Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, photographié à Paris le 8 avril 2025.

BERTRAND GUAY / AFP

Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, photographié à Paris le 8 avril 2025.

ÉCONOMIE – Le compte à rebours est lancé, et François Bayrou n’a pas vraiment eu le loisir d’appuyer sur le bouton du chronomètre. C’est Pierre Moscovici qui a lancé la course ce mercredi 2 juillet en fin de journée lorsque la Cour des comptes a publié son rapport annuel sur les finances publiques. Dix jours avant que le Premier ministre ne dévoile sa feuille de route concernant le budget 2026 pour lequel l’exécutif s’est fixé de faire 40 milliards d’euros d’économie.

Alors que le président de la Cour des comptes appelle, depuis des semaines, à engager des réformes structurelles, le nouveau rapport est sans appel : « La France vient de traverser deux années noires en matière de finances publiques », qui appellent à « une reprise de contrôle » « difficile » et « exigeante ».

La synthèse n’est pas particulièrement tendre avec les exécutifs qui se sont succédé : « hypothèses trop favorables », « incapacité à la dynamique de la dépense », et « à engager des efforts ». Et ce, alors même que les années 2023, 2024 n’ont pas été marquées par des crises particulières, contrairement aux précédentes marquées par le Covid, les crises inflationnistes et énergétiques, et la guerre en Ukraine. « Nous sommes désormais sur la première marche d’un podium que je ne souhaite pas pour la France : notre déficit est le plus élevé de la zone euro », cingle Pierre Moscovici.

Et de pointer les mises en garde répétées de la rue Cambon sur l’urgence de réformer en profondeur, alors qu’estime-t-il, il faudra désormais réaliser plus de 100 milliards d’euros d’économie d’ici 2029 pour atteindre les 3 %. Alors que ce n’était que 50 milliards il y a encore quelques années.

Des prévisions trop optimistes, des solutions trop temporaires

D’autant que la cour juge encore particulièrement optimiste les hypothèses de croissance retenue pour la période 2026-2029, et que des hausses de dépenses publiques sont envisagées dans le secteur de la défense. Quant à 2025, elle ne croit guère à un miracle, puisque la réduction du déficit cette année-là « repose exclusivement sur d’importantes hausses d’impôts, dont près de la moitié sont annoncées comme temporaires ».

Pour le premier président de l’institution, qui n’est pas particulièrement en faveur d’une année blanche, solution jugée trop temporaire, il faut « l’effort volontaire maintenant », au risque de « l’austérité subie demain ». Pierre Moscovici, qui dit n’avoir aucun « tabou » sur les impôts, appelle toutefois à se pencher surtout sur la gestion des dépenses : « Aucun niveau de collectivités publiques ne doit être à l’écart de l’effort de la nation ».

Bercy a commencé cette semaine à recevoir les parlementaires de tout bord pour discuter du budget 2026 et les inviter à faire des propositions d’ici la rentrée. À gauche ce mercredi, le député insoumis Éric Coquerel s’inscrivait en faux du rapport de la Cour des comptes, y voyant là « en réalité une orientation budgétaire avec laquelle [il n’est] pas d’accord ».

Le Premier ministre est lui d’autant plus attendu mi-juillet qu’une commission parlementaire a jugé très optimistes les 2 à 3 milliards d’euros d’économies visées par Amélie de Montchalin, grâce à la fusion ou la suppression d’agences de l’État. Ministre clef de la création du budget 2026, elle garde comme ligne rouge toute augmentation d’impôts. La même que celle du RN pour ne pas censurer François Bayrou. Les bons comptes font peut-être les bons amis, mais pas forcément ceux de la rue Cambon.