Lors d’une conférence de presse, plusieurs syndicats ont affirmé que l’extension de la prison, qui doit ouvrir à la fin de l’année pour réduire la surpopulation dans le bâtiment historique, sera suroccupée dès sa mise en service.
Les Baumettes craquent. En mars dernier, la prison historique de Marseille atteignait le record de 203% d’occupation. Conçue pour 698 places, dont 174 réservées aux femmes, la prison accueillait alors dans ses différents quartiers pas moins de 1417 détenus. Un problème de longue date à Marseille, au point qu’une extension de la prison, baptisée «Baumettes 3», est en construction depuis 2022, après la destruction du bâtiment historique.
Le projet de 30.000 m² de surface de plancher sur un terrain de 4,3 hectares prévoit 740 nouvelles places de prison à Marseille. «On aura un total de 1440 places, ce qui est donc bien moins que les 2000 détenus aux Baumettes cette année», calcule Laurence Blisson, représentante locale du syndicat de la magistrature. Lors d’une conférence de presse organisée mercredi au siège marseillais de la CGT, plusieurs organisations syndicales se sont inquiétées des conditions d’ouverture qui s’annoncent autour de Baumettes 3.
En effet, à les croire, la surpopulation déjà criante au sein de la prison actuelle risque de se prolonger malgré l’extension, car le flux demeure continu en la matière. «Le tribunal de Marseille décide (d’y envoyer) entre 100 et 110 détenus chaque mois», note Me Julie Jarno, représentante à Marseille du syndicat des avocats de France. Selon ces représentants syndicaux, alors que l’encellulement individuel est la règle prévue par la loi, les cellules de Baumettes 3 seraient même construites actuellement de sorte à pouvoir accueillir des lits superposés, avec des luminaires et des prises en hauteur. «Le chantier des Baumettes 3 est sous une pression politique pour ouvrir très vite et, déjà, on anticipe la surpopulation», regrette Laurence Blisson.
Manque de personnel
«On va de plus ouvrir en sous-effectif, de sorte que tous les bâtiments ne vont pas ouvrir car on manque de personnel», accuse Julie Jarno. «L’ouverture des bâtiments dits “confiance” a été reportée à cause de cela», affirme la secrétaire générale adjointe CGT Pénitentiaire Provence-Alpes-Côte d’Azur-Corse, Aïcha Khalfa, qui travaille par ailleurs au sein des Baumettes. Dans ces bâtiments, les détenus auront un peu plus de liberté, comme la possibilité d’ouvrir et de fermer eux-mêmes leurs cellules avec une clé qui leur sera confiée.
L’ouverture des Baumettes 3 a été accompagnée comme promis de l’arrivée en début d’année de 85 nouveaux agents de l’administration pénitentiaire, principalement de jeunes recrues sorties d’école. Mais, à en croire les syndicats, ces renforts n’ont fait que pallier le manque d’effectif préexistant. «Au 1er juin, nous sommes 507 surveillants, liste Aïcha Khalfa. Nous avons 49 gradés et il nous en faudrait 65. Pour les officiers, nous en avons 32 alors qu’il nous faudrait 39. Si on fait le calcul global, il va nous manquer, à l’ouverture de Baumettes 3, pas loin d’une centaine de personnels.»
Pour relâcher la tension à l’intérieur de la prison, les syndicats appellent à une toute nouvelle organisation. «Il y a la nécessité de mettre en place un mécanisme de régularisation carcérale pour respecter le nombre de places d’un établissement pénitentiaire, réclame Laurence Blisson. Il faut qu’une personne sorte de prison quand on souhaite qu’une autre personne y rentre», plaide la magistrate. «Il existe aussi des alternatives, comme le bracelet électronique, abonde Me Jarno. Mais les magistrats n’y ont que très peu recours, à la fois par manque d’habitude et de moyens.» Contacté, le ministère de la Justice n’a pas donné suite à nos sollicitations.