Par

Cédric Nithard

Publié le

6 juil. 2025 à 11h28

Philippe Saurel fait donc un retour au premier plan. Même si l’ancien maire de Montpellier (2014-2020) ne prendra sa décision qu’en septembre, après un voyage à Athènes, la perspective des municipales ne manque pas d’attiser le feu en lui. Un feu qui semblait éteint jusqu’à peu. Ravivé comme jamais après être devenu chef de file dans l’Hérault du mouvement UTILES, c’était l’occasion d’aborder avec lui différents sujets. Où ce que l’on pouvait interpréter comme une forme de résignation a désormais pris l’apparence d’une sérénité, habitée d’une volonté de justice, dont certains devraient se méfier comme du calme avant la tempête. Philippe Saurel n’est pas (encore) candidat, mais il est bien de retour.

Pour commencer de manière légère, comment est le café au Dôme (NDLR : lieu du rendez-vous) ?

(rires) D’abord il est bon. Ce qui n’est pas le cas partout malheureusement. Je travaille juste à côté et j’ai coutume de venir au Dôme à Gambetta comme aux Beaux-Arts. C’est un endroit que j’aime bien. Mon père est né à Figuerolles et ma mère à Boutonnet donc je suis issu des deux quartiers.

Si je posais cette question, c’est parce que pendant longtemps, sur les réseaux sociaux, vous postiez des photos de vous en train de prendre un café dans différents endroits tôt le matin. Quelle était la signification de ces messages ?

Et je continue d’ailleurs. En fait, c’est pour expliquer aux gens que le matin je me lève comme eux, je vais travailler comme eux et je bois un café au bistrot comme eux. C’est un acte très commun que de prendre un café au bistrot et c’est un lieu de sociabilité.

Et c’est presque devenu un acte désuet avec le temps.

Oui. Pour moi, c’est un acte assez immédiat. Pour vous donner un exemple, quand j’étais adjoint à l’urbanisme, beaucoup de promoteurs, de décideurs… souhaitaient m’inviter au restaurant. À la grande majorité d’entre eux, je leur ai proposé d’aller boire un café à 7h15 à Antigone. Donc c’est un outil qui me permet d’être en ville et de côtoyer la ville comme tous les Montpelliérains et les habitants des villes et des villages. C’est vraiment un acte simple mais j’essaie de donner un peu de fond à ce que je fais.

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Trouvez-vous que de manière générale, on a été injuste avec votre bilan ?

Pas tous les journalistes mais beaucoup d’entre eux. C’est comme ça mais c’est aussi de ma faute. J’aurai pu mieux communiquer et mieux expliquer. Je suis plus dans le faire que dans le dire. À partir du mois d’août 2019, j’étais épuisé physiquement. J’avais trop mal et j’ai failli ne pas me représenter. Je le dis clairement, je ne pouvais pas assurer la fonction donc j’ai essayé de gagner du temps jusqu’à être obligé d’aller en urgence me faire opérer.

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Regrettez-vous cette presque non-campagne ?

Je n’ai pas fait campagne. Ce sont mes amis et collègues qui l’ont assurée. Je n’étais pas en état physique de la faire. Et il y avait beaucoup de difficultés car quand vous n’avez pas de structure avec vous, vous devez tout assumer tout seul. En 2014, je suis allé aux élections et nous avons gagné avec une équipe qui n’était pas formée à la politique. Il n’y avait que six ou sept copains et copines qui avaient déjà fait un peu de politique, les autres étaient de la société civile. Il a donc fallu veiller d’abord à donner une formation obligatoire, sans être trop lourd pour ne pas dire aux élus ce qu’ils devaient faire, et en plus il fallait bien veiller à ce que les choses ne dérapent pas et ne sortent pas des clous. Surtout que, la nature est ainsi faite, quand physiquement je n’étais pas apte à conduire la campagne c’était le moment où j’étais le plus fragilisé donc il fallait que je redouble de vigilance.

D’autant que le physique joue sur l’humeur.

