Par
Thomas Blanc
Publié le
2 juil. 2025 à 17h06
Après la manière douce, celle des mises en demeure, la mairie de Marseille a décidé de frapper (beaucoup) plus fort. Elle va s’attaquer aux portefeuilles de ceux qui ne jouent pas le jeu de la location meublée touristique, notamment sur Airbnb. Solennellement, Patrick Amico l’annonce ce mercredi 2 juillet sur les marches du palais de justice : « Nous recherchons les propriétaires de résidences secondaires qui ne sont pas en conformité avec la loi, car c’est de cela qu’il est question. » Un symbole. L’adjoint au maire (GRS) de Marseille en charge du Logement et de la lutte contre l’habitat indigne officialise ainsi la traque, devant les tribunaux, des investisseurs contrevenants.
Quatre investisseurs assignés par la Ville
Après une longue investigation des services de la Ville auprès des plateformes de location et des administrés, la mairie de Marseille a mis ses menaces à exécution.
Ce mercredi 2 juillet, des assignations ont été déposées par Me Jorge Mendes Constante, avocat de la municipalité, à l’encontre de quatre multipropriétaires d’appartement qu’ils louent sans les autorisations nécessaires.
Les motifs de ces assignations sont « le défaut au changement d’usage et l’absence de déclaration de la location de meublés touristiques », explique le conseil. La mairie demande également un retour à la location classique pour des résidents marseillais de ces appartements.
33 appartements dans sept immeubles dont un en péril
Ces quatre propriétaires ont monté des patrimoines immobiliers importants dans la cité phocéenne. L’un, chirurgien à Périgueux, est propriétaire de quatorze logements dans un seul et même immeuble, rue Adolphe Thiers, dans le quartier de Noailles (1er).
Un autre, venu de Paris, en détient neuf. Les deux derniers sont marseillais et possèdent sept et trois appartements.
On ne peut pas laisser des investisseurs faire beaucoup d’argent sur le dos des Marseillais qui ne peuvent pas se loger.
Patrick Amico
Adjoint au maire de Marseille en charge du logement et de la lutte contre l’habitat indigne
Au total, 33 appartements sont concernés. Ils sont répartis dans sept immeubles du 1er, 2e, 4e et 6e arrondissements. Parmi ces bâtiments, l’un est un péril et donc en théorie interdit à la location, rue Vacon, à deux pas du Vieux-Port et de l’Opéra. Pas de quoi déranger le propriétaire visiblement.
Jusqu’à trois millions d’euros d’amende
Pour ces faits, les quatre propriétaires risquent des amendes dont les montants seront versés à la mairie de Marseille. Pour la location sans avoir déclaré le changement d’usage (de résidence principale à résidence secondaire pour de la location aux touristes), chaque mis en cause risque jusqu’à 100 000 euros d’amende par appartement.
Des sommes qui iraient directement dans les finances municipales. S’ils sont tous condamnés, la Ville pourrait donc en tirer jusqu’à 3,3 millions d’euros.
Le but n’est pas de gagner de l’argent, nous voulons simplement créer un précédent et avec cette somme, renforcer la lutte contre l’habitat indigne qui coûte plusieurs millions à la Ville.
Patrick Amico.
S’ils sont condamnés, les propriétaires devront repasser les appartements en location dite « classique ». Et s’ils ne s’y conforment pas, ils écoperont d’une amende supplémentaire de 1 000 euros par mètres carrés et par jour de retard.
Le propriétaire aux quatorze appartements hors la loi encourt, en plus, une dernière amende de 10 000 euros par logement pour l’utilisation de faux numéro d’enregistrement auprès de la mairie qui sert également de numéro fiscal à l’État pour facturer les taxes.
Ce même propriétaire venu de Dordogne est bien connu des services de la ville car il est présent dans une vidéo disponible sur Youtube où il se vante de son action. « C’est un flagrant délit d’illégalité », « ici on se démerde […] c’est Marseille bébé », « c’est important la légalité […] mais ici on doit se débrouiller » sont des phrases qu’on l’entend prononcé à son propre égard.
Les assignations vont continuer
Ces quatre assignations ont ciblé les quatre plus gros poissons dans ce domaine pour frapper un grand coup. Mais Patrick Amico précise que « 6 000 logements sont hors la loi à Marseille », c’est-à-dire loués à l’année par des touristes alors que leurs propriétaires continuent de les identifier comme résidence principale.
Me Jorge Mendes Constante, annonce d’ailleurs que les assignations vont continuer.
« Un rythme de quatre contrevenants à la fois permettra de ne pas encombrer le tribunal. Nous espérons aussi que les premières condamnations encourageront les 6 000 autres à se mettre en règle et cela diminuera le nombre de dossier à traiter par les services de la Ville », a-t-il expliqué devant un parterre de journaliste réunit devant le palais de justice, dans le 6e arrondissement de Marseille.
À Paris, des cas similaires ont récemment abouti à des condamnations.
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