C’était la fin des examens et la nuit de fête a viré au drame pour Pauline*. Six ans après les faits, Kais Ben Slama, son bourreau, a enfin été jugé et condamné. La victime et l’accusé ne se connaissaient pas. Ils n’avaient échangé que quelques mots avant que le Pompéi, ce bar bien connu des étudiants dans le Vieux-Nice, ne ferme ses portes. Il est aux alentours de 5h15 lorsque Pauline arpente, ivre, seule et sous la pluie, tel « un automate », ce sont ses propres mots, les ruelles de la vielle ville. Épuisée, elle n’a qu’une envie, c’est de se coucher.

Sur le chemin qui la mène à son appartement situé rue Centrale, elle est rejointe par l’accusé qui l’accompagnera jusqu’à l’intérieur du logement. Elle en ressortira, deux heures plus tard, nue, le visage tuméfié et traumatisée. Malgré des séances d’hypnothérapie et de psychothérapie, sa mémoire reste aujourd’hui encore fragmentée. Seuls des flashes subsistent: cet homme qui la réveille, qui est à cheval sur elle, qui la pénètre, elle qui hurle, tente de fuir, mais qu’il rattrape, frappe, mord, brutalise, viole, et étrangle à plusieurs reprises. Elle feint d’être morte pour qu’il la lâche enfin. « Comme le chat lâche la souris que lorsqu’elle est inerte », illustre l’avocate de Pauline, Maître Frédérique Grégoire.

Un trop-plein de frustration?

Du sang macule les murs, plafond, le sol, le lit. La poignée de la porte de la chambre est tordue… « C’est l’une des plus grosses scènes de violence que j’ai pu voir », confie à la barre, l’un des enquêteurs de la brigade criminelle de Nice. Inconnu des services de police jusqu’alors, Kais Ben Slama présente, selon les experts, une personnalité schizotypique. Il est décrit comme immature et socialement inadapté.

L’accusé affirme ne pas comprendre ce qui a pu provoquer en lui un tel accès de violence, mais il admet avoir accumulé de nombreuses frustrations à cette époque: sentiment d’exclusion, difficultés dans ses relations familiales, amicales et amoureuses. Il se repliait sur lui-même, s’enfonçait dans le silence — et parfois dans la consommation de drogues – bien que les tests toxicologiques réalisés après les faits se soient révélés négatifs.

L’altération du discernement retenu

Malgré la gravité des accusations, Kais Ben Slama, qui réfute toute intention homicide, comparaissait libre. Il a passé 11 mois en détention, avant d’être placé sous contrôle judiciaire. « Cinq années où il s’est montré irréprochable et a même passé son baccalauréat », souligne son avocat, Maître Benjamin Taieb. L’avocat général, Anthony Carello a requis 25 ans et a demandé à ce que l’altération du discernement soit retenue en raison de cette personnalité schizotypique. Kais Ben Slama a été condamné à 18 ans de réclusion criminelle.