voire diffamante ».
Depuis février 2025, Erba T. n’a donc « aucune interaction sociale », « le sport se fait seul » et sa promenade est cantonnée à « un carré de cour minuscule », détaillent ses avocats. Il n’a pas davantage « pu assister aux obsèques » de son père, récemment décédé. « Je ne peux même plus aller chez le psychologue, maintenant c’est lui qui vient à moi », a aussi soufflé Erba T., apparu abattu sur l’écran de visioconférence.
Un « proche » du « plus gros trafiquant de stupéfiants » de Nantes
La justice l’avait pourtant quitté plus souriant, six mois plus tôt, lorsque ce « proche » d’Issam Lahrach – réputé pour être « le plus gros trafiquant de stupéfiants » de Nantes – avait été acquitté à l’issue du procès des fusillades survenues à Nantes en avril 2019 entre bandes rivales.
Mais l’homme n’était toutefois pas ressorti libre de la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine cette nuit-là : il est mis en examen depuis près de deux ans dans une autre affaire pour « importation de stupéfiants en bande organisée » suite à la découverte de 364 kg de cocaïne dans un container de Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) en mai 2022 et la saisie de « 23 kg » supplémentaires dans les valises d’une jeune femme à l’aéroport d’Orly en septembre 2023.
S’il n’est pas mis en examen puisque réfugié au Maroc depuis plusieurs années, la justice soupçonne cette fois encore Issam Lahrach d’être à l’origine de ces « importations en bande organisée ». Dans cette affaire, Erba T. – longtemps considéré comme « porte-flingue » du premier avant d’être blanchi – est cette fois soupçonné d’être « à la conjonction » d’un certain nombre d’acteurs et d’être « sans doute encore un proche d’Issam Lahrach », a rapporté le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes.
« Il est établi qu’il a participé aux faits poursuivis alors qu’il était entouré sur le plan familial », s’avance même le magistrat dans son arrêt rendu ce vendredi 27 juin 2025, alors que l’affaire n’est pourtant pas encore jugée.
« La cour ne prend même plus la peine d’employer le conditionnel », grince en réponse Me Raphaël Chiche, qui a formé un pourvoi contre cet arrêt devant la Cour de cassation.
L’évasion de Mohamed Amra, un « point de bascule » ?
Depuis quelques mois, de telles mesures se multiplient dans les prisons françaises : cet « emballement » s’est en fait amorcé avec la commission sénatoriale sur le narcotrafic.
L’évasion de Mohamed Amra a aussi sans aucun doute constitué « un point de bascule », du point de vue des avocats d’Erba T.
Si le bien-fondé de telles mises à l’isolement est théoriquement contestable devant un tribunal administratif, en réalité, le fond de l’affaire n’est évoqué que dans un délai de « douze à dix-huit mois », soit bien après l’expiration des effets de la décision, courant pour trois mois.
« Aucun juge indépendant et impartial ne contrôle efficacement la légalité de ces décisions » constitutives d’une forme de « torture blanche », en conclut donc Me Raphaël Chiche.
CB (PressPepper)
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