Vous savez quand je disais bonjour à quelqu’un dans la rue, si son conjoint était à trois mètres cela me coutait un effort surhumain pour faire les trois pas qui manquait. Je ne pouvais pas faire autrement, j’avais trop mal. Le jour où j’ai inauguré la Grand Rue Jean Moulin, personne n’a rien vu mais c’est la réalité, j’ai été obligé de faire un effort surhumain dans ma tête pour disjoncter ma jambe droite de la sensibilité générale de mon corps. Comme si ma jambe avait été volontairement désensibilisée. Évidemment après, j’étais nase et je suis allé me coucher une journée (rires). Je voulais me faire opérer plus tôt mais il s’est trouvé que le bloc opératoire de Lapeyronie était en travaux et donc il a fallu repousser en janvier. C’est comme ça.

Avez-vous des regrets, surtout en observant la manière dont les choses se déroulent depuis l’arrivée de Michaël Delafosse, quant à la manière dont vous avez mené votre mandat avec beaucoup de conflits avec le Département et la Région ?

Non, je ne regrette pas d’être entré en conflit. Et je remarque qu’aujourd’hui aussi il y a beaucoup de conflits politiques. C’est normal. Regardez sur le PLUI, quatre maires sont en désaccords. Sur la ZFE, il y en a 23. C’est normal. Rappelez-vous que nous avons fabriqué la métropole ex nihilo et j’ai été obligé de fabriquer des outils pour convertir les maires. Il me fallait une majorité qualifiée et pas une majorité simple c’est à dire les deux tiers. Donc il a fallu transiger et, au cours du temps, ces transactions ce sont un peu effritées. Chez certains le désir politique s’est éveillé et ils ont voulu s’imposer. C’est normal. Pour moi, il n’y a rien d’anormal dans ce mandat. Après, oui, c’est vrai que j’aurai pu mettre un peu plus les formes. (rires)

On avait quand même l’impression qu’il s’agissait de querelles entre anciens camarades socialistes.

Non, ce n’était pas une affaire de Socialistes, c’était une affaire d’intérêts de la ville. Moi, j’ai toujours défendu Montpellier et j’ai d’ailleurs toujours fait passer Montpellier avant moi-même. Sinon je me serai peut-être fait opérer plus tôt, je me serai occupé de moi. Mais peut-être que c’est là où j’ai eu tort aussi. J’ai toujours défendu les Montpelliérains sur les impôts, la fiscalité, la sécurité, la Régie Publique de l’Eau… On ne va pas refaire le programme de 2014 mais les quinze propositions pour la ville ont été faites rapidement. Et, contrairement à ce qui est dit, le premier segment de la ligne 5 a été fait ainsi que toutes les négociations, les réunions publiques… il n’y a jamais eu un recours sur tracé que j’ai changé et ils n’ont eu la DUP qu’en août 2020. Cela veut dire que l’État a pris en compte toute les modifications que nous avions apporté avec les Montpelliérains (la variante Sophie, la variante Alain…) et que nous ne pouvions pas la faire avant. On a changé le tracé de la ligne 5 de tramway parce que les habitants nous ont proposé des trajets plus pertinents. On est plus forts à deux cerveaux qu’à un seul.

J’ai suis étonné par une chose. Pendant tout ce mandat de Michaël Delafosse, la majorité vous attaque régulièrement sur différents points, notamment Manu Reynaud avec ce qu’il appelle la taxe Saurel. Pourquoi avoir aussi peu répliqué ?

Parce que ce sont des attaques qui sont non fondées. J’ai fait une réponse officielle une fois. Mais on a encore le temps pour répondre. Ce qu’ils font c’est presque de la diffamation, c’est de la fausse information. En aucun cas, c’est le président de la Métropole qui ferme un site d’enfouissement qui est un centre piloté par l’État et qui appartient désormais au Plan Régional de Gestion des Déchets Ménagers piloté par la Région dont certains sont vides. Il est donc normal de remplir ceux qui sont vides avant d’en creuser d’autres. Qui a arrêté le creusement des Centres de Stockage des Déchets Ultimes ? C’est Jean-Pierre Moure (NDLR : président de Montpellier Agglomération de 2010 à 2014) avec la Gardiole et le troisième casier de Castries, qu’il avait promis à Gilbert Pastor (NDLR : maire de Castries de 2001 à 2020) de ne pas faire. Je n’ai fait que suivre ce qu’avait dit Jean-Pierre Moure.

Comment voyez-vous le conseil de métropole du 16 juillet avec notamment la présentation du PLUI ?

