REPORTAGE – Dans une ambiance joyeuse, 1000 personnes ont participé au «Run for Lorène». Les fonds seront reversés pour l’aide psychologique à l’enfance, une cause défendue par les parents de la jeune fille, attaquée par un élève désormais interné en psychiatrie.

En ce mercredi ensoleillé, les visages des centaines d’élèves rassemblés pour une course solidaires rayonnent dans le parc du Grand Blottereau, à Nantes. Ces sourires contrastent avec les larmes qui coulaient sur leur joue il y a seulement deux mois. Le 24 avril, à quelques centaines de mètres de là, devant le lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides, leur camarade Lorène avait été tuée de 57 coups de couteau par un lycéen interpellé puis hospitalisé en psychiatrie. Quatre jours après le drame, les parents de la jeune fille de 15 ans avaient lancé une cagnotte à destination des structures pour l’aide psychologique à l’enfance.

Ce 2 juillet, le «Run for Lorène», dont les bénéfices seront reversés à la même cause, s’est déroulé dans l’un des plus grands parcs nantais. Environ 1000 personnes, de Notre-Dame-de-Toutes-Aides et de communautés éducatives voisines, se sont retrouvées pour courir ou marcher. Huit courses de deux ou cinq kilomètres, non chronométrées, ont été proposées dans une ambiance familiale.


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Un événement amené à s’étendre

«Aujourd’hui est un jour de fête, de joie pour finir cette année scolaire en beauté ! Nous sommes très touchés par votre présence. […] Merci à tous pour votre implication. Lorène aurait adoré ça !», a témoigné en début d’après-midi le père de la victime, qui ne s’était pas encore exprimé publiquement, en dehors du site internet La Cagnotte des Proches. «Nous sommes nombreux à courir ou marcher en l’honneur de notre fille Lorène, mais également pour l’ensemble des victimes», a-t-il rappelé dans un bref discours, alors que trois autres élèves ont été blessés lors de l’attaque au couteau.

«Nous avons senti une grande solidarité autour de nous dans cette épreuve. C’est ce qui nous porte et nous aide à aller un peu mieux aujourd’hui», a-t-il confié au micro, avant d’annoncer la création prochaine d’une association «qui contribuera à l’aide psychologique aux jeunes axée autour de la prévention, de la détection et du soin en s’appuyant sur les structures et associations existantes». Dans ce cadre, il est probable que l’événement ait vocation à s’étendre sur le territoire national dans le futur.

Il nous fallait trouver une manière forte, joyeuse et symbolique de conclure cette année scolaire

Pierre Cappelaere, chef d’établissement de Notre-Dame-de-Toutes-Aides

Près de 1000 coureurs et marcheurs se sont relayés tout l’après-midi.
LT/Le Figaro

«Notre ambition, avec cet événement, est double : transmettre à la famille de Lorène un moment fort, digne et porteur de sens ; et créer un événement fondateur, une édition “zéro” que d’autres, demain, pourront faire vivre à leur tour», a abondé Pierre Cappelaere, chef d’établissement. «Il nous fallait trouver une manière forte, joyeuse et symbolique de conclure cette année scolaire, à la hauteur de ce que nous avions vécu ensemble en septembre dernier avec notre présence aux Jeux paralympiques», où 1700 jeunes ont assisté à des épreuves.

«Pour chacune de vos foulées, chacun de vos pas, soyons dignes de ce que Lorène nous a laissé : une invitation à l’engagement, une invitation à une vie intense, curieuse et joyeuse», a repris le directeur. Celui-ci a également salué l’action des parents de Lorène, qu’il a vus régulièrement depuis le printemps. «Ils ont une posture qui est d’une telle dignité… C’est remarquable, ça nous donne de l’élan. Vous imaginez, perdre votre fille et quatre jours après ouvrir une cagnotte engagée vers la santé mentale des jeunes… Ils ne se sont pas seulement souciés de leur famille, mais leur action va envers des jeunes qui ne vont pas bien. Tout est dit», a-t-il confié, ému, au Figaro, tout en valorisant le travail de Rayan Laribi, président du comité des élèves, à l’initiative de cette course.

«Au retour des obsèques, depuis ce qui s’est passé, j’avais envie qu’on reste fédérés, mais autour d’une note positive», a expliqué l’élève de terminale, qui se lance dans des études de marketing et communication. Des tee-shirts ont été vendus tout au long de l’après-midi, ainsi que des boissons, afin de lever un maximum de fonds pour la cagnotte qui atteint actuellement 66.000 euros. Le montant des bénéfices n’a pas encore été chiffré. «L’objectif est de récolter plusieurs dizaines de milliers d’euros, mais si on a 5000 euros on sera déjà contents», a prévenu Rayan Laribi, près de la scène. Un peu plus loin, l’association nantaise Kit ou double, qui sensibilise les collégiens et lycéens aux troubles psychiques, a également tenu un stand. Enfin, une grande fresque colorée participative, intitulée «Qu’est-ce qui te fait du bien ?», a été exposée. «Aimer», «danser», «ma famille»… Les réponses, aussi variées que joyeuses, prouvent que malgré la tragédie d’il y a deux mois la vie peut triompher.

La fresque participative colorée.
LT/Le Figaro