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Rédaction Strasbourg

Publié le

6 juil. 2025 à 7h02

TRIBUNE. Strasbourgeois de naissance, passé par Bordeaux durant ses études à Kedge Business School, Philippe Dierstein dirige depuis 17 ans l’agence qu’il a créée, Beausite Immobilier.

Philippe Dierstein est directeur de l'agence Beausite Immobilier.
Philippe Dierstein est directeur de l’agence Beausite Immobilier. (©DR)

Au chapitre de la complexité administrative, accueillons un nouveau venu : le permis de louer. Instauré par la loi Alur en 2014, ce dispositif permet aux collectivités, en particulier à la mairie de Strasbourg, de soumettre la mise en location d’un logement à une déclaration préalable voire à une autorisation préalable.

Voté à l’unanimité lors du conseil de l’Eurométropole de Strasbourg du 23 mai 2025, le permis de louer va ainsi être expérimenté à partir du 1er mai 2026, pour une durée de trois ans, dans le quartier gare de Strasbourg. Pour le meilleur mais, surtout, pour le pire.

L’enfer est pavé de bonnes intentions

Lutter contre l’habitat indigne, améliorer la qualité des logements, protéger les locataires les plus vulnérables. Sur le papier, ces objectifs paraissent incontestables.

Pourtant, derrière l’intention louable émergent de nombreux points de friction. A commencer par la complexité administrative engendrée par cette mesure.

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Avant chaque nouvelle location d’un logement, le bailleur devra déposer un dossier administratif et l’assortir de l’ensemble des diagnostics obligatoires pour en déclarer la mise en location voire pour obtenir une autorisation de mise en location.

Après un mois d’attente, la mairie peut interdire la location. Les services municipaux peuvent aussi demander à visiter les lieux pour en vérifier l’hygiène et les caractéristiques techniques et énergétiques. Tout un programme.

De possibles sanctions financières

Ces mesures administratives sont évidemment sujettes, pour les mauvais élèves, à des sanctions financières pouvant atteindre 15 000 €. On aurait voulu accroitre le climat de défiance entre les propriétaires, les locataires et la collectivité qu’on ne s’y serait pas pris autrement.

Car si l’idée de la mairie de Strasbourg de prévenir la mise en location de logements insalubres est légitime, une telle ingérence de la part de la municipalité aura pour effet de dissuader des propriétaires de mettre en location leur bien, faute de moyens ou d’énergie disponibles, ce qui viendra tarir encore un peu plus l’offre de biens à louer à Strasbourg et augmenter les loyers des logements éligibles à la location.

Après avoir sorti du marché les logements dont les diagnostics énergétiques sont mal classés, dans un marché immobilier où les locations saisonnières ont asséché l’offre depuis des années, c’est le coup de grâce pour les locataires.

Le permis de louer va rapidement montrer ses limites

Passons sur la controverse liée à la stigmatisation du quartier gare et de ses habitants, sur la capacité opérationnelle des services municipaux à traiter efficacement les demandes d’autorisation en un mois et sur l’absence d’accompagnement des bailleurs.

Ne jurant que par la contrainte, sans aides financières à la rénovation, sans pédagogie ni égards pour les bailleurs modestes, sans simplification administrative, le permis de louer va rapidement montrer ses limites.

Philippe Dierstein

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