Le PLUI est voté à la majorité donc je pense qu’il y aura la majorité mais cela ne veut pas dire que les maires sont d’accords. Lorsqu’il y a eu un vote sur les études du PLUI j’ai voté contre et j’ai dit pourquoi. Premièrement, il y a déficit démocratique car il n’est pas resté suffisamment à la disposition des habitants pour pouvoir avoir un écho suffisant. Et il y a le fait de le voter avant les élections municipales car cela veut dire faire plaisir aux maires en place. Est-ce que c’est démocratique ? Deuxièmement, un PLUI n’est pas la somme des PLU de chacune des communes. Le PLUI vient se baser sur le Schéma de Cohérence Territoriale que nous avons fait voter à l’unanimité en 2019 pour traduire en acte ce que le SCoT nous raconte. Donc, le PLUI est un document à part des PLU des communes qui doit envisager dans les règles de construction les 50 ans à venir de la zone et pas seulement des villes. En dehors de certains dossiers particuliers que je n’évoque pas, le troisième point c’est le patrimoine. Et d’ailleurs, l’État le remarque et c’est au vitriol ! Sur le patrimoine construit, bâti, urbain, paysager, matériel, immatériel… il n’y a rien.

Vous avez évoqué le fait que vous avez construit la métropole. Au regard de cette construction, comment voyez-vous la place des autres communes par rapport à Montpellier qui semble accaparer l’attention ?

La réponse est dans votre question. Pour créer une intercommunalité, il me semble qu’il faut conduire ensemble et de manière concertée des politiques communes ou globales qui envisagent l’avenir. Aujourd’hui, la ZFE est l’exemple parfait.

Ne faudrait-il pas éviter que Montpellier soit la locomotive de la métropole et davantage les autres communes ?

Elle est forcément la locomotive mais quand on est président de la métropole, quand on pense Montpellier, il faut aussi penser aux communes. On ne peut pas penser seulement à nous. La ZFE c’est typique. La Métropole aurait pu la mettre en route mais d’une autre façon c’est à dire avec la concertation nécessaire, étape après étape comme nous on avait commencé à faire en piétonnisant les rues, tout doucement. Mais il faut de la concertation en permanence, ce qu’il n’y a pas eu. Regardez les 4 boulevards et même sur La Paillade.

Qu’avez-vous à reprocher sur ce qui est fait à La Paillade ? Vous aviez commencé quelque chose, cela a été poursuivi toujours sous la régie de l’ANRU…

Nous c’était 1Md€, eux c’est 500M€. On a diminué par deux les fonds de l’ANRU. Mais ils en font des tonnes à chaque fois. Il y a beaucoup de communication comme les fresques sur la tour d’Assas. Moi je n’ai pas voulu faire ça parce que cela coûte cher et que j’ai maintenu 0% d’augmentation d’impôt y compris sur la Métropole qui était en création. Ce n’était pas si simple que ça car, en fait, la Métropole a été créée avec les transferts de compétences départementales, notamment, seulement en 2017. Et encore au forceps.

Pour aller sur un autre terrain, avez-vous regardé ce qu’il s’est passé au congrès du Parti Socialiste ?

Oui bien sûr même si je ne suis pas concerné directement.

Il n’y a pas une petite fibre qui vibre quelque part ?

Si… Je suis intéressé par ce qu’il s’y passe mais je suis intéressé par toute la vie politique. Je regarde tous les partis, leur fonctionnement, même si je suis dans aucun. Sur le PS, beaucoup de gens font des critiques contre Olivier Faure mais il a quand même sauvé le parti à un point où il risquait de ne plus avoir un seul député. Beaucoup se sont faits élire grâce à l’alliance avec La France Insoumise et après ils reprochent à Faure de faire l’alliance.

Dans la politique, on oublie que c’est souvent une histoire de contexte et de circonstances.

Et de malhonnêteté intellectuelle.

Lors de la venue de Bertrand Pancher pour vous présenter comme chef de file d’UTILES aux municipales dans l’Hérault, vous avez déclaré que vous pensiez que beaucoup de Français étaient de gauche.

La France a beaucoup de services publics, une administration d’État qui est bienveillante. L’État est bienveillant à l’égard des Français même si certains se font allumer parce qu’ils ont transgressé les règles. Les enfants de la Patrie sont traités de la même façon. Quand quelqu’un va se faire rembourser les médicaments, on ne demande pas pour qui il vote. On demande la carte vitale, pas la carte d’électeur. Il y a très peu de pays comme ça et c’est quand même une très grande mesure sociale. Alors on ne va pas de dire une mesure de gauche mais une mesure social.

