Ils encourent la peine de mort. Arrêtés en mai 2022 au dernier jour d’un voyage touristique, les Français Cécile Kohler et Jacques Paris sont désormais visés par des accusations d’« espionnage pour le Mossad », le service de renseignement extérieur israélien, de « complot pour renverser le régime » et de « corruption sur Terre », a-t-on appris mercredi auprès d’une source diplomatique occidentale et de l’entourage des détenus. Jusqu’à présent, l’Iran indiquait seulement que les deux Français étaient accusés d’espionnage, sans jamais préciser pour quel pays. Téhéran n’a pas encore confirmé si de nouvelles accusations ont été portées contre eux.
Le « snapback », un mécanisme de l’accord de 2015
« Nous n’avons pas été formellement notifiés par les autorités iraniennes des charges qui pèsent sur nos deux compatriotes », a réagi jeudi 3 juillet le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. « Si les chefs d’accusation qui ont été évoqués étaient confirmés, nous les considérerions comme totalement injustifiés et infondés. » De tels chefs d’accusation sont une « provocation à l’égard de la France » et un « choix inacceptable d’agressivité », a pour sa part fustigé Emmanuel Macron. Et d’ajouter : « Je pourrais dire simplement que c’est fantaisiste si ce n’était pas criminel. »
Face à ces charges lourdes, Jean-Noël Barrot a rappelé l’existence d’un levier que Paris pouvait activer. « Nous l’avons toujours dit à nos interlocuteurs du régime iranien : la question de décisions éventuelles sur des sanctions sera conditionnée au règlement de ce problème, de ce différend majeur », a-t-il déclaré.
Face à la politique iranienne d’enrichissement d’uranium, les pays occidentaux menacent Téhéran d’activer le « snapback », un mécanisme permettant de réimposer des sanctions internationales dans le cadre de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, conclu en 2015. La résolution 2231 du Conseil de sécurité, qui endosse l’accord, prévoit en effet que tout « État participant » à l’accord peut déclencher ce mécanisme en saisissant le Conseil de sécurité d’une plainte sur le « non-respect notable d’engagements d’un autre participant ». C’est cette option qui est évoquée par la France, au lendemain de la décision iranienne de suspendre sa coopération avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AEIA) et des nouvelles accusations visant les otages français.
Un dernier contact le 28 mai
Le sort de Cécile Kohler, professeure de lettres de 40 ans originaire de l’est de la France, et de son compagnon Jacques Paris, 72 ans, inquiète leurs proches. Ils étaient encore récemment détenus dans la prison d’Evin, touchée le 23 juin par des frappes israéliennes. La Française a été transférée à la hâte avec d’autres prisonniers, sans pouvoir emmener d’affaires personnelles, à la prison de Qarchak, où elle est restée 24 heures, a indiqué mercredi sa sœur Noémie, en se basant sur le compte rendu d’une visite consulaire d’un diplomate français mardi au pénitencier de Bozorg, dans le sud de Téhéran. Puis, « on lui a bandé les yeux et on l’a emmenée dans un autre lieu de détention qu’on ne connaît pas ». « Cécile ne dort plus depuis les bombardements », a poursuivi Noémie Kohler, dont le dernier contact téléphonique avec sa sœur remonte au 28 mai.
Jacques Paris a, lui, été transféré dans un lieu également inconnu, « tout seul dans une cellule. Il n’a pas de meubles. Donc il continue à dormir à même le sol », a ajouté Noémie Kohler. La jeune femme s’est dite « extrêmement inquiète sur leur état psychique », sur « ce double péril de mort […] la reprise des bombardements et cette condamnation à mort qui leur pend au-dessus de la tête ».
Avec AFP