Une famille réunionnaise qui se fait vacciner contre le chikungunya.Le vaccin Ixchiq est actuellement le seul vaccin autorisé contre le chikungunya au niveau mondial. © Freepik

Le nombre de cas de chikungunya continue de progresser en France métropolitaine, alors même que l’épidémie a été déclarée terminée à la Réunion (20 morts et 200 000 personnes touchées). Santé publique France, dans son dernier bulletin épidémiologique, recense ainsi plus de 1600 cas dits “importés” de chikungunya, soit des cas de voyageurs ayant été contaminés durant un séjour en zone épidémique.

Ce qui inquiète plus les autorités, ce sont les cas dits “autochtones” recensés sur le sol hexagonal. Ces cas concernent des personnes ayant été infectées sur place, par des piqûres de moustique-tigre, le vecteur principal de ce virus tropical qui commence à prendre ses aises en France. Au 2 juillet, 16 cas en tout ont été signalés, le dernier ce mercredi 2 juillet par l’Agence Régionale de Santé Alsace.

Jusqu’ici cantonnés au sud, ces cas de contaminations autochtones profitent de la chaleur ambiante pour gagner des territoires plus au nord, à l’image du Grand-Est et, donc, de l’Alsace. Soit 5 régions touchés par 7 foyers distincts, désormais. « Une telle précocité dans la saison d’activité du moustique et un nombre aussi élevé d’épisodes n’avaient jamais été observés jusqu’à présent », précise Santé publique France.

Chikungunya : il existe bien un vaccin, nommé Ixchiq

Pas de panique inutile, rappellent les experts, mais pas d’omission non plus. Car cette recrudescence de cas, depuis début mai, n epeut pas être considérée comme anodine. Dans ce contexte, la vaccination contre le chikungunya reste un enjeu majeur de santé publique. Ce virus, transmis par les moustiques Aedes, peut en effet provoquer des douleurs articulaires invalidantes, voire des complications graves, en particulier chez les personnes âgées.

En France, le vaccin Ixchiq est utilisé depuis l’an dernier (lire À SAVOIR). Mais quand un nouveau vaccin arrive sur le marché, surtout un vaccin vivant atténué comme Ixchiq, la prudence reste de mise. C’est pourquoi l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a lancé dès mars 2025 une surveillance renforcée (du 7 mars au 2 juin 2025) de ce vaccin contre le chikungunya, avec le soutien du Centre régional de pharmacovigilance (CRPV) de l’hôpital européen Georges-Pompidou.

Le but de cette surveillance est d’analyser en continu les effets indésirables signalés par les professionnels de santé ou les patients, pour détecter rapidement d’éventuels signaux de sécurité.

Une surveillance renforcée, des données attendues Quels sont les effets indésirables observés ?

Sur cette période de 3 mois, 47 cas d’effets indésirables ont été enregistrés au niveau national. Ce chiffre peut paraître modeste, mais 18 de ces cas ont été classés comme graves, selon les critères habituels de la pharmacovigilance.

Et ce n’est pas anodin :

Pour l’un de ces décès, le lien avec le vaccin est jugé “très vraisemblable”, compte tenu de la chronologie, des symptômes et des examens réalisés. Pour les deux autres, aucun lien n’a été établi à ce stade.

Syndrome “chikungunya-like” et autres signaux sous surveillance

Parmi les effets indésirables graves, certains patients ont présenté des symptômes évoquant une forme sévère d’infection par le chikungunya lui-même. Ce que les experts appellent un “syndrome chikungunya-like” : fièvre intense, douleurs articulaires, atteinte neurologique… mais sans infection par le virus.

En plus de ces cas graves, l’ANSM a repéré plusieurs “signaux potentiels”. Ce sont des effets rares ou inattendus, qu’il faut creuser sans tirer de conclusion hâtive :

  • Encéphalopathie ou encéphalite chez 3 patients âgés présentant des pathologies chroniques ;
  • Chutes à distance de la vaccination (7 cas) ;
  • Un cas de microangiopathie thrombotique, une atteinte des petits vaisseaux.

Ces signaux font l’objet d’investigations au niveau européen, sous la houlette de l’Agence européenne des médicaments (EMA).

Mésusages et contre-indications : un rappel nécessaire

Autre point préoccupant : plusieurs cas d’effets indésirables seraient liés à un mésusage du vaccin Ixchiq. Plus précisément, à son administration chez des personnes immunodéprimées, alors que cela est strictement contre-indiqué.

Rappel : Ixchiq est un vaccin vivant atténué. Il est formellement interdit chez les personnes immunodéficientes ou immunodéprimées (du fait d’une maladie ou d’un traitement), comme indiqué dans sa notice et son résumé des caractéristiques du produit (RCP).

Suspension pour les plus de 65 ans

En réponse à ces signaux, les autorités françaises ont rapidement ajusté le tir. Depuis le 26 avril 2025, la vaccination avec Ixchiq est non recommandée chez les personnes de 65 ans et plus, même sans comorbidités. Une décision entérinée au niveau européen dès le 7 mai, avec une contre-indication temporaire dans cette tranche d’âge.

Par ailleurs, le comité de pharmacovigilance européen (PRAC) poursuit une réévaluation complète de la balance bénéfice/risque du vaccin.

À SAVOIR

Le vaccin Ixchiq a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle par l’Agence européenne des médicaments (EMA) en novembre 2023, dans un contexte d’urgence sanitaire croissante liée à la recrudescence des cas de chikungunya dans plusieurs régions du monde, dont les Antilles et l’Océan Indien. Il a reçu le feu vert pour son utilisation en France en juin 2024.

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