La suite de ma question était pourquoi la gauche ne parvient-elle pas à gagner les élections nationales ?

Aujourd’hui, le jeu politique a changé. On est sur une archipélisation des pensées, des groupes, des pressions, des réseaux, des médias… donc cela ne fonctionne plus comme avant. Mais il y en a qui se sentent plus de gauche et plus de droite. Pour moi c’est quelque chose de personnel et cela n’a pas d’importance quand on veut créer un projet, avec un objectif, en y mettant toute son énergie pour que ce projet puisse éclore.

Cela veut dire qu’il faut être capable de parler à tout le monde.

Oui totalement. Moi je ne demande jamais aux gens pour qui ils votent. On s’en fout, c’est leur problème. Je ne demande pas leur religion, leur orientation sexuelle… je ne demande rien, je m’en fous, ce sont des personnes qui sont de Montpellier ou des villages, qui ont envie de s’investir, de faire le bien… C’est, entre guillemets, un peu judéo-chrétien. (rires) Mais c’est important. Ce qui ont envie de faire le bien pour leurs semblables sont les bienvenus. Il y a tellement de travail.

Je voudrai évoquer avec vous trois personnalités. Tout d’abord Vladimir Poutine et cette médaille qu’il vous a remise en 2019.

J’ai d’abord clairement condamné l’invasion de l’Ukraine mais ce n’est qu’un épisode de cette guerre qui a commencé en 2014 et c’est conséquent à la mauvaise gestion par l’Europe de la dissolution de l’Union Soviétique. Confère aux propos d’Hubert Védrine que je partage. Quant à la médaille, certes Vladimir Poutine me l’a remise en 2019 mais je rappelle que ceux qui critiquent étaient peut-être à la coupe du Monde de football en 2018. Et c’est une médaille, qu’a reçu aussi Marek Halter, Claudie Haigneré, Jean-Pierre Chevènement et d’autres, pour saluer des relations qui ont rapproché les deux cultures et les deux peuples. C’est tout. Nous avons valorisé la victoire de Stalingrad et nous avons honoré le premier homme dans l’espace avec la statue de Youri Gagarine, ce sont deux faits historiques. Je considère qu’il faut être clair avec l’histoire, cela n’empêche pas que bien sûr il y a eu des choses très négatives, mais je ne suis pas historien. Je ne prend que ce qu’il y a de bien sinon on refuse toute l’humanité.

Emmanuel Macron.

Comme beaucoup de Français, j’ai pensé qu’en 2017, Emmanuel Macron, qui était issu d’un mouvement citoyen comme nous, aurait la possibilité de réformer la Constitution, mettre en place des conseillers territoriaux, etc, etc, comme il l’avait promis. Malheureusement, son premier réflexe a été de transformer En Marche en parti politique et après cela a suivi l’histoire courante de tous les partis politiques.

Quand vous aviez dit que Montpellier était un laboratoire du macronisme, c’était dans quelle perspective ?

À Montpellier en 2014, cela a été la seule fois où une équipe citoyenne a battu le Parti Socialiste depuis 1977. D’ailleurs, il n’y a que elle qui l’a fait. De 1977 à 2026, une seule fois le PS aura été battu.

Jean-Luc Mélenchon.

Je n’oublie pas qu’il a été longtemps membre du Parti Socialiste. Ensuite il y a deux choses qui me conviennent. Sur la 6e République d’abord et sur l’Union Soviétique sur laquelle il a un discours mesuré. Le PS ne peut pas dire je prends LFI pour me faire élire aux législatives et après je vomis sur LFI alors qu’il m’a fait élire. Ça cela ne me plait pas. Après, je ne suis dans aucun parti mais je suis allé au meeting de LFI sur la 6e République et c’était intéressant. On peut discuter sur les fondements, ce qu’ils proposent et d’autres choses mais le problème n’est pas là. Le problème c’est que cela exprime un désir de changer de Constitution, de passer à une autre page de l’Histoire de France. Et c’est cette page qui m’intéresse. Il faut commencer à l’écrire doucement parce qu’il n’y a pas de révolution.

Jean-Luc Mélenchon n’est-il pas trop brutal pour cela ?

