L’Allemagne a revu à la baisse son objectif de remplissage des réserves de gaz, initialement fixé par le gouvernement pour éviter une crise énergétique, à la faveur de l’atténuation des goulets d’étranglement de l’approvisionnement. Toutefois, certains analystes mettent en garde contre les risques persistants, notamment en cas d’hiver plus rigoureux que prévu.

Face à l’invasion de l’Ukraine par la Russie et à la chute soudaine des importations de gaz russe, l’Allemagne avait mis en place en juin 2022 un plan d’urgence en trois étapes visant à réduire sa dépendance au gaz russe.

Depuis, le pays a construit plusieurs terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL) et signé des accords avec le Qatar, Oman, la Norvège et d’autres partenaires afin de diversifier ses sources d’approvisionnement.

La ministre de l’Économie, Katherina Reiche, a déclaré que l’approvisionnement en gaz de l’Allemagne était désormais sécurisé et ne remplissait plus les conditions requises pour maintenir le niveau d’alerte de son plan d’urgence.

L’Allemagne a cessé d’importer du gaz russe par gazoduc et aucun GNL russe n’arrive désormais dans ses terminaux, a précisé Reiche. Elle a ajouté qu’il n’était plus nécessaire que le gouvernement procède au remplissage des réserves nationales via sa plateforme de négoce, compte tenu de la stabilité de la situation d’approvisionnement.

En mars, les partis de la coalition au pouvoir en Allemagne ont convenu de supprimer une taxe sur le stockage du gaz instaurée en 2022 pour compenser les coûts élevés liés au remplacement des approvisionnements russes. Cette mesure devrait permettre aux consommateurs d’économiser environ 3,4 milliards d’euros (€3,4 milliards), une baisse qui se répercutera sur leurs factures d’énergie.

Le niveau d’alerte précoce, premier des trois stades de crise, restera toutefois en vigueur afin de permettre au gouvernement de surveiller de près la situation de l’approvisionnement.

« Le marché est encore capable de faire face à cette perturbation ou à cette demande sans qu’il soit nécessaire de recourir à des mesures non fondées sur le marché », a déclaré Reiche aux journalistes à Berlin.

Alex Froley, analyste principal du GNL chez ICIS, estime que le marché du gaz s’est stabilisé, les prix du pétrole et du gaz ayant fléchi après le cessez-le-feu entre l’Iran et Israël et l’arrivée de nouvelles livraisons en provenance du Canada et des États-Unis.

Il avertit toutefois que l’Europe devra maintenir des prix du gaz suffisamment élevés durant l’été pour garantir des niveaux de stockage adéquats, face à la concurrence de l’Asie.

RISQUE HIVERNAL

Les réserves de gaz de l’Allemagne sont actuellement remplies à environ 50 %, mais l’activité de stockage s’est nettement intensifiée, a indiqué Reiche.

En avril, le gouvernement a modifié les seuils de remplissage requis pour l’hiver prochain, abaissant l’objectif à 80 % d’ici au 1er novembre, contre 90 % auparavant.

Les analystes préviennent que cette réduction pourrait s’avérer risquée si l’hiver s’avérait plus froid que prévu ou si des événements politiques et des conflits entre nations venaient perturber l’approvisionnement.

« À ce stade, il semble que le niveau de remplissage des stocks sera compris entre 75 et 80 % à l’approche de l’hiver si la situation reste inchangée, ce qui atteint l’objectif fixé, mais reste risqué pour la saison hivernale », a confié une source du secteur à Reuters, ajoutant qu’un tel niveau de stockage pour l’hiver était « très inhabituel ».

Les prix du gaz se sont stabilisés autour de 34 euros par mégawattheure, soit encore le double des niveaux d’avant la crise énergétique.

« Il pourrait encore y avoir des prix élevés l’hiver prochain en cas de froid exceptionnel, d’autant que la géopolitique mondiale et les conflits restent imprévisibles. Mais les fondamentaux semblent plus favorables pour le moment », estime Froley d’ICIS.

($1 = 0,8480 euros)