Il faut imaginer l’ambiance électrique, en ce jour de juin 2023, dans une cathédrale de Nantes transformée en site de fouilles archéologiques. Caroline Chauveau et ses collègues ont « conscience que chaque geste va laisser une trace. Il ne faut pas que celle-ci altère le monument funéraire. » Le tombeau de François II de Bretagne et de sa femme, Marguerite de Foix, les parents d’Anne de Bretagne, est considéré comme un chef-d’œuvre de la sculpture de la Renaissance française.
Le tombeau de François II de Bretagne et de Marguerite de Foix avait été commandé par Anne de Bretagne pour honorer la mémoire de ses parents. (Photo Jean-Pierre Dalbéra)
Ce jour-là, les archéologues de l’Institut national de recherches archéologiques préventives extraient une petite boîte du magnifique sarcophage. Une étiquette indique qu’elle contient les ossements d’Arthur III, oncle de François II, ancien compagnon d’armes de Jeanne d’Arc. Ils y trouveront, en fait, les reliques de trois personnes différentes.
Les historiens savaient que, depuis la Révolution française, le tombeau ne contenait plus les cercueils de François II, de Marguerite de Foix et de Marguerite de Bretagne, la première épouse de François II. « On a perdu la trace de leurs corps au moment de la Révolution. On ne sait pas si ce sont des habitants ou des chanoines mais des personnes ont tenté de protéger ce tombeau… Et on ne sait pas où sont passés les cercueils », explique Aude Valérien, archéologue du bâti médiéval et moderne. En 1817, le tombeau est remonté dans la cathédrale. Des documents indiquent que les ossements d’Arthur III y sont placés : « C’était, finalement, le prédécesseur de François II, un personnage avec un destin national, grand connétable de France et compagnon d’armes de Jeanne d’Arc », contextualise l’archéologue médiéviste, responsable scientifique de l’opération autour du tombeau.
L’étude des ossements retrouvés a permis d’établir qu’ils correspondaient, en fait, à trois individus différents. L’un d’eux pourrait effectivement être Arthur III : la datation au carbone 14 permet d’établir, a minima, qu’un des individus a vécu à la même période que le seigneur breton. « On n’aura sans doute jamais la garantie à 100 % qu’il s’agit bien de ses ossements », estime Aude Valérien. Et pour les deux autres, « on ne saura sans doute jamais », poursuit l’archéologue. De coûteuses recherches génétiques ne peuvent être lancées sans une hypothèse forte.
Plusieurs découvertes remarquables
Si le mystère demeure, les fouilles sont, globalement, un succès : « Nous avons mis au jour des maçonneries de l’édifice antérieur, des décors complètement inédits, des peintures, des décors de faux joints rouges très fins, un petit motif floral bicolore, des éléments qui n’étaient pas connus, évoque Caroline Chauveau, archéologue médiéviste, responsable d’opérations à l’Inrap. On a eu une chance exceptionnelle ! »
La réouverture de la cathédrale doit avoir lieu le 27 septembre 2025. Le tombeau en marbre, qui a fait l’objet d’une restauration, doit être réinstallé en fin d’année 2026.