Si bien sûr. Après, si on veut être honnête, quand tout est bouclé de l’intérieur et de l’extérieur, quand tous les médias ou presque sont pilotés par le pouvoir en place, on fait comment ? Il faut qu’il y ait un peu de révolte. D’ailleurs c’est dans l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ». C’est incroyable !

Vous avez récemment consulté les carnets des Gilets Jaunes. Pensez-vous comme certains qu’une forme de révolte couve dans le pays ?

Les Gilets Jaunes ont été à la base suscitée par les décisions, notamment d’Édouard Philippe, sur l’essence, les 80km/h… mais cela dénote plusieurs problèmes qui sont réels notamment le problème de ce que certains appelaient la France périphérique. Je n’aime pas ce terme. On l’utilise pour que les gens comprennent mais pour moi il n’y a pas de France périphérique.

Vous préférez le terme de gueux ?

Non plus ! Ce n’est pas mon truc. On doit être capable de mettre en place un système, et là on en revient à la 6e République, où on a une vision du territoire qui doit être équilibré. Aujourd’hui, il y a plusieurs métropoles en France mais dans leurs alentours, ceux-là ils payent tout. C’est ça qu’il faut revoir. Dans mon projet de République, il faut refaire les régions qui, pour moi, n’ont pas lieu d’exister en l’état. Les régions pâtissent d’un déficit démocratique majeur : elle ne lève pas d’impôts. Dans la mesure où elles ne lèvent pas d’impôts, elles ne vivent que des subventions de l’État qu’elles utilisent selon leur bon vouloir. Donc l’État a créé des grands comtés, comme au Moyen Âge, où les comtes et comtesses à la tête de ces provinces sont des challengers du roi. De fait, on a créé des États dans l’État. Ce n’est pas ça la décentralisation. Pour remédier à cela, il faut modifier le fonctionnement des régions en mettant d’abord en place, comme Emmanuel Macron l’avait promis et Nicolas Sarkozy avant lui, le conseiller territorial qui est à la fois conseiller général et conseiller régional. On ne supprime pas un échelon, on condense les échelons. Deux en un. En plus, ce sont des conseillers territoriaux pour « la France périphérique » là où il n’y a pas de métropole. Alors oui, avec treize départements dans la nouvelle région, il y aura beaucoup d’élus. Mais à l’Assemblée nationale il y a aussi beaucoup d’élus et elle ressemble à une assemblée de provinces avec les baronnies. Là ce sont les cantons mais qui sont des zones accessibles donc l’élu revient au moins à proximité du citoyen. Au final, on a planté un système extrêmement déficitaire et qui n’est pas contrôlé.

Sur un autre registre, vous avez déclaré avoir eu recours à des articles 40 du code de procédure pénale (NDLR : signalement auprès du procureur de la République lorsque l’on est témoin d’une infraction pénale) qui n’ont pas été suivis. Qu’en est-il ?

Elles ont été reçus par le Parquet et pour l’instant je n’ai pas de réponses. Mais je vais bientôt m’exprimer précisément sur ce sujet parce que je trouve tout à fait anormal de ne pas avoir eu de réponses à des questions qui sont des questions importantes. Je n’en dirai pas plus aujourd’hui.

Il y a par ailleurs eu beaucoup de procès intentés contre vous, que vous avez tous gagnés. Y voyez-vous une forme d’instrumentalisation de la justice ?

C’est une instrumentalisation de la justice ! Mais c’est le procureur qui a la clé du système car c’est lui qui maitrise l’audiencement, c’est à dire la date de l’audience. Donc si vous instruisez une plainte avant les élections, vous mettez la personne en examen pendant les élections et, même s’il a raison, on le dit trois ans après. Le train est déjà passé et pendant ce temps vous avez sali la personne. Cela m’est arrivé huit fois.

Pour terminer sur le volet justice, un point m’interroge. David Guyon est avocat à Montpellier mais, au-delà de son activité professionnelle, c’est un soutien de la scientologie et quelqu’un habitué à frayer dans des réseaux conspirationnistes et d’extrêmes-droites. Quels liens entretenez-vous avec lui ?

C’est un avocat de droit administratif et j’avais besoin d’un avocat qui valide des démarches administratives. Quand il s’est installé, je l’ai rencontré. Tout simplement. Il m’avait l’air correct, il a été correct avec moi. C’est tout. Sur l’aspect pénal, mon avocat est Paul Le Fèvre, ancien du cabinet Kiejman & Marembert qui a créé le cabinet franco-italien Mondovi.

