Par
Julien Sournies
Publié le
5 juil. 2025 à 7h34
Les sentiments négatifs à l’égard de la toute nouvelle Zone à trafic limité fusent à tout va. Alors qu’elle est en vigueur dans la Presqu’île de Lyon depuis le 21 juin dernier, la tant décriée ZTL reçoit déjà son lot de critiques, tout juste deux semaines après sa mise en application.
Manque de repères, baisse de la clientèle et du chiffre d’affaires, fortes nuisances sonores… Les griefs sont légion chez les riverains, commerçants et usagers des TCL du centre-ville lyonnais, alors que la ZTL n’est, pour rappel, pas encore entièrement effective.
« Ça fait un quand même un sacré détour »
Complètement désorientée devant l’ancien arrêt de bus Rue de la République, situé sur la rue éponyme, Sylvie a du mal à s’y retrouver. Alors que la rue de la République est devenue entièrement piétonne, cette fidèle usagère du bus doit désormais revoir ses déplacements.
« Je prenais souvent le C14 pour m’arrêter à l’arrêt Hôtel de Ville, mais ça m’est dorénavant impossible. Maintenant, on est obligés de s’arrêter à Cordeliers et pour se rendre à l’Hôtel de Ville, il faut marcher. Sauf que moi, j’ai des problèmes de mobilité, ça ne m’arrange pas », s’agace-t-elle.
La rue de la République, en Presqu’île de Lyon, est intégralement piétonnisée depuis l’entrée en vigueur de la ZTL. Les bus ne peuvent donc plus y circuler. (©Julien Sournies / actu Lyon)
Du côté de Candice, le son de cloche est identique. Cette habitante de la Croix-Rousse indique n’y voir, pour le moment, « que du négatif dans cette ZTL. Je prends fréquemment le C13 et le C18, et depuis la fermeture de la rue de la République, on ne s’y retrouve plus. Le temps de trajet est vachement rallongé« .
Avant, on pouvait prendre les deux lignes de bus à la sortie du métro à Hôtel de Ville. Maintenant, il faut venir à Cordeliers et on est obligés de circuler sur les quais de Saône, ça fait quand même un sacré détour pour rentrer à la Croix-Rousse.
Candice
Habitante de la Croix-Rousse
« Si la Métropole ne nous donne pas un peu de sous, on ne tiendra pas »
Chez les commerçants, la joie n’est également pas au rendez-vous. Alors qu’ils sont nombreux à avoir constaté une baisse de la clientèle depuis le démarrage de certains chantiers d’aménagement dans les rues de la Presqu’île ces derniers mois, la ZTL a été le « coup de grâce » pour Françoise Vérot, commerçante de la rue Grenette.
« On avait déjà des pertes à hauteur de 30% les mois précédents, mais là depuis juin avec la mise en place de la ZTL, on est tombé à 50%. Et ce qui est sûr, c’est que si la Métropole ne nous donne pas un peu de sous, on ne tiendra pas« , s’exaspère-t-elle, derrière la caisse de sa charcuterie.
Françoise Verot, commerçante de la rue Grenette, voit son commerce fortement impacté par la ZTL en Presqu’île de Lyon. (©Julien Sournies / actu Lyon)
Maintenant, quand les gens sortent du métro, ils viennent nous demander leur chemin, mais en attendant, ils n’achètent pas.
Françoise Verot
Commerçante de la rue Grenette, membre du collectif Les Défenseurs de Lyon
Du côté des voisins commerçants, les clients sont moins nombreux au fil des jours. Pour Zeilani, responsable à la brasserie Midi Minuit République, la période choisie pour l’entrée en application de la ZTL n’était vraisemblablement pas optimale.
« Déjà qu’avec les travaux, moins de monde venait à la brasserie, c’est quasiment pire désormais. On pensait que la piétonisation totale de la rue allait redynamiser les commerces, mais on est finalement encore loin du compte. En plus, avec les fortes chaleurs et les départs en vacances, restreindre les voitures, ça n’aide pas en ce moment », constate-t-il.
« Ça été mal fait et c’est surtout mal indiqué »
Outre des retombées commerciales conséquentes pour certains et des lignes de bus bouleversées pour d’autres, l’accès à la rue Grenette, réservé uniquement aux bus, interroge lui aussi. « On nous a dit qu’il y avait que les bus qui pouvaient circuler, mais on voit aussi souvent des voitures. Ce n’est pas très cohérent », témoigne Stéphanie, vendeuse chez le chocolatier Voisin.
« La ZTL est dans l’ensemble respectée »
Concernant les griefs formulés par les commerçants au sujet de la rue Grenette, la mairie de Lyon indique qu’une « vigilance renforcée est assurée, tant par la police municipale que par les opérateurs du centre de supervision urbain (CSU) ».
« Dans cette rue, la circulation des bus reste globalement fluide. Une vingtaine de véhicules particuliers et scooters y ont été constatés par tranche horaire, essentiellement aux heures de pointe, avec une présence notable de livreurs et d’usagers de trottinettes. La plupart des véhicules particuliers observés empruntent uniquement une portion limitée de la rue Grenette, souvent pour rejoindre des axes adjacents, sans traversée complète entre Saône et Rhône », poursuit la Ville, avant de conclure :
« La ZTL est dans l’ensemble respectée, avec une fréquentation plutôt faible des véhicules non autorisés. Les contrôles se poursuivent et seront ajustés en fonction des comportements observés. »
Voir tout
Sans parler des nuisances sonores générées par les bus. « C’est insupportable, on a des bus qui font un bruit pas possible. Avec ces déviations, aux feux, ils sont parfois trois ou quatre les uns derrière les autres. En plus, ils klaxonnent à tout va, car les gens sont tellement indisciplinés, ils traversent de partout. Mais au final, ils y sont pour rien, c’est juste que ça a été mal fait et c’est surtout mal indiqué », souffle Françoise Verot.
Un riverain présent à proximité acquiesce : « Avant, on entendait surtout les klaxons les vendredis et samedis soir, maintenant, c’est tout le temps. »
Pour Grégory Doucet, tout va bien…
Alors que seulement deux semaines se sont écoulées depuis la restriction du trafic automobile en Presqu’île, tous espèrent en tout cas « qu’il y aura du changement prochainement ou qu’il y ait une meilleure communication là-dessus pour que les gens s’y retrouvent plus facilement, car là ça devient vraiment difficile ».
Reste donc à savoir si le discours de la municipalité, notamment, va être emmené à changer. Pour rappel, lors de la mise en application de la ZTL, le maire Grégory Doucet disait alors : « La petite musique de la décroissance, je ne l’entends pas, je ne la vois pas. La ZTL est très bonne pour le commerce. Le nombre de personnes qui se rendent en transports en commun en Presqu’île augmente considérablement depuis 2019. »
Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.