Sur un autre domaine, vous avez déclaré « ne pas avoir honte d’être athée ». Quelle est votre religion ?

J’ai été baptisé catholique mais je crois aussi aux arbres de la forêt. Ma religion c’est celle-là.

Vous faites souvent référence au siècle des Lumières, on a l’impression que sur la religion cela peut partir dans tous les sens avec vous (rires).

En fait si je voulais synthétiser, alors que c’est difficilement synthétisable car chacun se fait la sienne, pour moi c’est la splendeur de la création. C’est pour ça que je vous parle des arbres de la forêt. Les arbres ont une portée religieuse incroyable dans l’humanité. C’est un sentiment qui s’élève, ils abritent les chants des oiseaux et sont incompréhensibles sauf en terme de vibrations. Si on rentre là-dedans… ce n’est plus Saurel le politique (rires). Je suis de tradition catholique et je prends pli aux arbres de la forêt, à la source, à la lumière. C’est un tout. C’est Jean-Jacques Rousseau, le déisme.

Dans la 6e République à laquelle vous appelez, comment voyez-vous la laïcité ?

La laïcité c’est tout simple. Tout est écrit. Chacun a le droit de croire ou de ne pas croire et il n’est pas pour ça un citoyen à part. Tous les citoyens français ont le droit de croire ou de ne pas croire et ceux qui sont croyants ont la possibilité de pratiquer leur religion décemment et en toute liberté. Je n’ai aucun problème avec ça.

Le problème viendrait alors des politiques ?

Les politiques la pervertissent un peu pour combattre les religions. Je ne suis pas de ceux-là. Moi, je respecte profondément celui qui croit et celui qui ne croit pas. « Il y avait celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas ». Pour moi la laïcité c’est cette phrase d’Aragon (NDLR : tirée du poème Les Yeux d’Elsa) car il considère d’une même façon celui qui croit et celui qui ne croit pas. L’humanité est comme ça et les deux sont respectables au même titre.

La Franc-maçonnerie a-t-elle toujours autant d’intérêt à vos yeux ?

J’ai fait ma thèse sur le XVIIIe siècle et je considère qu’ils n’étaient pas anticléricales, ils n’étaient pas athée, ils étaient déistes. C’était une aspiration très ouverte qui louait la beauté du monde. Je me sens proche des idées des Lumières, du XVIIIe siècle. Aujourd’hui, c’est devenu très mécanique. Je n’en dis pas plus.

Pour terminer, dans un précédent article j’ai écrit que vous débutiez la réparation de l’histoire d’amour entre vous et les Montpelliérains. Trouvez-vous cela juste ?

Ce que vous avez écrit ne m’a pas choqué. Il n’y a pas eu de réparation. Je fais du sport et, comme en politique, j’ai perdu, j’ai gagné. Quand on perd, on apprend, autant que quand on gagne. On apprend tout le temps. Jamais j’ai reproché quoi que ce soit au peuple de Montpellier. Moi, je défends le peuple de Montpellier. Il y a deux façons de faire de la politique. Ou on utilise le peuple et on leur met le pied dessus pour grimper à Paris. C’est une façon qui n’est pas la mienne. Ou alors on sert le peuple, on se fracasse les élus parce qu’ils sont jaloux, et on ne monte pas à Paris. Depuis la nuit des temps c’est comme ça. Quand j’ai été dur dans mon ancien mandat, je le savais. Je ne l’ai pas fait inconsciemment sur un coup de tête. Je l’ai fait libre, j’ai décidé.

J’ai l’impression que, en prenant toutes les précautions, dans cette possible future campagne vous avez déjà ciblé un axe sentimental en analysant ce qu’il s’était passé durant le mandat de Michaël Delafosse ?

Ce n’est pas sentimental. Je considère un mandat politique comme le considérait Jaurès. C’est une mission. Durant mon mandat, les Montpelliérains n’ont pas perdu d’argent, la ville a été aménagée, je ne me suis pas servi, on m’a fait des procès qu’ils ont tous perdu… Je suis libre. Après, honnêtement, je n’ai pas encore décidé. Il y a beaucoup de choses à gérer, aussi bien en interne qu’en externe. L’harmonie oui mais il n’y a pas que ça.

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